PARIS (awp/afp) - Malgré la résurgence de craintes commerciales qui leur a valu une soudaine baisse de régime en début de semaine, les marchés européens veulent continuer à croire à un accord sino-américain à l'approche de l'échéance du 15 décembre.

C'est à cette date que doivent entrer en vigueur de nouvelles hausses de droits de douane américains portant sur près de 160 milliards de dollars de biens importés chinois.

"Quitte à trouver un accord, fût-il partiel, autant le faire avant de réenclencher le 15 décembre une dynamique de hausse des droits de douane", estime auprès de l'AFP Didier Saint-Georges, membre du comité d'investissement stratégique chez Carmignac. Il faut replacer le sujet commercial "dans le contexte de l'environnement économique qui est visiblement affaibli, et par conséquent, il y a un intérêt bien compris de part et d'autre à arrêter l'escalade".

"Je pense qu'ils ont intérêt à calmer les choses" car "si les taxes douanières de décembre arrivent, ce ne sera vraiment pas bon pour les marchés", abonde Esty Dwek, directrice de la stratégie de marché chez Natixis Investment Managers.

Chahutés en début de semaine après des propos de Donald Trump laissant entendre qu'un accord commercial avec Pékin pourrait attendre l'élection américaine de 2020, les Bourses européennes ont finalement reconquis à partir de mercredi la majeure partie du terrain perdu à la faveur de nouveaux signes encourageants sur le commerce.

Un accord commercial avec la Chine "est toujours proche", a affirmé vendredi le principal conseiller économique de Donald Trump.

"Certes, nous allons continuer à être bercé par les postures médiatiques mais au bout du compte, nous nous orientons non seulement vers un accord d'ici la fin de l'année mais un accord qui sera un petit peu moins cosmétique et un petit peu plus substantiel que prévu", juge M. Saint-Georges.

De quoi assurer aux marchés boursiers un mois de décembre au beau fixe, après une année 2019 marquée par une ascension de plus de 20% ?

"Il n'est pas surprenant que les marchés aient pu prendre leurs bénéfices" lundi et mardi, perdant entre 2% et 3% en Europe, "après une montée de plus ou moins 10% en ligne droite depuis septembre", relève Mme Dwek. Nous restons "en phase de progression, même si elle n'est pas très substantielle" et "nous ne voyons pas de marche arrière dans la situation", en dépit d'une volatilité accrue.

Indicateurs économiques ambivalents

Vendredi, le bond des créations d'emplois aux Etats-Unis, ressorties bien au-dessus des attentes, a définitivement permis aux marchés de retrouver le sourire.

Les jours précédents déjà, des statistiques chinoises d'activité manufacturière et dans les services meilleures qu'attendu avaient positivement surpris. Mais ces mêmes données pour l'Europe et les Etats-Unis ont laissé un sentiment plus mitigé.

"C'est extrêmement difficile pour l'instant de tirer (de ces statistiques) une conclusion vraiment affirmée", souligne M. Saint-Georges. "Nous ne sommes plus, semble-t-il, dans une accélération de la détérioration de tous ces indicateurs avancés", note-t-il, "l'environnement actuel reste pourtant très négatif sur la partie industrielle", comme l'ont montré ce vendredi encore les mauvais chiffres de la production industrielle allemande.

Mme Dwek, elle, veut croire à "une amélioration modérée de l'activité globale" en 2020. "Les données s'améliorent de manière générale donc le marché est plutôt confiant et veut continuer à voir le progrès". Dans ce contexte, les réunions des banques centrales américaine et européenne la semaine prochaine s'annoncent comme des "non événements".

Même les élections législatives du 12 décembre au Royaume-Uni ne devraient guère réserver de surprise, le scénario le plus probable étant une victoire du parti conservateur du Premier ministre Boris Johnson, qui permettrait de valider l'accord de Brexit et de sortir de l'UE fin janvier 2020.

Que ce soit pour la guerre commerciale ou le Brexit, le scénario du pire "semble derrière nous, et c'est pour cela que les marchés cassent un peu leur plafond de verre depuis deux mois", mais il va bien falloir revenir en 2020 à "la réalité du cycle économique", prévient M. Saint-Georges.

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