Le contexte : les petites valeurs n’ont pas échappé à la correction

« Le rebond vigoureux des marchés actions au mois de juillet (plus forte hausse depuis novembre 2020 et l'annonce du vaccin contre le Covid) a été alimenté par un recul des taux longs par rapport aux points hauts de l’année, d’une part, et par le ton très positif des sociétés qui publient leurs résultats semestriels, d’autre part. Les carnets de commandes atteignent des niveaux historiques, puisque les difficultés d’approvisionnement persistent, ralentissant leur transformation en ventes, tandis que la discipline de répercussion des prix transparaît dans les niveaux de marge publiés sur ce semestre. Les secteurs technologiques et cycliques (notamment industriels et automobile) rebondissent le plus, tandis que les secteurs défensifs marquent le pas. Les valeurs exposées au dollars américain profitent également de la faiblesse de l’Euro ». Ce commentaire de la Financière Arbevel résume très bien la situation actuelle.

Dans ce contexte, les petites valeurs, françaises et européennes, ont rebondi à l’unisson avec les grandes, se ressaisissant d’environ 8%. Depuis le début de l’année 2022 jusqu’à la mi-août, le repli est de l’ordre de +-10% pour les indices de petites valeurs françaises, mais de près de 20% pour les microcaps européennes (ex. MSCI EMU Small Cap à -19% fin juillet).

Évolution, dividendes capitalisés, des indices actions français par taille de capitalisation depuis le 1er janvier 2022 (au 12/8/22)

Sur 5 ans, retraité des dividendes versés, les grandes capitalisations françaises (indice CAC LARGE 60 TRG) battent encore les indices de petites (CAC SMALL TRG) et moyennes (CAC MID 60 TRG) valeurs. Il faut remonter, comme le montre le graphique ci-dessous, à 6 ans d’historique pour retrouver la surperformance historique des petites valeurs sur les grandes. 

Évolution, dividendes inclus, des indices actions par taille de capitalisation depuis mi 2016. 

Compte tenu de la bonne tenue des résultats et des projections 2022, les ratios de valorisation des PME cotées restent attractifs que ce soit par rapport aux grandes valeurs ou par rapport au non coté. Selon le cabinet d’analystes spécialisé Idmidcaps, « les valorisations entre le coté et le non coté ne cessent de s’éloigner avec un écart de près de 40% en 2022 (VE/EBITDA 10,6x selon Indice Argos vs 6,5x pour les Smidcaps cotées selon IDM) »

Ratios de valorisation médians (Source : Portzamparc BNP Paribas - au 10/08/2022)

Concernant l’évolution des encours des fonds liés à la collecte/décollecte, les données AMF collectées par la société de Bourse Portzamparc indiquent encore une légère décollecte sur le mois dernier.

Revue des meilleurs fonds Small Caps à la fin du mois dernier

(Source : Quantalys, rapport mensuel des sociétés de gestion)

Le contexte étant dressé, venons-en aux mouvements de nos fonds vedette à travers notre tableau synthétique.

De façon générale, nous remarquons que :

- La performance moyenne des fonds de la sélection en 2022 (-15%) se situe entre celle des indices de petites valeurs européennes et des indices de petites valeurs françaises. 

- Nombreux sont les fonds à avoir profité de l’OPA de Sopra Steria sur l’ESN CS Communication & Systèmes (prime de 80%).

- Les taux d’investissement ressortent stables dans l’ensemble.  

De façon plus particulière, nous notons que :

- Le fonds Gay-Lussac Microcaps a été agréablement surpris par la résilience opérationnelle de certaines de ses positions malgré un contexte macroéconomique défavorable. Le fonds renforce Clinica Baviera « qui a livré de bons résultats semestriels, affichant une croissance de 18,7% malgré des effets de base peu évidents. L’entreprise a également réussi à maintenir sa marge opérationnelle en dépit de quelques difficultés en Allemagne. Nous continuons de penser que le marché sous-estime le fort levier opérationnel dont dispose Clinica Baviera. Nous avons continué la construction de notre ligne Bilendi, qui continue de gagner des parts de marché en Europe. Lors de la conférence des résultats semestriels, le PDG Marc Bidou a rassuré les investisseurs sur la capacité de Bilendi à faire passer les hausses de prix rapidement afin de protéger la marge opérationnelle du groupe. Enfin, nous avons profité de la trop forte correction à la suite de la distribution du dividende pour nous renforcer en Samse. L’entreprise a également publié de bons résultats qui n’ont pas fait réagir le cours de l’action pour autant. Côté vendeur, nous avons continué d’écrêter notre ligne Piteco à la suite d’une offre publique d’achat de la famille Podini. Conformément à notre politique ESG, la notation du groupe s’étant détérioré, nous avons été contraints de céder une partie de notre ligne LNA Santé. Le titre continue de souffrir d’un newsflow négatif sur le secteur causé par l’affaire Orpea. Nous préférons donc nous en détacher. Enfin, en ligne avec nos anticipations de ralentissement économique dans le courant du deuxième semestre, nous avons réduit notre participation dans la société Marr, le spécialiste italien du commerce en gros de produits alimentaires frais et surgelés pour les restaurateurs.

