par Andrew Osborn et Paul Taylor et Guy Faulconbridge

LONDRES, 18 juillet (Reuters) - La Grande-Bretagne a renoncé à armer les rebelles syriens et n'exclut pas que le président Bachar al Assad puisse rester au pouvoir pendant encore plusieurs années, a-t-on appris jeudi auprès de sources au fait du dossier à Londres.

La conférence internationale de paix envisagée par Moscou et Washington pour trouver une solution au conflit pourrait ne pas être organisée avant l'an prochain, si le projet n'est pas purement et simplement abandonné, ajoute-t-on de mêmes sources.

"Il est clair que la Grande-Bretagne ne va pas armer les rebelles, de quelque manière que ce soit", a dit une des sources interrogées en rappelant que le Parlement de Londres avait exigé et obtenu la semaine dernière d'être consulté au préalable, le cas échéant, sur cette question.

L'évolution de la position britannique s'explique notamment par l'hostilité de l'opinion publique à un quelconque engagement aux côtés des rebelles syriens et par la crainte de voir les armes envoyées aux insurgés tomber entre les mains de groupes islamistes farouchement anti-occidentaux.

C'est pourtant le Premier ministre britannique, David Cameron, appuyé par la France, qui avait suggéré en mars de lever l'embargo européen sur les armes destinées à la Syrie afin de venir en aide à la rébelllion.

L'engagement de l'Iran et du Hezbollah libanais aux côtés d'Assad a fait pencher la balance en faveur des forces gouvernementales, une évolution illustrée par la prise début juin de la ville de Koussaïr, près de la frontière libanaise.

"La façon de voir des Occidentaux a changé", a précisé une source proche du gouvernement britannique. "Nous croyions auparavant qu'Assad ne pourrait tenir que quelques mois. Nous pensons maintenant qu'il peut rester en place pendant encore quelques années."

Et plus la guerre civile durera, plus les islamistes liés à Al Qaïda gagneront de l'influence face aux modérés de l'Armée syrienne libre (ASL), estime-t-on à Londres.

Aux Etats-Unis, les efforts pour armer les rebelles ne progressent pas en raison des réticences du Congrès.

RÉTICENCES PARLEMENTAIRES

Seule une évolution spectaculaire de la situation, comme par exemple l'emploi généralisé d'armes chimiques, pourrait amener la Grande-Bretagne à revoir sa position.

Une décision d'armer les rebelles devrait de toute façon obtenir le feu vert du Parlement, ce qui semble peu probable.

Pour le député conservateur John Baron, une majorité de parlementaires est opposée à l'envoi d'armes aux insurgés, une décision qui ne ferait selon lui qu'aggraver la situation et les souffrances de la population.

"Si vous donnez des armes au général (Salim) Idriss, le chef du Conseil militaire suprême de l'ASL, comment être sûr que ces armes ne tomberont pas finalement dans de mauvaises mains et ne seront pas utilisées pour abattre un avion de ligne occidental ?", se demande le député tory.

Interrogée sur l'idée d'une nouvelle conférence internationale à Genève, avancée par les Russes et les Américains, une source se montre sceptique.

"Nous avions espéré que cette conférence puisse se tenir cette année (...) mais ce pourrait être seulement l'an prochain. On ne peut pourtant pas attendre indéfiniment."

Quant à l'établissement de zones d'exclusion aérienne en Syrie, comme cela avait été le cas en 2011 en Libye, "cela voudrait dire qu'il faudrait envoyer des soldats sur le terrain et cela coûterait horriblement cher".

La décision de l'Iran de fournir des hommes et de l'argent à Assad a encore compliqué la situation, souligne une autre source, qui parle de 10.000 combattants iraniens et miliciens du Hezbollah présents actuellement en Syrie.

Téhéran dément la présence de militaires iraniens sur le terrain.

"Assad ne peut pas remporter une victoire décisive mais il peut marquer des points tactiquement, comme il l'a fait à Koussaïr et comme il pourrait encore le faire à Homs", dit une source à Londres.

"L'opposition, quant à elle, contrôle toujours aux frontières de larges zones qu'Assad ne peut pas reconquérir, et en cas de besoin les insurgés peuvent franchir la frontière et se regrouper." (Avec Mark Hosenball à Washington, Guy Kerivel pour le service français, édité par Gilles Trequesser)