Pour expliquer le parcours des actions américaines hier, et plus généralement la séance un peu morose que les places boursières ont connue, je vais commencer par rappeler, encore une fois, ce qui constitue la trame de fond dominante du moment. En gros, l'inflation est encore là, mais pas trop. L’activité économique souffre, mais pas trop. Il y a des désordres financiers, mais pas trop. Du coup la Fed américaine qui est plutôt pro-business n'a d'autre choix que de cesser de relever ses taux, voire de commencer à les baisser avant que la situation ne devienne trop critique, pour relancer l'économie. En espérant que l'inflation se carapatera d'elle-même à un moment ou à un autre et que la partie de dominos des faillites bancaires est terminée.

Cette petite musique a porté les marchés depuis plusieurs semaines. Or deux accrocs sont venus assombrir un peu la belle histoire. D'abord, la décision de l'OPEP+ de réduire assez nettement sa production, qui a eu pour effet de renforcer les cours pétroliers. Cette volte-face du cartel peut avoir des implications non seulement sur les prix à la consommation mais aussi sur la grogne sociale dans les pays occidentaux, où le coût de l'essence est toujours un sujet politiquement sensible. Le second accroc, c'est la dégradation des données macroéconomiques américaines. Comme je l'écrivais juste avant, le marché s'attend à des chiffres moins fringants, mais il ne faudrait pas qu'ils deviennent trop inquiétants. Or les indicateurs d'activité manufacturière sont en PLS et on sait depuis hier que le marché du travail commence à se tendre, avec des offres d'emploi qui ont touché un plancher de deux ans.

Si les investisseurs étaient réellement rationnels, ils se réjouiraient de constater que le marché du travail commence à donner des signes de faiblesse, car c'est probablement la statistique que la Fed regarde le plus avec l'évolution des prix pour déterminer sa politique monétaire. Les stratèges des grandes banques de Wall Street répètent souvent que le fameux "pivot" dans la politique monétaire de la Fed dépend de l'emploi. Mais hier sur les marchés, on peut dire que la peur d'un atterrissage économique brutal a pris le dessus sur l'espoir de voir les taux repartir en baisse. Il est bien trop tôt pour tirer des conclusions, mais c'est un point de vigilance. Les swaps du marché des taux montrent que les financiers misent désormais en majorité (58%) sur un statu quo et non plus sur une hausse de taux de 25 points de base lors de la réunion de la Fed du 3 mai. Bon c'est dans un mois, il va encore couler de l'eau sous les ponts d'ici là, mais ça donne une idée de l'ambiance. Le pronostic dominant est même désormais que la banque centrale américaine réduira ses taux de 75 points de base d'ici la fin de l'année. Il y a un gros décalage entre cette vision et celle de la Fed, qui cherche à faire passer le message que baisse de taux, il n'y aura point en 2023. Pour affiner les probabilités, deux dates à retenir : vendredi pour les statistiques mensuelles sur l'emploi US et le 12 avril, pour l'inflation de mars.

Alors qui c'est le plus fort ? L'hippopotame ou l'éléphant ?, pour faire une analogie entre le célèbre économiste cannois Simon Jérémi et la situation boursière. Eh bien hier, c'était l'hippopotame de la peur pour la croissance qui a dominé l'éléphant dans la pièce, la promesse d'une baisse de taux. Le Nasdaq 100 a rendu 0,4% et le S&P500 environ 0,6%. En Europe, la baisse était assez largement représentée, hormis en Allemagne, en Espagne et en Scandinavie. Mais les replis ont été modestes, voire minimalistes en France (-0,01% pour le CAC40, histoire d'interrompre la série en cours). Dans le même temps, le dollar a touché un plancher de deux mois face aux principales devises, l'or a bondi à 2022 USD l'once et les rendements obligataires ont continué à s'effriter. Tout cela est plutôt cohérent avec un affaiblissement de l'économie américaine et une politique monétaire qui tendrait à s'assouplir, mais on l'aura compris, les investisseurs s'inquiètent depuis hier un peu plus de la fermeté de l'atterrissage économique.

