A ce nouveau front ouvert sur le dossier commercial s'ajoutent des inquiétudes plus générales sur la croissance mondiale, notamment après l'annonce d'une contraction de l'activité manufacturière en Chine en mai.

À Paris, le CAC 40 a terminé en repli de 0,79% à 5.207,63 points, après avoir néanmoins limité ses pertes en fin de séance. L'indice parisien a en effet perdu jusqu'à 1,7% en cours de journée.

Même scénario pour le Footsie britannique qui a lâché 0,78% et le Dax allemand qui a abandonné 1,47%.

L'indice EuroStoxx 50 a perdu 1,14%, le FTSEurofirst 300 a cédé 0,81% et le Stoxx 600 s'est replié de 0,81%.

Ce dernier accuse un repli de 5,7% sur l'ensemble du mois de mai, marqué par un regain de tensions entre les Etats-Unis et leurs partenaires commerciaux, Chine en tête. Il s'agit de son plus fort repli mensuel depuis janvier 2016.

A Paris, le CAC 40 a reculé de 2,05% sur la semaine et de 6,78% sur l'ensemble du mois de mai.

L'accès d'aversion au risque observé vendredi est lié à l'annonce surprise par les Etats-Unis de la mise en oeuvre à partir du 10 juin de droits de douane de 5% sur tous les produits importés du Mexique, et ce alors que les deux pays étaient sur le point de finaliser le nouvel accord de libre-échange USMCA. Ces taxes, progressivement relevées, seraient en vigueur tant que les flux de migrants clandestins traversant le Mexique ne seraient pas stoppés, a expliqué l'administration Trump.

"Cela pose la question de l'intégrité de tout accord commercial qui serait signé dans le futur avec la Chine et/ou l'Union européenne", pointe Michael Hewson, chez CMC Markets.

"Quelles que soient les réticences du président américain à l'égard de l'immigration, l'utilisation du commerce comme arme de cette manière envoie un signal terrible, et il n'est donc pas surprenant que les marchés financiers aient corrigé durement".

Pour Gregory Daco, économiste chez Oxford Economics, les tarifs douaniers américains à l'encontre du Mexique pourraient réduire le PIB des Etats-Unis de 0,7 point de pourcentage en 2020, et donc ramener sa croissance à moins de 1%, tout en faisant basculer l'économie mexicaine dans la récession.

Dans ce contexte, la banque JPMorgan a dit vendredi s'attendre désormais à deux baisses de taux d'intérêt de la part de la Réserve fédérale d'ici la fin de l'année.

Ces anticipations, associées aux craintes croissantes sur l'activité économique mondiale, expliquent la chute constante cette semaine des rendements obligataires, qui a mené le rendement allemand à 10 ans à toucher un plus bas record.

VALEURS

Le nouveau coup d'éclat de Donald Trump a frappé en premier lieu le secteur de l'automobile, parce que de nombreux constructeurs se servent du Mexique comme base pour exporter vers les Etats-Unis mais aussi parce que les constructeurs européens ne peuvent que craindre d'être les suivants sur la liste.

L'indice Stoxx de l'automobile a perdu 1,96%, au plus bas depuis le 8 janvier. Fiat Chrysler a reculé de 4,76%, Renault a cédé 4,54%, Valeo a lâché 2,1%, Faurecia a perdu 3,58% et Volkswagen a abandonné 2,6%.

L'indice Stoxx des ressources de base, très sensible lui aussi à la thématique commerciale, a reculé de 1,63%.

Les banques espagnoles, comme Santander (-2,42%), Sabadell (-2,62%) et BBVA (-4,09%) ont également souffert en raison de leur exposition au marché mexicain.

A Paris, Natixis a reculé de 6,78% alors que le titre se négociait ex-dividende et qu'il a fait l'objet d'un abaissement de l'objectif de cours de Jefferies, qui s'inquiète de l'exposition de la banque à l'économie américaine.

Lanterne rouge du Stoxx 600, Wirecard a chuté de 8,67% après la publication d'informations de presse selon lesquelles le spécialiste allemand des paiements électroniques figure parmi les sociétés visées par une enquête sur des soupçons de transactions frauduleuses.

A WALL STREET

A la clôture en Europe, les indices boursiers américains reculaient de près de 1%, pénalisés eux aussi par l'aggravation des tensions commerciales internationales.

Le Dow Jones se repliait de 0,92% et le S&P 500 abandonnait 0,85% pour repasser sous sa moyenne mobile à 200 jours, un signal technique qui laisse présager de nouvelles pertes pour l'indice large new-yorkais.

Le Nasdaq composite, à forte composante technologique, perdait 0,96%.

LES INDICATEURS DU JOUR

Outre l'indice PMI chinois manufacturier plus mauvais qu'attendu, les investisseurs ont pris connaissance d'une baisse forte et inattendue des ventes au détail et d'un ralentissement plus prononcé que prévu de l'inflation en Allemagne.

En Italie, la croissance du PIB du premier trimestre a été révisée en baisse à 0,1% d'un trimestre sur l'autre contre 0,2% en première estimation.

Aux Etats-Unis, l'inflation a accéléré en avril mais les dépenses de consommation sont restées inchangées et la confiance des ménages a moins rebondi qu'annoncé en première estimation.

TAUX

Le regain d'aversion au risque a provoqué une nouvelle chute des rendements obligataires de référence, celui du Bund allemand à dix ans ayant même touché un plus bas record à -0,213% avant de clôturer à -0,2%.

Le taux de référence de la zone euro a enfoncé le précédent plus bas de -0,204%, inscrit en juillet 2016 après la décision de la Grande-Bretagne de quitter l'Union européenne.

De son côté, le rendement des Treasuries à dix ans cède cinq points de base, à 2,1714% après être passé brièvement sous 2,15% en séance.

Le mouvement est général puisque le rendement des emprunts d'Etat grecs à 10 ans est passé pour la première fois sous 3%.

De leur côté, les rendements des emprunts d'Etat italiens ont continué d'évoluer à contre-courant, traduisant une défiance des investisseurs en raison des tensions renouvelées entre Bruxelles et Rome sur les finances italiennes.

Le taux du dix ans italien a grimpé jusqu'à 2,743%, ce qui a porté l'écart de rendements avec les titres allemands de même échéance à près de 300 points de base, son plus haut niveau depuis décembre. Il est ensuite redescendu pour clôturer à 2,676%.

CHANGES

Le yen joue à plein son rôle de valeur refuge et prend 0,95% face au dollar, au plus haut depuis début janvier.

L'"indice dollar", qui mesure les fluctuations du billet vert face à un panier de devises de référence, recule ainsi de 0,18%.

Le dollar bondit toutefois face au peso mexicain (+2,6%) qui est tombé à un plus bas depuis la fin décembre.

De son côté, l'euro est en légère hausse face au dollar à 1,1144.

PÉTROLE

La chute se poursuit sur les cours du pétrole, qui perdent encore autour de 3% après un recul de près de 4% la veille, ce qui les conduit vers leur plus forte baisse mensuelle en six mois.

Le contrat à terme sur le baril de Brent retombe à moins de 65 dollars et celui du brut léger américain (WTI) revient sur le seuil de 55 dollars, des plus bas depuis le 8 mars.

À SUIVRE LUNDI

Les investisseurs seront attentifs à l'indice chinois PMI Caixin-Markit manufacturier ainsi qu'aux indices PMI et ISM définitifs pour le mois de mai en Europe et aux Etats-Unis, où l'activité du secteur privé a été plus faible qu'attendu selon les premières estimations.

(Édité par Marc Angrand)

par Blandine Henault