PARIS (Reuters) - Transports perturbés, production d'électricité en forte baisse, raffineries au ralenti ou encore écoles fermées, la neuvième journée de mobilisation contre la réforme des retraites à l'appel de l'intersyndicale apparaissait de nouveau très suivie jeudi en France malgré l'adoption du texte et au lendemain de l'intervention télévisée du président Emmanuel Macron.

Aux habituels modes de contestation, les syndicats ajoutent les opérations coup de poing, comme sur les périphériques de Toulouse et Lyon, où la circulation a été bloquée par des manifestants et des feux de palettes, à la gare Saint-Charles de Marseille, où le trafic était interrompu en milieu de matinée, ou encore aux abords de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, que des voyageurs ont dû rallier à pieds, selon des témoignages diffusés sur les réseaux sociaux.

Un porte-parole d'Aéroports de Paris (ADP) a indiqué à Reuters que l'accès au Terminal 1 était perturbé, mais assuré que le programme de vols n'était pas affecté.

Alors qu'Emmanuel Macron a dit mercredi vouloir renouer le "dialogue" avec les partenaires sociaux, son inflexibilité sur l'application de la réforme des retraites, en particulier le recul de l'âge légal de départ de 62 à 64 ans, a été vilipendée par l'opposition et les syndicats, déjà remontés par le recours à l'article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le projet de loi sans vote.

"Ça a augmenté la colère (...) et sans doute, ça a augmenté la détermination pour des mobilisations aujourd'hui", a déclaré Laurent Berger, secrétaire général du syndicat CFDT, jeudi matin sur BFMTV. "(Emmanuel Macron) n'a pas parlé aux salariés, il y a eu zéro réponse aux problèmes du pays."

De nombreuses manifestations sont prévues ce jeudi dans toute la France pour maintenir la pression sur le gouvernement. A Paris, le cortège parisien s'élancera de la place de la Bastille à 14h00 (13h00 GMT).

RÉQUISITIONS

Dans la capitale, 5.000 policiers et gendarmes sont déployés sur un total de 12.000 en France, pour faire face notamment aux rassemblements "sauvages", dont plusieurs ont été émaillés de violences ces derniers jours.

Le gouvernement entend aussi faire preuve de fermeté face aux grévistes. Après la réquisition d'éboueurs à Paris, où des milliers de tonnes d'ordures continuent de s'entasser sur les trottoirs, et d'employés du dépôt de carburant de Fos-sur-Mer, près de Marseille, un arrêté de réquisition a également été pris - mais pas encore notifié - pour le personnel de la raffinerie de TotalEnergies à Gonfreville (Normandie), la plus grande du pays, a-t-on appris de source au ministère de la Transition énergétique.

Le gouvernement est "serein et attentif à ce qui se passe aujourd'hui", a assuré le ministre du Travail, Olivier Dussopt, jeudi matin sur RTL.

"Il y a un désaccord qui va persister (avec les syndicats)sur l'âge de départ à la retraite. Par contre il y a des sujets nombreux qui permettent de renouer un dialogue", a assuré le ministre, qui a porté la réforme des retraites au Parlement. "Les choses se font progressivement et doivent se faire progressivement."

Interrogé sur cette main tendue de l'exécutif, Laurent Berger a répondu que la CFDT, syndicat réformateur dont le gouvernement espérait à l'origine qu'il soutiendrait sa réforme des retraites, irait "discuter", mais après un "délai de décence" et en posant ses conditions.

Le projet de loi, adopté de facto au Parlement après le rejet des deux motions de censure contre l'exécutif, est désormais dans les mains du Conseil constitutionnel qui doit le valider avant que le président de la République ne puisse le promulguer.

(Rédigé par Blandine Hénault et Tangi Salaün, avec la contribution de Dominique Vidalon, Forrest Crellin et Bertrand Boucey, édité par Blandine Hénault)