L'actualité du jour est dominée par la visite d'Emmanuel Macron en Chine. Bon c'est un mensonge. Elle est dominée par les déboires judiciaires de Donald Trump, qui a plaidé hier non-coupable de 34 chefs d'accusation en relation avec le versement de pots-de-vin. Post-audience, l'ancien président américain a joué ses cartes préférées sur le procès politique. Certains de ses opposants en viennent presque à regretter la tribune médiatique que lui offre ce procès. Hier, la Finlande est aussi devenue le 31e membre de l'OTAN et le 6e avec une frontière commune avec la Russie (les autres étant la Pologne, la Lituanie, la Lettonie, l'Estonie et les Etats-Unis via le détroit de Béring). Il faut ajouter d'un point de vue plus financier que le volubile Jamie Dimon, patron de JPMorgan Chase, a savonné un peu la planche bancaire en soulignant que les récentes faillites allaient avoir des répercussions pendant plusieurs années. Le secteur a corrigé après cet oracle.  

En Asie Pacifique, les marchés de Chine continentale, de Hong Kong et de Taiwan sont fermés pour un jour férié. Au Japon, le Nikkei 225 clôture en baisse de 1,7% : l'économie japonaise n'aime pas trop les phases de vigueur du yen contre le dollar, qui pénalisent l'export. En revanche, la Corée du Sud et l'Inde gagnent environ 0,6%. L'Australie clôture étale, en baisse de 0,03% du côté de l'ASX200. Les marchés européens sont attendus sur une note hésitante à l'ouverture. Le CAC40 grappillait 0,1% à 7351 points à l'ouverture. 

Les temps forts économiques du jour

Journée consacrée aux indicateurs PMI définitifs dans les services, notamment pour la zone euro (10h00) et les Etats-Unis (15h45). Outre-Atlantique, les investisseurs attendent aussi le rapport ADP sur l'emploi (14h15) et l'ISM des services (16h00). Enfin, à 16h30, place aux stocks de brut du DOE. Tout l'agenda ici.

L'euro poursuit son ascension à 1,0958 USD. L'once d'or fait sauter le verrou des 2000 USD en se négociant 2022 USD. Le pétrole est ferme, avec un Brent de Mer du Nord à 85,31 USD le baril et un brut léger américain WTI à 81,06 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans a reculé à 3,35%. Le bitcoin évolue autour de 28 300 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Acciona : Barclays passe de pondération en ligne surpondérer en visant 233 EUR.
  • Adesso : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 205 à 202 EUR.
  • Aker Solutions : RBC reprend le suivi à surperformance en visant 48 NOK.
  • Alfa Laval : SEB Equities passe de conserver à acheter en visant 430 SEK.
  • Aluflexpack : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 19,50 à 22 CHF.
  • Assa Abloy : Citigroup passe de neutre à vendre en visant 220 SEK.
  • Attendo : SEB Equities passe de conserver à acheter en visant 40 SEK.
  • Basler : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 30 à 26 EUR.
  • BP Plc : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 740 à 710 GBp.
  • Compagnie Financière Richemont : UBS reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 162 à 175 CHF.
  • Construcciones y Auxiliar de Ferrocarriles : Oddo BHF passe de neutre à surperformance en visant 33 EUR.
  • Dassault Aviation : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 185 à 190 EUR
  • Drax : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 800 à 700 GBp.
  • DWS : Citigroup passe de neutre à acheter en visant 33,50 EUR.
  • Friedrich Vorwerk : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 14 à 12 EUR.
  • JCDecaux : Société Générale reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 16 à 19,60 EUR.
  • Just Group : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 120 à 140 GBp.
  • LVMH : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 880 à 920 EUR.
  • Mister Spex : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 4 à 4,20 EUR.
  • Neoen : Morgan Stanley passe de souspondérer à pondération en ligne en visant 32 EUR.
  • Roche : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 350 à 320 CHF.
  • Siemens AG : Société Générale passe de conserver à acheter en visant 185 EUR.
  • Sol S.p.A : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 24,40 à 28,10 EUR.
  • Ströer : Société Générale démarre le suivi à l'achat en visant 65 EUR.
  • Subsea 7 : RBC reprend le suivi à surperformance en visant 161 NOK.
  • Synlab : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 8,20 à 9,30 EUR.
  • Technip Energies : RBC reprend le suivi à performance de marché en visant 24 EUR.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Sodexo : le groupe a publié ses résultats semestriels mais ce qui va surtout intéresser le marché, c'est le projet de scinder et de faire coter en Bourse la division Services Avantages & Récompenses (ce qui me rappelle ce qu'avait fait Accor avec Edenred en son temps).

