par Nathan Layne, Sarah N. Lynch et Karen Freifeld

ALEXANDRIA, Virginie, 31 juillet (Reuters) - Le procès de Paul Manafort, ancien directeur de campagne de Donald Trump pour l'élection présidentielle de 2016, poursuivi pour fraude bancaire et fraude fiscale, s'est ouvert mardi devant le tribunal fédéral d'Alexandria, en Virginie.

Ce procès porte uniquement sur des délits et crimes financiers reprochés à Manafort mais il découle de l'enquête menée par le procureur spécial Robert Mueller sur l'ingérence présumée de la Russie dans l'élection présidentielle américaine de 2016.

Paul Manafort, 69 ans, placé en détention provisoire à la mi-juin, a plaidé non coupable pour tous les 18 chefs d'inculpation. Il est notamment soupçonné d'avoir dissimulé sur des comptes à l'étranger des millions de dollars de revenus perçus en tant que conseiller du parti de l'ancien président ukrainien prorusse Viktor Ianoukovitch.

L'accusation cherche à obtenir des informations sur le travail alors fourni par Manafort et espère que cela mettra en évidence des liens entre l'accusé et la Russie.

Le mois dernier, les enquêteurs de Mueller ont révélé que l'ex-directeur de campagne de Trump avait obtenu un prêt de 10 millions de dollars d'Oleg Deripaska, un homme d'affaires proche de Vladimir Poutine.

Paul Manafort a demandé que les détails de ses activités en Ukraine soient tenus en dehors du procès actuel.

Le juge T.S. Ellis se prononcera à ce sujet une fois que le jury sera composé, un processus qui a débuté mardi matin. Au total, douze jurés et quatre suppléants doivent être choisis.

Devant le tribunal d'Alexandria, dans la banlieue de Washington, quelques manifestants ont brandi une effigie de Donald Trump, grandeur nature, et des pancartes où on lisait notamment "C'est l'heure de Mueller".

DÉPENSES SOMPTUAIRES

Pour l'accusation, les dépenses somptuaires de Manafort - maisons, produits de luxe, costumes - ne correspondent pas aux revenus déclarés par l'intéressé, qui est également soupçonné d'avoir trompé des établissements de prêts pour obtenir des dizaines de millions de dollars.

Neuf des 18 chefs d'inculpation visent des faits de fraude bancaire et de conspiration, passibles chacun d'une peine maximale de trente ans de prison. En avril, le juge Ellis n'a pas caché que l'accusé, s'il est reconnu coupable, risquait de passer le reste de son existence derrière les barreaux.

Etant donné l'épaisseur du dossier, certains juristes pensent que Manafort jouera la carte de la grâce présidentielle. Donald Trump a présenté son ancien conseiller comme "un type bien" victime d'une campagne de dénigrement.

Le procès pourrait durer au moins trois semaines.

Le procureur Mueller a remis un dossier de 500 pièces - déclarations de revenus, hypothèques, photos de montres de luxe et de résidences - pour illustrer le train de vie et la fortune de l'accusé.

Trente-cinq témoins devraient être entendus, notamment des banquiers et des experts-comptables. Cinq ont obtenu l'immunité.

L'équipe de Robert Mueller a fait savoir qu'elle n'entendait pas parler du dossier des ingérences russes, préférant probablement attendre un deuxième procès de Manafort qui aura lieu en septembre à Washington, notamment pour blanchiment d'argent et corruption de témoin.

Mardi, une cour d'appel de Washington a rejeté une demande de remise en liberté de Paul Manafort.

En juin 2016, Manafort a participé à une rencontre avec des ressortissants russes qui proposaient des informations embarrassantes pour la candidate démocrate Hillary Clinton, l'un des principaux éléments au coeur de l'enquête menée depuis quatorze mois par le procureur Mueller et que Donald Trump et ses proches présentent comme une véritable "chasse aux sorcières". (Avec Lawrence Hurley; Guy Kerivel pour le service français)