(Actualisé avec nouveaux décomptes et précisions)

par Marco Aquino et Marcelo Rochabrun

LIMA/CHOTA, Perou, 7 juin (Reuters) - Le socialiste Pedro Castillo devance désormais la conservatrice Keiko Fujimori selon les dernières estimations portant sur 94% des suffrages exprimés de l'élection présidentielle de dimanche au Pérou.

Porté par le vote rural, le candidat de gauche est crédité de 50,08% des voix, contre 49,92% pour la fille de l'ancien président péruvien Alberto Fujimori, d'après des données officielles.

La perspective d'une victoire de Pedro Castillo, un instituteur de 51 ans aux origines rurales et syndicaliste qui s'est engagé à remanier la constitution et à s'atteler aux contrats miniers afin de mieux redistribuer les richesses, préoccupait de nombreux investisseurs à Lima, où la Bourse perdait près de 7% vers 18h00 GMT.

Pedro Castillo a promis notamment de renforcer le contrôle public dans les secteurs minier, énergétique et télécoms - en brandissant la menace de nationalisations - ainsi que de relever nettement les taxes sur les bénéfices miniers.

Le résultat serré de l'élection péruvienne, qui illustre le profond fossé entre la capitale Lima et l'arrière-pays rural, qui a favorisé ces derniers mois l'ascension du candidat de gauche, pourrait aboutir à plusieurs jours d'incertitudes voire de tensions.

Lucia Dammert, une universitaire péruvienne basée au Chili, s'attend à d'importantes fluctuations dans les prochains jours, avec de potentielles demandes de recomptage de votes, voire des manifestations dans la rue par les partisans d'un camp ou de l'autre.

Les analystes estiment que le vainqueur, quel qu'il soit, ne disposera que d'une faible marge de manoeuvre au vu des profondes divisions du pays, sans compter que la fragmentation du Parlement - où aucun parti ne dispose de la majorité - pourrait également contrecarrer toute volonté de réformes majeures.

"Celui qui gagne devra dialoguer avec le gouvernement (intérimaire actuel) et d'autres forces politiques. Nous sommes dans un état polarisé", a déclaré le politologue Andres Calderon, installé à Lima.

Keiko Fujimori, âgée de 46 ans, pourrait regagner du terrain avec le dépouillement des votes des Péruviens de l'étranger qui n'auraient pas encore été comptabilisés.

La fille d'Alberto Fujimori (qui dirigea le pays dans les années 90 et purge actuellement une peine de 25 ans de prison pour corruption et crimes contre l'humanité) a appelé les deux parties à "la prudence, au calme et à la paix".

Pour l'instant, les candidats sont restés relativement mesurés dans leurs déclarations.

Pedro Castillo a invité ses partisans à "défendre leur choix", tout en les appelant au calme (Version française Myriam Rivet et Claude Chendjou, édité par Nicolas Delame)