Annonces importantes (et moins importantes)

  • TotalEnergies et le gouvernement irakien ont trouvé un accord sur le projet GGIP.
  • ISS recommande aux actionnaires d'approuver la rémunération de Carlos Tavares chez Stellantis.
  • ArcelorMittal recevra une aide de 450 M€ pour son usine à hydrogène en Espagne.
  • Gaztransport & Technigaz va concevoir les cuves de trois méthaniers Daewoo.
  • Nexans émet 400 M€ d'obligations avec des contraintes de développement durable.
  • BioMérieux lance le logiciel Biofire Fireworks.
  • Réalités signe un partenariat de co-investissement de 35 M€.
  • Solutions 30 et Community Fibre s'associent pour déployer la fibre à Londres.
  • OGIC signe un contrat de fourniture avec Hoffmann Green Cement.
  • Nexter et SERA Ingénierie (une filiale de Sogeclair) s'allient pour former un champion français de la robotique militaire.
  • AB Science a répondu aux questions posées par l'EMA après l'étape des 120 jours (D120) concernant Masitinib dans la SLA et décale de 30 jours la réponse apportée à Santé Canada (au 12 avril prochain).
  • Delta Drone va regrouper 10 000 actions anciennes pour 1 nouvelle.
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Sidetrade, Eurobio, Forsee Power, Bilendi, Societe Marseillaise du Tunnel Prado-Carenage, Fleury Michon

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Barry Callebaut : les revenus semestriels sont inférieurs aux attentes mais les résultats sont meilleurs que prévu. Contre toute attente, le CEO Peter Boone quitte son poste pour des raisons personnelles et sera remplacé par Peter Feld.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Johnson & Johnson propose de verser 8,9 Mds$ pour mettre un terme au procès géant du talc.
  • L'UE et la Banque d'Angleterre valident l'opération d'UBS sur le Crédit Suisse.
  • Google affirme que son supercalculateur d'IA est plus rapide et plus écologique que celui de Nvidia.
  • Walmart annonce que 65% de ses magasins seront automatisés en 2026, et maintient ses prévisions.
  • Apollo dépose une ultime offre à 240 GBp par action John Wood.
  • L'Italie cherche la parade pour limiter l'influence de la Chine sur Pirelli.
  • MorphoSys veut présenter plus tôt les données sur son médicament prometteur.
  • Ryanair annonce une hausse de 12% du trafic en mars, à 12,6 millions de passagers.
  • 5 000 salariés ont accepté l'offre de départ volontaire de Ford.
  • Amazon supprime 100 employés dans ses divisions jeux vidéo.
  • Kuehne + Nagel ouvre un centre logistique à Dallas au Texas.
  • Holcim s'offre Sivyer Logistics, un spécialiste du recyclage.
  • Vontobel rompt les relations avec les clients domiciliés en Russie.
  • Les principales publications du jour : Conagra, Sodexo, Barry Callebaut, Nordnet, Seadrill, GrenkeTout l'agenda ici.

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