FRANCFORT, 16 mai (Reuters) - Les banques de la zone euro se détournent des activités transfrontalières, mettant en péril l'union bancaire et créant le risque d'une fragmentation dangereuse, a déclaré jeudi le vice-président de la Banque centrale européenne (BCE) Luis de Guindos.

En raison de réglementations nationales qui entravent la consolidation entre banques européennes, le secteur bancaire de la zone euro reste très fragmenté, ce qui le place en position de faiblesse face aux groupe bancaires d'envergure mondiale.

La dépendance excessive des banques vis-à-vis de leur marché domestique crée en outre une dépendance à l'égard de l'économie locale, en maintenant une situation d'interdépendance néfaste entre les banques et leurs Etats, une vulnérabilité majeure qui s'est révélée pendant la crise de la dette en zone euro.

"Les banques de la zone euro ont considérablement réduit leurs activités transfrontalières depuis la crise et environ 60% de leurs expositions totales sont dans leurs pays d'origine", a déclaré Luis de Guindos lors d'une conférence à Bruxelles.

"C'est inquiétant à un moment où la dynamique politique pour parvenir à une union bancaire s'essouffle", a-t-il dit. "Cela pourrait amener les banques à recentrer leurs activités sur leurs marchés nationaux, en pensant que l'union bancaire ne sera jamais bouclée, ce qui entraînerait une nouvelle fragmentation."

Parmi les solutions possibles figurent la création d'un actif européen sans risque, une proposition déjà mise sur la table par les autorités de surveillance des risques mais pas discutée en substance en raison de l'opposition allemande.

Berlin craint que les contribuables allemands ne soient forcés d'assumer le coût de l'irresponsabilité financière d'autres Etats membres. C'est également ce qui fonde la résistance de l'Allemagne à la création d'un système d'assurance des dépôts à l'échelle de la zone euro, qui faciliterait dans le même temps les activités transfrontalières des banques.

Une des options pour la création d'un actif sans risque serait une obligation synthétique, émise par un investisseur privé et adossée à la dette souveraine de chacun des Etats membres de la zone euro. Un tel instrument lierait l'obligation au rendement des dettes existantes, sans imposer de responsabilité juridique explicite sur les Etats qui émettent l'obligation sous-jacente.

"S'il est bien conçu, un tel actif (sans risque) européen pourrait devenir la référence pour les investisseurs sur les marchés des capitaux de l'UE, réduire les incitations à la fuite des capitaux sur les obligations nationales de la zone euro et contribuer à réduire les risques pour les bilans des banques", a-t-il dit. (Balazs Koranyi, Juliette Rouillon pour le service français, édité par marc Joanny)