Un réforme pour dégager des marges budgétaires, dit Macron
Des dépenses qui restent contrôlées, précise le COR
Peu de soutiens à l'Assemblée nationale
(actualisé avec avis du comité de suivi des retraites §9)
PARIS, 22 septembre (Reuters) - Emmanuel Macron a
défendu jeudi son projet controversé de réforme du système des
retraites, expliquant vouloir dégager des marges de manoeuvre
budgétaires pour financer les autres grandes réformes sociales
du pays, préserver l'indépendance de la France et favoriser la
transition écologique.
Interviewé par BFM TV à bord de l'avion présidentiel qui le
ramenait de New York, le chef de l'Etat a répondu aux critiques
des partenaires sociaux et de nombreux parlementaires, y compris
de la majorité, qui s'opposent au scénario annoncé d'un simple
amendement au projet de loi de financement de la Sécurité
sociale (PLFSS), présenté lundi en conseil des ministres.
Plusieurs pistes de réforme sont à l'étude, dont celles de
décaler l'âge légal d'ouverture des droits à la retraite et
d'accélérer la réforme de 2014 qui prolonge la durée de
cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein.
"Je suis convaincu que c'est une nécessité. Pourquoi ? Parce
que nous voyons qu'aujourd'hui, le défi qui est le nôtre est
d'être plus indépendant en européen et en franco-français", a
dit Emmanuel Macron, soulignant que "notre indépendance n'est
pas de vivre à crédit".
Le gouvernement a choisi de protéger les Français de
l'inflation grâce au bouclier tarifaire, de soutenir l'économie
pendant la crise sanitaire, et veut mener une réforme de
l'hôpital, de l'éducation et de la sécurité tout en préparant la
transition écologique, a-t-il développé.
"Ça coûte de l'argent. Est-ce qu'on peut le financer par le
déficit ? Non. Nous sommes un des pays qui a le plus grand
déficit en Europe. Peut-on le financer par plus d'impôts ? Non.
Nous sommes le pays parmi ceux taxant le plus en Europe".
"La vérité, c'est qu'il nous faut travailler plus et
produire plus de richesses dans notre pays si nous voulons
protéger, avoir une politique de justice sociale et défendre le
modèle social français, sa force et son avenir", a-t-il ajouté.
Le Conseil d'orientation des retraites (COR) a fait savoir
la semaine dernière que les dépenses du système des retraites,
même si elles étaient contrôlées sur le long terme, n'étaient
pas compatibles avec la trajectoire de réduction des dépenses
publiques envisagée par le gouvernement pour 2027.
Le Comité de suivi des retraites a alerté jeudi sur le
risque de "déséquilibres résiduels significatifs à court et
moyen terme" qui pourraient être amplifiés en cas de croissance
dégradée dans les années à venir et recommande au législateur de
"trouver une réponse aux problèmes d'équilibrage" du système.
PEU DE SOUTIENS À L'ASSEMBLÉE
Mais l'idée d'une réforme aussi sensible à la sortie d'une
pandémie et en pleine crise énergétique a entraîné une levée de
bouclier des organisations syndicales et d'une grande partie des
parlementaires. Selon un sondage Odoxa pour le Figaro publié
mercredi, 55% des Français ne veulent pas que la réforme des
retraites soit relancée.
Pour le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, le
projet envisagé risque de "mettre le feu au pays". Force
ouvrière et la CGT promettent déjà grèves et manifestations.
Ce dossier divise même la majorité. Yaël Braun-Pivet,
présidente de l'Assemblée nationale, s'est déclarée jeudi
hostile à l'idée de réformer par amendement, prônant une plus
grande concertation au nom de la "nouvelle méthode" dont se
réclame l'exécutif.
Dans le sillage du président du MoDem, François Bayrou, sur
cette question, les députés centristes ont fait
savoir qu'ils voteraient certainement contre ce projet s'il
figurait dans le texte budgétaire.
Les Républicains, en pleine campagne pour désigner leur
président, réprouvent la méthode du gouvernement. Ils attendent
néanmoins de connaître le projet final avant de se prononcer.
S'il ne convainc pas les députés, le gouvernement a la
possibilité d'imposer la réforme en ayant recours à l'article
49.3 qui permet l'adoption d'une loi sans vote.
"Emmanuel Macron n'est pas rééligible, il n'a donc pas de
limite. Il peut dire 'moi je règle les problèmes, je suis
courageux, vous m'avez réélu pour agir, je suis celui qui fait,
pensez à nos enfants'. Bien sûr, ça peut partir dans un conflit
social redoutable, donc sa décision ce sera sur ça, le risque
social", a dit à Reuters un parlementaire socialiste sous
couvert d'anonymat.
La Première ministre, Elizabeth Borne, n'a pas encore livré
publiquement son avis sur le sujet.
A lire aussi : Retraites-Des dépenses contenues mais
incompatibles avec les objectifs du gouvernement-COR
(Reportage Caroline Pailliez, Elizabeth Pineau et Bertrand
Boucey, édité par Kate Entringer et Sophie Louet)