par Joanna Plucinska et Anna Wlodarczak-Semczuk

VARSOVIE, 28 janvier (Reuters) - Le gouvernement polonais a entériné mercredi une décision du Tribunal constitutionnel conduisant à l'interdiction quasi totale de l'avortement, sur fond de virage conservateur de plus en plus ancré dans le pays d'Europe de l'Est à majorité catholique.

La décision du Tribunal constitutionnel, le 22 octobre dernier, d'invalider une disposition autorisant l'interruption volontaire de grossesse (IVG) en cas de malformation du foetus, a provoqué des vagues de manifestations qui ont poussé le parti ultraconservateur au pouvoir Droit et Justice (PiS) à décaler la modification de la loi.

De petits rassemblements ont eu lieu mercredi en fin de journée après que le PiS a annoncé qu'il effectuerait sous peu les démarches officielles pour que les nouvelles restrictions entrent en vigueur. Les défenseurs du droit à l'avortement ont fait savoir que des manifestations supplémentaires auraient lieu jeudi.

La décision du Tribunal constitutionnel a été publiée mercredi soir au Journal officiel.

Depuis 2015 et la prise de pouvoir du PiS en promettant le retour à une société traditionnelle, l'avortement est devenu l'une des principales sources de débats dans le pays.

L'an dernier, les manifestations en faveur du droit à l'avortement s'étaient rapidement transformées en mouvement de contestation anti-gouvernementale, avec une forte colère parmi les jeunes, laissant penser que le PiS pourrait se retrouver en difficulté face aux électeurs dans les prochaines années.

Varsovie va désormais se focaliser sur les aides aux parents d'enfants en situation de handicap, ont dit des représentants, quand bien même le PiS a par le passé été accusé par ses détracteurs de laxisme en la matière.

"L'Etat ne peut plus enlever une vie simplement parce que quelqu'un est malade, handicapé, en mauvaise santé", a dit Bartlomiej Wroblewski, un élu du PiS.

Le parti au pouvoir dément les critiques selon lesquelles il a influencé le Tribunal constitutionnel, l'un des organes concernés par la réforme de la justice engagée par le PiS qui a provoqué l'inquiétude de l'Union européenne.

"Aucun gouvernement respectueux des lois ne devrait tenir compte de cette décision", a déclaré aux journalistes Borys Budka, le chef de file du principal parti d'opposition, Plateforme civique.

Avant même les nouvelles restrictions, l'accès à l'avortement était devenu plus compliqué en Pologne alors qu'un nombre croissant de médecins refusaient de le pratiquer en citant des motifs religieux, poussant de nombreuses femmes à se rendre à l'étranger.

Dans le cadre des nouvelles réglementations, seuls le viol, l'inceste et les risques graves pour la vie ou la santé de la mère pourront justifier une interruption de grossesse. Les médecins contrevenants encourent des peines d'emprisonnement. (version française Jean Terzian)