Chômage massif, productivité essoufflée, crise de la natalité,  endettement… Avant même l’apparition de la Covid-19, l’Italie, 3ème puissance économique européenne, éprouvait de grandes difficultés structurelles et des signes de faiblesse persistants. 

Un affaissement graduel de l’économie

En 2019, la croissance du PIB peinait à atteindre 0.2% du PIB et accusait un net ralentissement par rapport à 2018 (+0,8%) et 2017 (+1,7%). Cas unique en Europe : la richesse produite par habitant était, cette année-là, moins élevée de 2% que 19 ans plus tôt, en 2000. Dans le même temps, celle de la France progressait de 13%, et celle de l’Allemagne de 24%. 

Avant la pandémie, le taux de chômage, s’il passait pour la première fois depuis 2013 sous la barre des 10%, se maintenait à 9.8% avec des disparités cruelles pour certaines catégories, dont les jeunes et les femmes. 

Si l’entrée dans l’euro a été douloureuse pour la péninsule, elle ne peut constituer la seule explication de l’affaissement de son économie. Le capitalisme familial par exemple, très prégnant en Italie dans les années 1960, a montré des failles croissantes depuis le passage au nouveau millénaire. L’absence d’encadrement et de règles relatives à la transmission d’entreprises a tué ce modèle : un petit tiers des maisons survivent aujourd’hui à leur fondateur et moins de 13% parviennent à la troisième génération. La mondialisation finit bien souvent par absorber les success-stories restantes.  

En second lieu, les retards en matière de formation et d’éducation de la population active, les réformes du travail dommageables dans les années 1990 et 2000, et les déficits d’investissements en R&D ont contraint la productivité du pays. Enfin, le clivage monstrueux entre les régions du sud et du nord du pays a fini de creuser les écarts entre le pays du soleil et le reste de la zone euro. Selon ODDO BHF, l’Italie a connu 20 trimestres de récession entre 2007 et 2019, soit deux fois plus que ses voisins continentaux. 

2020 : le coup de grâce

En 2020, l’Italie a connu sa pire année de récession depuis la guerre. La chute de la consommation des ménages (autour de 9%) et des exportations (environ 14%) a précipité l’effondrement du PIB, qui devrait s’établir à -8.3% selon les meilleures estimations. De plus sombres projections prévoient un recul compris entre 9,2% et 14%. 

Le taux de chômage, alourdi d’un million de demandeurs d’emploi, devrait atteindre 11 à 12% dans les publications définitives. Le déficit public dépasse les 10% pour une dette établie à 158% du PIB, le deuxième ratio le plus élevé de la zone euro. 

L’arrêt du secteur des services (qui représente 66% du PIB national et emploie 71% de la main d'œuvre), et du tourisme (9% de l’économie) a précipité l’asphyxie du pays. Toujours selon ODDO, la crise sanitaire a fait retomber l’activité économique à son niveau de 1999. 

Le vieillissement de la population (avec l’âge médian le plus élevé d’Europe à 43,1 ans), un solde naturel déficitaire (l’émigration des diplômés n’est plus compensée par l’immigration) et une sévère crise de la natalité pèsent violemment sur la compétitivité du pays et la soutenabilité des finances publiques. Pour enfoncer le clou, l’Italie devrait comptabiliser 700 000 morts en 2020, seuil qui n’avait pas été atteint depuis 1944, en temps de guerre. 

Enfin, la lourdeur de la bureaucratie italienne, qui entrave le versement des aides, et ses difficultés à établir un plan de relance viable sont, selon les observateurs, les éléments qui vont achever le déclin de la péninsule. 

2021 : l’espoir d’un rebond

Dans un monde post-covid, l'Italie misera sur la reprise des exportations et sa solide industrie manufacturière. Elle devrait également pouvoir compter sur la majeure partie du plan de relance européen : elle sera bénéficiaire d’au moins un cinquième des fonds. Au niveau national, le projet de soutien (désormais incarné par le sauveur Mario Draghi) devrait s’accompagner d’investissements massifs et de réformes structurelles profondes, et pousser le rebond du PIB à 6% dans le meilleur des cas (4,1% selon la Commission européenne).