Pour enrayer la chute spectaculaire de WeWork, dont la valorisation est tombée de 47 milliards de dollars en janvier à 8 milliards désormais, SoftBank, qui contrôlait déjà environ un tiers du capital via des investissements successifs d'un montant total de 10,6 milliards de dollars, va devoir trouver les moyens de rendre rentable une entreprise au modèle contesté et dont les pertes massives ne cessent de se creuser.

Alors que les employés de WeWork sont menacés de milliers de suppressions de postes, Adam Neumann a pour sa part conclu un accord à 685 millions de dollars avec SoftBank pour se retirer du conseil d'administration de The We Company, la maison mère de WeWork, ont dit des personnes informées de cet arrangement.

Le cofondateur de WeWork, dont la gestion et le style personnel sont parfois jugés responsables de l'échec du projet d'introduction en Bourse de WeWork le mois dernier, faisait face à des appels de marge sur ses emprunts personnels garantis par des titres WeWork en raison de l'effondrement de la valorisation de l'entreprise.

SoftBank a accepté de lui prêter 500 millions de dollars pour rembourser un crédit souscrit auprès de JPMorgan Chase et de lui verser 185 millions d'honoraires pour une mission de consultant pendant quatre ans, a dit l'une des sources.

L'ACCORD AVEC NEUMANN CRITIQUÉ

Adam Neumann, qui possède un peu plus d'un cinquième du capital de WeWork, pourra en outre céder un maximum de 970 millions de dollars d'actions à SoftBank dans le cadre de l'offre que prévoit de soumettre le groupe japonais aux actionnaires existants.

Même écarté du conseil d'administration, Adam Neumann va y conserver deux représentants, selon une source.

"Cet arrangement pour en faire un consultant défie l'entendement. C'est terrible en termes de gouvernance", juge Nell Minow, vice-présidente du cabinet de conseil aux actionnaires ValueEdge Advisors. "Pourquoi payer un type qui a mis WeWork dans cette pagaille pour qu'il donne des conseils. C'est remuer le couteau dans la plaie et même aggraver la plaie."

Certains investisseurs défendent néanmoins cet accord, comme Matt Novak, associé gérant chez All Blue Capital, actionnaire de WeWork, selon lequel "Adam est un visionnaire ayant créé une entreprise qui a transformé la manière dont de nombreuses personnes travaillent, vivent et réfléchissent". "Il a mérité de récupérer de l'argent pour sa contribution à l'entreprise", a-t-il dit.

SoftBank, dont la proposition a été préférée à celle de JPMorgan, va fournir à WeWork une enveloppe de crédit de 5 milliards de dollars. Il va aussi accélérer un achat de titres qu'il s'était engagé à réaliser auprès de WeWork pour un montant de 1,5 milliard de dollars sous la forme de "warrants" expirant en avril. Le groupe japonais va enfin lancer d'ici la fin de l'année une offre auprès des investisseurs actuels et des employés de WeWork portant sur 3 milliards de dollars d'actions.

A l'issue de ces opérations, SoftBank contrôlera 80% de WeWork.

(Jessica DiNapoli, Greg Roumeliotis et Joshua Franklin à New York, Anirban Sen à Bangalore et Jane Lee à San Francisco; Bertrand Boucey pour le service français, édité par Jean-Michel Bélot)

par Anirban Sen, Jessica DiNapoli et Jane Lanhee Lee

Valeurs citées dans l'article : SoftBank Group Corp., JPMorgan Chase & Co.