Entamé mi-novembre, ce mouvement de protestation initialement centré sur la taxation des carburants s'est depuis élargi à d'autres revendications. Il a perturbé les approvisionnements dans de nombreux secteurs et pesé sur le commerce, en pleine période des achats de fin d'année, sans compter le coût des dégâts survenus en marge des manifestations.

"Je pense que les événements actuels devraient nous faire perdre 0,1 point de croissance de notre richesse nationale au dernier trimestre", ce qui correspond à "des emplois en moins (...) de la prospérité en moins pour les Français", a déclaré Bruno Le Maire lundi sur RTL.

"Ce n'est pas rattrapable, on est dans les derniers jours de l'année", a-t-il ajouté, précisant que "ce qui compte maintenant c'est que nous puissions mettre un terme à cette crise".

Pour sa secrétaire d'Etat Agnès Pannier-Runacher, interrogée sur LCI, "0,1 point pour une croissance qui était attendue à 1,6% ça veut dire que la croissance sera plutôt du côté de 1,5%".

Alors que Bruno Le Maire venait de déclarer sur RTL que le gouvernement s'en tenait toujours pour le moment à sa prévision de croissance de 1,7% pour 2018, les déclarations d'Agnès Pannier-Runacher semblent faire référence à la prévision de 1,6% publiée par l'Insee début octobre, avant l'émergence du mouvement des "Gilets jaunes".

RISQUES SUPPLÉMENTAIRES POUR LE BUDGET 2019

De son côté, la Banque de France a revu en baisse de 0,2 point sa prévision de croissance pour le quatrième trimestre, à 0,2% contre 0,4% précédemment.

A ce niveau, la croissance sur l'ensemble de l'année 2018 s'établirait à 1,5%, observe Denis Ferrand, directeur général de Rexecode, sur Twitter.

Ce chiffre marque un net ralentissement par rapport au pic de dix ans (2,3%) touché en 2017, notamment sous l'effet des tensions sur le commerce international et représente autant d'élan perdu pour la croissance en 2019, ce qui constitue un facteur de risque supplémentaire pour le déficit public.

"L'acquis de croissance pour 2018 atteint au terme du quatrième trimestre 2017 était de 1%. Cette année, si l'anticipation de la Banque de France d'une croissance de 0,2% au T4 est vérifiée, il ne sera que de 0,4%", souligne Denis Ferrand.

"Il faudra cavaler fort (0,5% chaque trimestre) pour arriver au 1,7% du budget 2019", observe le directeur général de l'institut économique proche du patronat.

Sachant qu'une moindre croissance se traduira par de moindres recettes fiscales, ce tassement va encore compliquer la donne pour le gouvernement, alors que les concessions déjà consenties pour tenter d'apaiser la grogne des "Gilets jaunes" ont déjà grevé d'au moins quatre milliards d'euros le budget 2019, encore en cours de discussions au Parlement.

Avant l'émergence du mouvement des "Gilets jaunes", les économistes tablaient sur une accélération de la croissance après son trou d'air du début d'année.

L'économie française a été freinée au premier semestre par une consommation des ménages atone en lien avec un calendrier fiscal défavorable pour le pouvoir d'achat, ainsi que par les grèves du printemps dans les transports.

Elle aurait notamment dû bénéficier au deuxième semestre d'une reprise de la consommation des ménages, soutenue par la progression de leur pouvoir d'achat avec la suppression totale des cotisations chômage et maladie des salariés du privé et la baisse de la taxe d'habitation pour 80% des foyers.

(Myriam Rivet, édité par Yves Clarisse)

par Myriam Rivet