L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a signalé pour la dernière fois, le 13 juin, la présence de 409 kg d’uranium enrichi sur le site nucléaire d’Ispahan. Une partie de ce stock atteint un enrichissement à 60%, bien au-delà du seuil civil (2 à 3%), mais encore en deçà des 90% nécessaires pour produire une arme nucléaire. 

Téhéran affirme avoir pris des “mesures spéciales” pour protéger ce stock, qui peut être déplacé aisément au sein de la dizaine de sites que compte son complexe nucléaire. Mais depuis une série de frappes menées par les États-Unis, le mystère demeure : l’uranium enrichi reste introuvable.

Succès limité ou total ? 

À la suite des bombardements souterrains visant des infrastructures iraniennes, Donald Trump a assuré que “la menace nucléaire iranienne est neutralisée”. Cependant, le stock n’a semble-t-il pas été impacté et c’est cela qui incite certains experts à penser que les bombardements sur le complexe militaire iranien ne sont pas terminés.

Pour ceux qui ont grandi, vieilli, voire les deux avec la menace nucléaire en toile de fond, l’idée même de bombardements sur des sites atomiques réels est profondément inquiétante. Il est donc essentiel d’en mesurer les risques.

Le risque d’un désastre radiologique

Une attaque sur un réacteur civil en activité serait une catastrophe majeure. Tous les experts s’accordent : les conséquences seraient comparables à celles de Tchernobyl. Mais à cela, il faut ajouter des conséquences géopolitiques. 

Sur le site de Bouchehr, des réacteurs sont exploités avec l’aide de la Russie, et de nouveaux sont en construction, selon Alexeï Likhachev, chef de l’agence russe de l’énergie atomique Rosatom.

Le danger ne s’arrête pas aux frontières iraniennes. Le golfe Persique, voisin, pourrait voir son eau contaminée. Or, plusieurs pays de la région, Qatar et Bahreïn en tête, en dépendent à 100% pour leur approvisionnement en eau douce via le dessalement. L’Arabie saoudite, Oman et les Émirats arabes unis sont également très dépendants, bien qu’ils aient accès à d’autres sources maritimes.

C’est précisément pour éviter un tel scénario qu’Israël et les États-Unis ont jusqu’ici épargné le site civil de Bouchehr.

Cibles prioritaires : les sites d’enrichissement

L’armée américaine a frappé les sites de Fordo, Natanz et Ispahan. Donald Trump affirme que les principales installations d’enrichissement de l’Iran ont été “complètement et totalement anéanties”. Ces attaques s’inscrivent dans la continuité de frappes israéliennes récentes visant Natanz, Ispahan, Arak et même Téhéran.

En ligne de mire, le cœur du programme nucléaire iranien. Les infrastructures, les scientifiques, les centres de conversion, tout est ciblé pour entraver le processus d’enrichissement.

Quel danger immédiat ?

L’uranium faiblement enrichi est très peu radioactif. Le principal risque concerne l’hexafluorure d’uranium (UF6), un gaz hautement toxique et corrosif utilisé dans l’enrichissement. En cas de fuite, il peut réagir avec l’humidité de l’air, provoquant des composés chimiques dangereux, potentiellement mortels par inhalation.

Toutefois, la structure souterraine des installations limite la dispersion. L’UF6 ne se propage pas loin, et les sites sont souvent protégés par des couches massives de béton, de roche et de terre.

Pour Simon Bennett, spécialiste à l’université de Leicester, les risques environnementaux restent “minimes” en cas de frappes souterraines. James Acton, du Carnegie Endowment for International Peace, juge “peu probable” que ces attaques aient des effets significatifs hors des sites visés.

Une ligne rouge de plus en plus floue

Israël et les États-Unis assurent vouloir éviter toute catastrophe radioactive. Pourtant, la tension monte. Mi-juin, une alerte lancée par Israël à propos d’une frappe sur le site civil de Bouchehr, finalement infondée, a provoqué un sursaut. La ligne rouge semble chaque jour plus proche.

Le conflit semble loin d’être clos bien que l’Iran soit affaibli. Son stock d’uranium reste introuvable. Et l’objectif d’anéantir ses capacités nucléaires n’est pas encore atteint.