Washington (awp/afp) - "Il est temps d'agir". Face à la montée des risques menaçant la croissance mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) a exhorté mercredi à prendre des mesures pour affronter la prochaine crise en s'attaquant notamment au problème de l'endettement.

"Il ne faut pas relâcher les efforts", a déclaré Tobias Adrian, directeur du département des marchés monétaires et de capitaux, en présentant le nouveau rapport sur la stabilité financière.

Des propos qui font écho à ceux du secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, qui a appelé les autres pays à agir "résolument" pour doper la croissance mondiale, notamment par le biais du commerce.

Pour le moment, le FMI n'anticipe pas de récession à court terme mais il a abaissé une nouvelle fois ses prévisions de croissance.

Dans de très nombreux pays, l'incertitude politique pèse considérablement sur l'économie, a-t-il résumé, avertissant aussi des conséquences néfastes d'un endettement de plus en plus élevé chez les Etats comme les entreprises.

Les emprunts risqués ont considérablement augmenté. "L'encours des obligations spéculatives a pratiquement doublé aux Etats-Unis et dans la zone euro depuis la crise" financière de 2008, constate le FMI.

La vulnérabilité des entreprises "semble forte dans environ 70% des pays d'importance systémique", avertit M. Adrian.

Solvabilité dégradée

Un ralentissement économique plus prononcé ou des conditions financières nettement moins souples pourraient "peser sur la capacité des entreprises endettées à rembourser leur dette" d'autant que la solvabilité des emprunteurs s'est nettement dégradée, a ajouté de son côté Fabio Natalucci, directeur adjoint du département des marchés monétaires.

Le FMI note en outre que la vulnérabilité financière "reste importante" en Chine où les autorités doivent trouver un équilibre délicat entre trois impératifs: "stimuler la croissance à court terme, faire face aux chocs exogènes négatifs et réduire l'endettement en durcissant la réglementation".

Dans ce contexte, Tobias Adrian recommande de prendre des mesures proactives, telles que limiter le montant des crédits à risque, augmenter les réserves des banques et diminuer la dette des gouvernements en zone euro.

"Les politiques (...) doivent résister à la tentation de revenir sur les réformes" mises en oeuvre après la crise financière pour protéger le système financier, a-t-il également commenté.

Aux Etats-Unis par exemple, la loi Dodd-Frank, mise en place après la crise des crédits immobiliers "subprimes" qui a précipité le monde dans la récession en 2008-2009, avait considérablement renforcé l'encadrement des grandes banques présentant un risque "systémique".

Mais l'administration Trump a encouragé un détricotage de ces mesures, estimant qu'elles entravaient l'activité économique.

Les coussins de capitaux et les tests de résistance d'une quinzaine de grandes banques et institutions financières comme US Bancorp, Capital One, PNC Financial ou encore SunTrust ont ainsi été assouplis.

Incertitude

En Chine, les autorités devraient, quant à elles, poursuivre le "désendettement dans le secteur financier et s'employer davantage à remédier à la vulnérabilité des banques".

Elles doivent également mettre en oeuvre les réformes structurelles nécessaires pour réduire "l'importance accordée aux objectifs de croissance et durcir les contraintes budgétaires pour les entreprises publiques chinoises", estime le FMI.

Tobias Adrian a enfin souligné que l'incertitude politique dans de nombreux pays à l'instar du Royaume-Uni, confronté à sa difficile sortie de l'Union européenne (Brexit), représentait un risque important pour l'économie mondiale.

Ces incertitudes, à des niveaux record depuis deux ans, et de "mauvaises décisions sont à l'origine de difficultés financières" qui fragilisent la stabilité financière, a-t-il commenté.

Le flou entourant par exemple l'issue des négociations commerciales entre les Etats-Unis et la Chine ou la politique monétaire de la Banque centrale américaine (Fed) avait ainsi provoqué fin 2018 d'importantes baisses des marchés financiers.

L'incertitude entourant les nouveaux gouvernements en Italie et au Mexique pèse aussi sur la croissance de ces pays pour lesquels les projections du FMI ont été révisées en baisse.

Partout, le manque de clarté sur les politiques à venir érode la confiance des ménages et décourage les investisseurs, minant un peu plus l'économie mondiale. Résultat: mardi, le FMI a annoncé avoir abaissé à 3,3% (-0,2 point) la croissance mondiale contre 3,6% en 2018.

afp/al