- Le gérant d’Amplegest PME se réjouit des publications de ses entreprises en portefeuille. « Trigano est la seule vraie déception mais si la croissance s’est révélée inférieure à nos attentes c’est uniquement parce que la production ne parvient pas suivre la demande en raison notamment d’une pénurie de châssis. Le secteur technologique (1ère victime de de-rating consécutif à la hausse des primes de risques) s’est distingué avec des performances particulièrement solides. Sidetrade, Ateme, Esker, Infotel et Lectra ne ressentent pas les effets de la crise à ce stade. La santé se révèle comme à son habitude résiliente. Les comptes de Virbac et Equasens n’ont pas déçu. En revanche, Guerbet ne parvient pas à transférer totalement les hausses de coûts car elle opère sur un marché réglementé. Bien entendu, le secteur de l’énergie a le vent en poupe. GTT profite de l’engouement pour le GNL et LFDE des hausses de prix de vente. Porté par la réallocation du budget des ménages vers les loisirs et notamment le tourisme, Voyageurs du Monde a relevé ses objectifs annuels. La société a également annoncé deux acquisitions stratégiques dont une qui va lui ouvrir le marché US » commente le fonds qui a effectué quelques petits mouvements : renfort de Fountaine Pajot, Frontier et Worldline vs. allègement de Ubisoft, Bilendi et Focus Home. 

- Lazard Investiment Microcaps « n’a que partiellement participé au rebond du marché et termine le mois en hausse de 3,2%. Cette performance trouve pour l’essentiel son origine dans les résultats semestriels de très bonne qualité publiés par des valeurs telles qu’Atoss Software (+27%) Wavestone (+16%), PVA Tepla (+16%), Somero (+11%) ou encore Cembre (+9%). A l’inverse, Harvia a vu son cours chuter de 23% après avoir fait part d’une dégradation de son activité au deuxième trimestre, sur une base de comparaison particulièrement élevée. Le fonds a renforcé Dr. Hönle et allégé plusieurs positions au cours du mois parmi lesquelles Wavestone, Cembre, Clasquin, Novabase et Flowtech.

- Pluvalca Initiatives PME progresse de 7,5% sur juillet grâce au projet de rachat de Communication & Systèmes par Sopra Steria (80% de prime) et aux bonnes publications de valeurs cycliques (Lisi, Mersen, Groupe Gorgé). « Les sociétés IT/ESN continuent d’enchainer les excellentes publications trimestrielles (Sword, Infotel) tandis que les groupes technologiques/croissance ont contribué positivement à la performance du fonds (Esker, Lumibird, SES-Imagotag). A l’inverse, les valeurs de consommation (Omer-Decugis, Graines Voltz) ont pesé sur la performance. Malgré de solides résultats semestriels, Vallourec a souffert. Enfin, la publication des revenus du deuxième trimestre de Wallix a de nouveau été une déception. Le fonds a initié deux nouvelles lignes sur le mois de juillet : Compagnie des Alpes (exposition tourisme, bons niveaux de marge et valorisation raisonnable) et Groupe SFPI (point d’entrée, faible niveau de valorisation et belle exécution opérationnelle). Nous avons renforcé notre exposition en TFF, Lumibird et SES-Imagotag. Les lignes en Wallix, Sidetrade (valorisation) et Derichebourg ont été vendues ».

