Toute hausse est bonne à prendre pour les marchés actions en ce moment, même quand on peine à trouver son origine. Les places boursières ont progressé hier, parfois modérément comme en Suisse ou au Royaume-Uni, un peu plus vivement en France et en Allemagne et vigoureusement aux Etats-Unis. Les investisseurs font leurs emplettes sur les dossiers qui ont été brassés ces dernières semaines, histoire de ne pas rater le coche si la situation venait à se stabiliser. On a l'impression que c'est à peine s'ils ont écouté le patron de la Fed, Jerome Powell, qui a l'air d'aimer de plus en plus le costume de faucon qu'il a étrenné voilà quelques mois. Jay le volatile, à moins que ce ne soit le volatil Jay, est même allé jusqu'à dire que la banque centrale n'hésitera pas à aller au-delà des niveaux neutres sur les taux si l'inflation restait élevée. Normalement, de telles indications auraient dû provoquer une vague de prudence sur les actions, mais elles ont seulement, et logiquement, fait rebondir le rendement des obligations d'Etat. On peut y voir le signe que les investisseurs en actions commencent à se faire à la nouvelle donne monétaire. Ou simplement qu'ils avaient besoin de respirer un peu.

Car le climat reste assez anxiogène, comme le démontre la dernière enquête mensuelle menée par Bank of America auprès de gérants d'actifs qui ont répondu entre le 6 et le 12 mai (environ 330 professionnels gérant près de 1 000 Mds$). Bon, je dois souligner que cette période, fort récente, avait tout pour accroître encore la déprime des financiers. Le Nasdaq a chuté de 5% sur la seule journée du 5 mai et a enchaîné cinq séances de plus dans le rouge jusqu'au 12 mai. Autant dire que les gérants avaient le moral dans les chaussettes au moment où ils ont retourné le formulaire. Je vous cite pêle-mêle quelques enseignements parce qu'ils offrent un bon panorama des convictions actuelles des professionnels :

  • Les gérants sont de plus en plus nombreux à vouloir que les dirigeants renforcent les bilans et réduisent leurs dépenses d'investissement.
  • Les gérants se détachent du pari le plus embouteillé de la dernière décennie : acheter tout ce qui ressemble à une action technologique. Ils souspondèrent le secteur de 12% actuellement dans leurs allocations, un record depuis 2006.
  • Les gérants n'ont jamais été aussi pessimistes depuis 1994 (date du début des enquêtes de BofA) sur les perspectives de croissance. Ils citent à 77% le terme "stagflation" comme décrivant le mieux leurs anticipations économiques pour les 12 prochains mois.
  • Les gérants avancent comme risque principal du moment la fermeté des banques centrales (31%) devant la récession globale (27%) et l'inflation (18%). Ils mélangent un peu les causes et les conséquences, mais cela illustre aussi le fait que le monde financier et l'économie réelle n'évoluent pas forcément dans la même capsule temporelle.
  • Les gérants surpondèrent largement les défensives (c’est-à-dire les utilités et/ou la santé et/ou la consommation de base), à hauteur de 43%. On était plutôt autour de 50% aux pics d'épouvante de 2020 et de 2011, et à 90% au pic de 2008. Dans les faits, ils sont surtout sur la santé et sur la consommation de base.
  • Les gérants surpondèrent les liquidités, la santé, les matières premières et l'énergie et souspondèrent les obligations, les actions de la zone euro, la consommation discrétionnaire et les actions émergentes. C'est un peu paradoxal parce que les marchés européens ont finalement mieux tenu le choc jusqu'à présent.
  • Les positions les plus consensuelles sont être acheteur du pétrole et vendeur des Treasuries US.
  • Les gérants pensent que le plus gros risque de défaut actuellement sur les marchés est à chercher du côté des technologiques spéculatives.
  • Enfin, les gérants estime que le "Fed Put" se situe à 3529 points sur le S&P500. Le Fed Put est le niveau considéré par les professionnels comme celui où la banque centrale américaine serait forcée de prendre des mesures pro-marchés boursiers pour éviter un cataclysme. Avec un S&P500 à 4088 points au moment où j'écris, le Fed Put est situé 13,7% plus bas (l'indice américain est toutefois descendu à 3858 points la semaine dernière quand les gérants répondaient à l'enquête).

Ça n'avait rien d'une liste à la Prévert et j'espère ne pas vous avoir trop barbé avec ces chiffres, mais ils donnent une bonne idée du niveau de pessimisme ambiant et des comportements qui y sont liés. Un graphique paru ce matin dans un article de Bloomberg montre que le PER moyen des valeurs technologiques mondiales vient tout juste de croiser le PER moyen des valeurs de la consommation de base, c’est-à-dire autour de 20 fois les résultats attendus dans 12 mois. Il y a encore quelques semaines, les technologiques flirtaient plutôt avec la zone des 27/30. Les plus coquins auront noté que les résultats publiés par Walmart hier montrent que la consommation de base n'est pas forcément une bonne idée pour se cacher : le titre a sombré de 11%, du jamais vu depuis 1987, après avoir abaissé ses objectifs sous la pression des hausses de coûts tous azimuts.

