Londres (awp/afp) - Le combat contre les "pressions inflationnistes" a pris le dessus sur les chocs du secteur bancaire: la Banque d'Angleterre (BoE) a elle aussi remonté son taux directeur jeudi, imitant la Fed, la BCE et les banques centrales en Suisse et en Norvège.

La BoE a resserré son taux pour la onzième fois consécutive, de 0,25 point, une ampleur similaire à celle de la toute puissante Réserve fédérale américaine (Fed) la veille.

La Banque nationale suisse (BNS) a suivi plus tôt dans la journée le chemin de la Banque centrale européenne (BCE) la semaine dernière en remontant son taux de 0,50 point de pourcentage. En Norvège, la banque centrale a choisi 25 points de base.

Le taux directeur de la BoE atteint désormais 4,25%, un sommet depuis fin 2008.

Mercredi soir déjà, la Fed avait tenté avec une hausse modeste de ménager la chèvre et le chou, entre les turbulences financières des derniers jours et une valse des prix persistante.

Des deux côtés de l'Atlantique, l'objectif numéro un des banques centrales reste d'atteindre une inflation à 2%, ce qui est encore loin d'être le cas.

Mais la faillite de la californienne Silicon Valley Bank (SVB), puis de deux autres banques régionales américaines, a montré à quel point le secteur bancaire avait été fragilisé par les resserrements monétaires effrénés des derniers mois.

"Nouveaux risques"

Pour l'instant, la crise économique semble plus inquiéter aux Etats-Unis qu'en Europe.

La Fed laisse désormais entendre que la fin de son cycle de tours de vis monétaires approche: elle adopte désormais le conditionnel pour évoquer qu'"un futur resserrement de la politique monétaire pourrait être nécessaire" au lieu d'un mode affirmatif.

Elle a aussi averti à l'issue de sa réunion, que les récents déboires des banques étaient "susceptibles (...) de peser sur l'activité économique, les embauches et l'inflation", soulignant que "l'ampleur de ces effets est incertaine".

Le risque n'est pas limité aux Etats-Unis, comme l'a prouvé le rachat précipité à prix cassé de Credit Suisse par UBS: la présidente de la BCE Christine Lagarde a reconnu mercredi que les tensions sur le secteur bancaire engendraient de "nouveaux risques" pour l'économie.

Et au Royaume-Uni, "il reste des canaux par lesquels les conditions économiques britanniques pourraient être affectées", notamment en cas "de tensions sur des banques non-britanniques", a averti la banque centrale mercredi dans une lettre au Parlement.

Mais la BoE n'a pas revu en baisse ses prévisions de croissance, et table même sur un petit coup de pouce donné par des mesures budgétaires annoncées plus tôt dans le mois.

Avec une inflation qui a rebondi en février et reste au-dessus de 10%, et une économie qui reprend un peu de couleurs, les investisseurs parient que la BoE montera ses taux une dernière fois lors de sa prochaine réunion.

Certains économistes jugent cependant que la BoE pourrait arrêter de remonter les taux, comme Daniel Mahoney, de Handelsbanken: étant donné que les attentes de hausses de taux de la Fed ont baissé ces dernières semaines, le comité de politique monétaire britannique "n'a plus besoin de s'inquiéter de la dépréciation de la livre face au dollar", un facteur inflationniste, estime-t-il.

Hausses suisse et norvégienne

En Suisse, où le taux de la BNS reste relativement bas à 1,5%, le patron de la banque centrale Thomas Jordan a estimé qu'il n'était "pas exclu que de nouveaux relèvements soient nécessaires pour assurer la stabilité des prix". L'inflation y reste plus modérée que dans de nombreux pays européens, à 3,4% sur un an, mais elle a accéléré ces derniers mois.

"La Banque avait clairement envie de tourner la page de la saga Credit Suisse", juge Adrian Prettejohn, analyste chez Capital Economics, qui remarque que la BNS a relevé ses prévisions de croissance pour 2023 et estime que la banque va encore relever son taux une fois cette année.

Et en Norvège, la banque centrale a monté son taux à 3%, alors que l'inflation, même si elle a ralenti en février, reste à 6,3%.

Le dollar s'inscrivait en baisse face à la livre, au franc suisse et à la couronne norvégienne, mais le mouvement restait modéré car ces décisions des banques centrales avaient été anticipées.

afp/rp