Zurich (awp) - Suisse tourisme a tiré un premier bilan qualifié "d'encourageant" pour la saison estivale, mais des difficultés apparaissent à l'horizon. Alors que les touristes venus de l'étranger restent moins nombreux qu'avant la pandémie, la branche peut moins s'appuyer sur le tourisme national, les Suisses se montrant plus enclins à voyager hors des frontières, explique jeudi Martin Nydegger, directeur général de Suisse Tourisme.

L'organisme de promotion de la Suisse comme destination touristique entrevoit de premier signaux d'alerte pour la branche, qui ne devrait plus connaître les mêmes records de fréquentation des hôtes locaux qu'au cours des deux dernières années. "Les records de touristes suisses enregistrés pendant la pandémie sont révolus", a déclaré en conférence de presse M. Nydegger. La concurrence des destinations étrangères se fait fortement sentir.

Sur les six premiers mois de l'année, les nuitées hôtelières se sont inscrites en hausse de 3,5% par rapport à 2019 à 19,5 millions, portées par une saison d'hiver très positive. Les hôtes suisses ont totalisé 10 millions de nuitées (+16,8%), tandis que ceux venus de l'étranger ont inscrit 9,4 millions de nuitées (-8%). Ils restent ainsi majoritaires, alors qu'avant la pandémie, la part des helvètes dans les nuitées n'était que de 45%. "Il serait irréaliste de croire que la part actuellement très élevée d'hôtes suisses reste au même niveau, même si nous espérons des effets d'entraînement", a souligné M. Nydegger.

Sensibilité aux prix

La forte présence de certains touristes étrangers, notamment en provenance des Etats-Unis (+22% à 1,4 million de nuitées), n'a pas permis de compenser le manque de visiteurs venus de pays lointains, pour lesquels les nuitées sont inférieures de 10% à leur niveau de 2019. "Nous avons perdus les voyages en groupe, segment beaucoup plus sensible aux prix", a expliqué Corinne Genoud, membre de la direction de Suisse Tourisme, revenant sur des nuitées toujours inférieures de pas loin d'un tiers à leur niveau de 2019.

Du côté de la Chine, les premiers voyages individuels et en petits groupes ont repris. "Nous avons retrouvé environ 60% des capacités aériennes pour le trafic entre la Suisse et la Chine", a expliqué Mme Genoud. La situation économique et des difficultés administratives pour de nombreux Chinois, dont le passeport a expiré pendant la pandémie, freinent également un plus fort rebond. "Avec un délai de 3 à 4 semaines pour l'obtention des visas, nous avons toutefois sur ce point retrouvé la normalité", a précisé la responsable.

L'important marché allemand, d'où provient un voyageur sur cinq en Suisse, n'a quant à lui généré que 1,8 million de nuitées, soit 5% de moins qu'au premier semestre 2019 (-6% pour l'ensemble de l'Europe). La force du franc pour une clientèle qui a toujours été très sensible aux prix et la perte de pouvoir d'achat de la classe moyenne dans un contexte d'inflation sont des éléments d'explication, selon Mme Genoud.

Revanche des villes

La répartition des touristes suisses par rapport à ceux venus de l'étranger n'est pas le seul changement durable enclenché par la pandémie. En effet, le tourisme urbain a lui aussi un nouveau profil. La part de la clientèle loisirs dans les nuitées des hôtels à Zurich est ainsi passée de 25% en 2013 à 50% cette année. Les grandes villes ont enregistré 5,9 millions de nuitées au premier semestre, un chiffre en hausse de 4,7% par rapport à 2019.

Enfin, les premières données pour l'été 2023 laisse augurer une performance honorable, avec des nuitées attendues en hausse de 3,2% sur un an, portées par la clientèle étrangère (+13,5%), alors que les touristes suisses ont été moins nombreux (-6,5%), selon les statistiques provisoires de l'Office fédéral de la statistique (OFS).

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