Les opérations sur le capital des PME et ETI cotées n’ont pas attendu la rentrée pour se multiplier.  De nombreuses OPA ont ainsi été annoncées au sortir du confinement :  Groupe Open, Devoteam, Medicrea, Anevia, Amplitude  Surgical, Microwave Vision, Easyvista... Si certaines obéissent à une logique industrielle, la plupart sont à l’initiative des fondateurs/actionnaires historiques qui souhaitent se renforcer au capital.  Un signal sur la valorisation de la classe d’actif et/ou de confiance dans la reprise ?



Matthias Desmarais, comment expliquez-vous la multiplication des opérations financières cet été ?

"L’afflux massif de liquidités liée à l’action de la BCE est certainement le facteur le plus important. Ensuite, on peut constater que les opérations se sont concentrées sur le segment des small et mid qui avait sous-performé jusqu’à la crise alors qu’il a tendance à surperformer sur le long terme. Certains cours de Bourse ont dégringolé faute de liquidité, créant des situations de sous-valorisation par rapport à d’autres acteurs plus liquides au sein d’un même secteur et encore davantage par rapport aux ratios pratiqués dans le non coté."

 Y a-t-il un profil de cible et un schéma type qui ressort de ces opérations ?

"Oui, la plupart des offres publiques concernent des sociétés déjà étroitement liées au capital investissement, comme Amplitude Surgical, ou émanent de fondateurs/dirigeants qui profitent de la déconnexion de la valeur boursière de l’entreprise avec la réalité de l’entreprise, comme ce fut le cas pour Devoteam qui fait l’objet d’une sorte de MBO à 97€, sachant que notre analyste visait 107€ sur le titre. En termes de secteurs, l’essentiel des opérations concerne les valeurs technologiques, les ESN et les éditeurs de logiciels, avec des primes variables, soit classiquement de 30 à 40% quand le cours de Bourse avait fortement souffert (Devoteam, Open…), soit de quelques pourcents quand il avait très bien résisté (Microwave Vision, EasyVista, Envea…). Ces opérations posent la question de la suite de la vie boursière de ces titres, avec soit un retrait de cote soit un problème de liquidité, et du renouvellement de la cote, les introductions en Bourse étant peu nombreuses … "

 Quelles sociétés selon vous feraient de bons candidats à une opération financière ?

"Le sujet du ‘public to private’ n’est pas nouveau et nous avions déjà une liste de candidats avant cette crise sanitaire. Quand je la reprends, je me dis qu’Elior (MBO à répétition), Ipsos (transition managériale), Figeac (consolidation du secteur), Beneteau (faible valorisation, retournement, et évolution de la gouvernance) ou encore Esker feraient de bons candidats."

L’univers des PME et ETI cotées a moins souffert que la plupart des analystes pouvaient le craindre initialement. Le plan de relance, notamment via la baisse des impôts de production, pourrait-il même donner un coup de fouet aux résultats 2021 ?

"Effectivement, dans le cadre du volet "ré-industrialisation" du plan de relance français de 100 milliards d’euros, 40 Md€ sont dévolus à des mesures pro offre dont la moitié sera consacrée à la baisse des impôts de production, une spécificité française que le monde ne nous envie pas. La baisse sera de 20 Md€ : 10 Md€ sur 2021 et 10 Md€ sur 2022. Compte tenu de leur exposition France en termes de foncier comme de valeur ajoutée, les PME et ETI cotée à Paris devraient bénéficier largement de cet allègement, notamment les industriels très implantés en France comme Figeac, Latécoère, Mersen, Nexans. Les sociétés de services en bénéficieront aussi, comme Elior qui a payé sur les 2 dernières années entre 20/25 M€ par an de charges d’impôts liées à la CVAE, soit environ 12/15% de son EBITA."