BORDEAUX, 12 janvier (Reuters) - Près de 9.000 personnes ont défilé samedi à Bayonne pour réclamer la poursuite du rapprochement des prisonniers du Pays basque, selon les estimations de l'organisateur, l'association Artisans de la Paix qui avait œuvré au désarmement de l'Eta et à sa dissolution.

Les manifestants se sont rassemblés devant la gare de Bayonne et ont défilé derrière une banderole portant le slogan en langue basque "Orain presoak" (maintenant les prisonniers) avant de gagner l'esplanade Roland-Barthes où plusieurs personnalités ont pris la parole, à commencer par Jean-René Etchegaray, maire de Bayonne et président de la Communauté d'agglomération Pays basque.

Le rassemblement a reçu le soutien de 270 élus du Pays Basque dont 110 maires soit 65% des maires du Pays basque.

Pendant ce temps une manifestation identique se" déroulait à Bilbao, de l'autre côté de la frontière, et a regroupé 70.000 personnes selon les Artisans de la Paix.

"Cette manifestation s'inscrit dans le processus de paix global mais n'a absolument pas pour but de le ramener à la seule question des prisonniers mais de rappeler que sur le chemin qui a été fait depuis quelques temps, avec le désarmement de l'Eta le 8 avril 2017 puis sa dissolution le 4 mai 2018, c'est maintenant le tour des prisonniers", a dit à Reuters l'un des Artisans de la Paix Michel Berhocoirigoin.

Après le désarmement de l'Eta, un canal de discussion a été ouvert en France avec le ministère de la Justice qui a permis le rapprochement de 25 prisonniers sur 46 transférés dans les établissements pénitentiaires à Mont-de-Marsan dans les Landes et à Lannemezan dans les Hautes-Pyrénées et la levée de 22 statuts DPS (détenu particulièrement signalé) sur 36.

"Mais les discussions avec le ministère ont été suspendues par la délégation basque parce que notre interlocutrice a dit que nous étions un peu arrivé au bout de ce qui pouvait être fait", a rapporté Michel Berhocoirigoin.

Les Artisans de la paix et toutes ses composantes craignent que la concomitance de cette annonce avec l'arrivée des socialistes au pouvoir à Madrid ne soit pas une coïncidence.

La Garde des Sceaux Nicole Belloubet, invitée de France Bleu Pays Basque vendredi, a cependant indiqué qu'elle travaillait avec Madrid parce que "le dialogue est essentiel avec l'Espagne mais Madrid ne nous impose pas notre politique".

La ministre a ajouté que "le dialogue n'est pas rompu" avec la délégation basque et que "les prisonniers basques ont les mêmes droits que les autres détenus en France".

Nicole Belloubet a assuré que sa "porte est toujours ouverte, notamment pour les prisonnières" mais leur rapprochement est plus problématique en raison du manque de structures adéquates. (Claude Canellas)