- MCA Entreprendre a été fortement pénalisé (-0.7% en juillet) par la forte baisse de sa première position, Biocorp qui lui a couté 3.25 points de performance. « Le titre a fortement corrigé après plusieurs mois de hausse. Celle-ci peux s’expliquer par la pénurie des composants qui pourrait remettre en cause les 50 000 livraisons prévues pour 2022. Mais les partenariats avec les grands groupes pharmaceutiques, nous paraissent sur le long terme de très bons signaux, la patience est de mise. C’est aussi le message de la direction du groupe : ‘le business va plutôt bien, l’activité avance comme prévu’ » rapportent les gérants du fonds qui ont par ailleurs profité des baisses ces dernières semaines pour entrer ou revenir sur des dossiers de qualité « dont la baisse nous paraît excessive ». Le fonds a initié 4 nouveaux titres : Nacon via la distribution de Bigben, Eduform’action un spécialiste de la formation, Visiomed dans la e-santé. Il a participé à l’IPO de la société bretonne Charwood Energy, un spécialiste de la production de biogaz par pyrogazéification. En contrepartie, les gérants ont profité du rebond pour alléger leurs positions en Aurea, Damartex, Hopium, Hopscotch Groupe, Maurel, Réalites. Enfin, ils ont cédé leurs petites lignes en Boa concept et Capelli.

Pour terminer, voici quelques informations complémentaires sur la dizaine de fonds de petites valeurs sélectionnés :

(Source : Quantalys, rapport mensuel des sociétés de gestion)

Les fonds ont été sélectionnés selon leur performance sur longue période (nous avons retenu une durée de 5 ans, durée généralement retenue pour l’investissement dans les fonds actions) et leur forte pondération en valeurs françaises capitalisant moins d’un milliard d’euros (minimum 20% du fonds).

On y remarque que le style de gestion « croissance » ou « growth » domine largement la sélection et que le nombre de titres en portefeuille varie facilement du simple (40 valeurs) au double (80 valeurs). 

Glossaire : les styles de gestion

  • Le style de Gestion « Croissance » ou « Growth » s’intéresse aux valeurs de croissance. Ces valeurs sont choisies pour leur fort potentiel de développement, en mettant au second plan leur valorisation boursière au regard du chiffre d’affaires et des résultats actuellement réalisés. Ces sociétés sont en effet souvent populaires et chères car leurs perspectives sont élevées et leur valorisation anticipe une poursuite de la croissance des bénéfices. Les plus belles valeurs de croissance, généralement positionnées sur des secteurs porteurs, sauront croitre par-delà les cycles et prendre régulièrement des parts de marché par croissance organique ou externe. En général, les valeurs de croissance distribuent 
    moins de dividendes que la moyenne car elles ont besoin de réinvestir leurs bénéfices pour financer leur développement.
    • Secteurs surreprésentés actuellement : la technologie, la santé, les énergies renouvelables, le luxe.
    • Ex. de valeur de croissance actuellement : Virbac, Voltalia, Esker, Pharmagest …Typiquement, leur PER dépasse les 20 voire 50x. 
  • Le style de Gestion « Valeur » ou « Value » s’intéresse aux valeurs décotées, mal valorisées, et souvent mal-aimées. Les gérants se focalisent alors sur les chiffres publiés, plus rassurants que des prévisionnels incertains par nature, et sur la valeur des actifs au bilan (notion de valeur intrinsèque). Mais comment évaluer au plus juste la valeur réelle d’une entreprise ? La question est importante car il faut ici écarter les sociétés sous-évaluées amenées à le rester faute de résultats convaincants (notion de value trap). Dans le style de gestion value, les entreprises génèrent souvent des flux de trésorerie significatifs leur permettant de verser un dividende conséquent.
    • Secteurs surreprésentés : les valeurs cycliques, l’automobile, les bancaires, la construction, les télécoms.
    • Ex. de valeur actuellement : Orpéa (ex-valeur de croissance), Quadient, Hexaôm, Herige, ALD, NRJ Group … Typiquement, leur PER est inférieur à 10x. 
  • Le style de Gestion « GARP » ou Growth At Reasonable Price ou Croissance à prix raisonnable, cherche à trouver un juste milieu entre les deux, à dénicher des valeurs de croissance certes, mais pas à n’importe quel prix.
    • Ex. de valeur : Ipsos, Lumibird, Beneteau  … Typiquement, leur PER se situe entre 10x et 20x.

Finissons par une citation de Warren Buffet : « Mieux vaut acheter une entreprise extraordinaire à un prix ordinaire qu’une entreprise ordinaire à un prix extraordinaire. »