Les marchés européens sont attendus autour de l'équilibre avec un léger biais haussier ce matin. En Asie Pacifique, le Japon et l'Australie gagnent entre 0,5 et 1%. En Chine en revanche, les indices reculent alors que les indicateurs économiques sont toujours médiocres et que les doutes sur la politique de confinement systématique continuent. Le CAC40 gagne 0,1% à 6439 points peu après l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

L'indice des prix à la consommation d'avril dans l'UE est attendu à 11h00, avant à 14h30 les chiffres des mises en chantier et des permis de construire d'avril aux Etats-Unis. Tout l'agenda macro ici. Ce matin, le Japon a annoncé une contraction de son PIB au premier trimestre, un ralentissement plus violent que prévu.

L'euro remonte à 1,0532 USD. L'once d'or retombe à 1808 USD. Le pétrole est ferme, avec un Brent de Mer du Nord à 112,34 USD le baril et un brut léger américain WTI à 111,32 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans remonte à 2,96%. Le bitcoin se négocie autour de 30 500 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Ahold Delhaize : J.P. Morgan passe de neutre à surpondérer en visant 32,50 EUR.
  • Barry Callebaut : Baader Helvea passe d'accumuler à alléger en visant 2300 CHF.
  • Crédit Agricole : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 12,30 à 11,50 EUR.
  • Forsee Power : Berenberg passe d'acheter à conserver en visant 4,50 EUR.
  • Groupe LDLC : Kepler Cheuvreux démarre le suivi à l'achat en visant 50 EUR.
  • Hornbach : Kepler Cheuvreux reste à l'achat avec un objectif réduit de 145 à 140 EUR.
  • Inventiva : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 19,50 à 18 EUR.
  • ITM Power : Bernstein démarre le suivi à surperformance.
  • Land Securities : Jefferies passe de sousperformance à conserver en visant 690 GBp.
  • Logitech : UBS passe de neutre à achat en visant 73 CHF.
  • Nel ASA : Bernstein démarre le suivi à surperformance.
  • Rational AG : HSBC passe de conserver à acheter en visant 670 EUR.
  • Reckitt : RBC passe de performance sectorielle à surperformance en visant 7000 GBp.
  • Recordati : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 43,20 à 39 EUR.
  • Repsol : HSBC passe de conserver à acheter en visant 16,70 EUR.
  • Royal Boskalis : AlphaValue passe d'alléger à accumuler en visant 38,90 EUR.
  • Sonova : J.P. Morgan réduit son objectif de cours de 399 à 346 CHF.
  • Vidrala : Exane BNP Paribas passe de neutre à surperformance en visant 83 EUR.
  • Zalando : Baader Helvea passe d'acheter à accumuler en visant 41 EUR.

En France

Publications de résultats :

  • Elior : le groupe anticipe une croissance organique de ses revenus d'au moins 16% en 2021-2022 et un EBITA autour de l'équilibre en données ajustées. Il va sortir de l'industrie "preferred meals" aux Etats-Unis. L'objectif de marge 2023/2024 est revu en baisse.
  • Euronext : la croissance organique a atteint 6% au T1. Les coûts seront moins élevés que prévu cette année.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Frédéric Oudéa, directeur général en poste depuis 2008 à la Société Générale, ne sollicitera pas le renouvellement de son mandat en juin 2023.
  • Un consortium comprenant Alstom a remporté le projet de ligne verte du métro de Tel-Aviv, pour 2,6 Mds€ dont 858 M€ pour le groupe.
  • L'Oréal lance une troisième opération d'actionnariat salarié.
  • Stellantis voit l'Inde comme un marché de croissance rentable pour l'automobile.
  • Bouygues émet 2 Mds€ d'obligations.
  • Air France-KLM et CMA CGM s'allient dans le fret aérien, avec une entrée du groupe de transport maritime au capital de la compagnie aérienne.
  • L'état du parc nucléaire d'Electricité de France continue à inquiéter.
  • La réorganisation ratée d'Atos a coûté 300 M€, selon La Lettre A.
  • Valeo boucle son programme de rachat d'actions.
  • Elis place 300 M€ d'obligations sous programme EMTN.
  • Nouveau tirage sur la ligne d'OCEANE-BSA dilutive de Pharnext.
  • Boostheat prolonge sa ligne de financement dilutive avec Iris Capital.
  • ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Publications de résultats :

  • Aviva : le groupe s'estime en bonne voie pour atteindre ses objectifs.
  • Burberry : Les résultats sont en hausse, mais la situation en Chine est préoccupante.
  • Mitchells & Butlers : le propriétaire de pubs prévient que la hausse des coûts va peser.

Annonces importantes (et autres)

Lectures