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MEXICO/EL PASO, Texas, 15 juin (Reuters) - Les Etats-Unis ont doublé le nombre de migrants clandestins venus d'Amérique centrale qu'ils renvoient quotidiennement de l'autre côté de la frontière avec le Mexique, depuis la ville texane d'El Paso, a déclaré vendredi un représentant mexicain.

Il s'agit de l'une des premières mesures mises en oeuvre dans le cadre de l'accord sur l'immigration conclu plus tôt ce mois-ci entre Washington et Mexico, lequel veut éviter que le président américain Donald Trump mette à exécution sa menace d'imposer des droits de douane sur tous les produits importés du Mexique.

Dans le cadre de cet accord, dont peu de détails ont filtré, le Mexique a accepté d'accueillir davantage de migrants qui demandent l'asile aux Etats-Unis pendant l'examen de leur dossier par les autorités américaines.

Luis Carlos Cano, porte-parole de l'agence nationale mexicaine de l'immigration, basée à Ciudad Juarez, ville frontalière à El Paso, a déclaré que depuis jeudi environ 200 migrants clandestins étaient renvoyés quotidiennement au Mexique, contre jusqu'à une centaine par jour auparavant.

Ce programme de renvoi de migrants, instauré en janvier dernier, a jusqu'à présent donné lieu au transfert de près de 12.000 personnes des Etats-Unis vers le Mexique.

Il n'est toutefois pas question que les autorités mexicaines acceptent un nombre illimité de demandeurs d'asile, a déclaré vendredi le ministre des Affaires étrangères, Marcelo Ebrard, avant une réunion avec des représentants américains sur les détails de l'extension de ce programme.

Le chef de la diplomatie mexicaine a indiqué qu'il allait évoquer lors de cette réunion les villes qui prendraient part au programme ainsi que le nombre et les nationalités des migrants acceptés.

"INADMISSIBLE"

Donald Trump a confirmé vendredi dans un entretien à la chaîne ABC News que l'accord americano-mexicain prévoyait aussi que le Mexique devienne un "pays tiers sûr" si le flux de migrants clandestins n'était pas suffisamment réduit d'ici à mi-juillet. Ce statut contraindrait les migrants venus d'autres pays d'Amérique centrale à présenter leur demande d'asile aux autorités mexicaines et non plus américaines une fois la frontière franchie.

Au Mexique, les mesures acceptées par le gouvernement dans les négociations avec l'administration Trump suscitent des crispations au sein de la coalition du président Andres Manuel Lopez Obrador.

Plusieurs élus de premier plan du Mouvement de régénération nationale (Morena, gauche), dont "AMLO" est issu, ont fait part de leur opposition à cet accord, ne voulant pas céder à toutes les demandes de Trump et craignant - comme l'ont évoqué des représentants mexicains cette semaine - que la législation mexicaine soit modifiée pour contenter le président américain.

"Ils veulent transformer ce pays en cage", a dit mercredi Porfirio Munoz Ledo, président de la chambre basse du Congrès, à propos de la volonté des Etats-Unis de faire du Mexique un pays tiers sûr.

Il a dénoncé plus tard, dans un entretien à la radio publique, le recours de Trump à la "terreur économique" pour forcer la main au Mexique qui, selon Ledo, ne doit pas céder.

Le chef de file de Morena au Sénat, Ricardo Monreal, a déclaré en début de semaine que l'organe législatif considérait un accord de pays tiers sûr comme "inadmissible".

S'il s'est mis en retrait pour laisser son chef de la diplomatie mener les négociations avec Washington, Lopez Obrador a défendu l'accord et s'est dit "très content" de ses termes car "nous évitons une crise économique". (Franck Jack Daniel, Julio-Cesar Chavez, Dave Graham, avec Makini Brice et Susan Heavey à Washington; Jean Terzian pour le service français)