PARIS (awp/afp) - La Bourse de Paris, comme ses homologues européennes, se penchera sur la macroéconomie la semaine à venir, à condition que la géopolitique ne s'invite pas de nouveau sur le devant de la scène.

Commandes de biens durables ou confiance des consommateurs, les statistiques vont se succéder aux Etats-Unis, donnant un nouvel aperçu de l'état de l'économie de la première puissance mondiale.

De ce côté-ci de l'Atlantique, les indicateurs seront aussi regardés avec attention après plusieurs publications maussades. En Allemagne, les chiffres provisoires de l'inflation en juin et le baromètre Ifo du moral des entrepreneurs seront notamment à l'agenda.

Au Royaume-Uni, les investisseurs devront se contenter de la troisième estimation de la croissance économique pour le premier trimestre. Les économistes espèrent un rebond au deuxième trimestre mais restent prudents pour l'ensemble de l'année, sur fond de ralentissement des dépenses des ménages et de doutes des entreprises dans le contexte du Brexit.

Recul des indices européens

Ce sera dans tous les cas l'occasion pour les investisseurs de revenir aux fondamentaux, dans un environnement qui s'est transformé depuis le début de l'année.

"Nous rentrons dans une nouvelle phase sur le plan monétaire. Il y a un durcissement incontestable aux Etats-Unis, et en Europe il n'y a plus d'assouplissement supplémentaire possible. C'est un cycle monétaire qui se termine et un nouveau plus restrictif qui commence", détaille pour l'AFP Didier Saint-Georges, membre du comité d'investissement chez Carmignac.

Par ailleurs, sur le plan politique, ajoute-t-il, "nous sommes entrés dans une phase de contestation. Il reste la question du cycle économique. Une fragilité s'est mise en place et elle sera visible le jour où le cycle économique ralentira pour de bon, car il n'y a plus les parachutes de soutien qu'il y avait précédemment", souligne-t-il.

La politique a indiscutablement dominé les dernières semaines, et les marchés ont marqué le pas dans un climat d'aversion pour le risque. Sur une semaine, le Dax a ainsi lâché plus de 3%, le CAC cédant 2%. De son côté, l'indice FTSE-100 à Londres a pris 0,63%.

Plusieurs incertitudes ont pesé sur le moral des investisseurs, au premier plan desquels la menace d'une guerre commerciale entre Washington et Pékin. Après avoir annoncé des taxes sur 50 milliards de dollars d'importations chinoises pour compenser des pratiques commerciales jugées déloyales, le président Trump a menacé lundi d'en ajouter de nouvelles en cas de rétorsion de Pékin.

"Le protectionnisme est appelé à continuer à se développer à travers le monde, ce n'est pas une tendance à court terme", estime auprès de l'AFP Jeanne Asseraf-Bitton, responsable de la stratégie d'investissement de Lyxor AM.

Configuration "périlleuse"

Et les conséquences microéconomiques pourraient se faire sentir rapidement. Ainsi, citant les risques de la guerre commerciale, le constructeur de voitures allemand Daimler a revu à la baisse mercredi ses prévisions de résultats pour 2018, une annonce qui a fait frissonner les marchés.

Le marché "s'aperçoit que des secteurs entiers se sont énormément mondialisés ces dernières années", observe Didier Saint-Georges.

Et la tendance au repli sur soi n'est pas cantonnée aux Etats-Unis. Les investisseurs restent en effet attentifs aux évolutions politiques en Italie, où la nomination d'eurosceptiques à la tête de deux commissions parlementaires a fait grimper les taux d'emprunt italiens jeudi.

"A un certain nombre de postes importants sont nommés des eurosceptiques notables. C'est une grosse pierre dans la mare de l'Europe", explique Mme Asseraf-Bitton.

Si les marchés ont jusqu'ici résisté à une correction forte, la prudence restait donc de mise.

"Pour l'instant, cela tient car la croissance américaine a été bonne plus longtemps que prévu grâce au programme fiscal de Donald Trump", estime M. Saint-Georges. Mais en cas de ralentissement économique mondial, "nous avons une configuration potentiellement périlleuse pour les marchés actions", avertit le spécialiste.

Mais la semaine n'a pas été dépourvue de bonnes nouvelles. Ainsi, les ministres des Finances de la zone euro se sont entendus sur un accord, avec à la clef un dernier allégement de la dette grecque, mettant fin à huit années d'austérité et de plans de sauvetage pour la Grèce.

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