Une plongée dans mes emails les plus récents montre que plusieurs bureaux d'études ont commencé à revoir en baisse leurs objectifs de cours sur l'immobilier et le BTP français au sens large. Goldman Sachs et UBS, pas plus tard que ce matin. Le mouvement est visible à la fois sur les fabricants de matériaux (Saint-Gobain, Imerys, LafargeHolcim, Vicat…), sur les promoteurs (Icade, Altarea, Nexity…), sur les foncières (Gecina, Klépierre…) et sur les contractants (Vinci, Eiffage…). Cette perception négative procède à la fois d'un contexte économique moins favorable que ce que prévoyaient les spécialistes en début d'année (fin de l'euphorie Macron) et des événements récents. Derrière la crise des gilets jaunes, il y a la petite et la grande histoire. La grande histoire, c'est un mal-être sociétal qui va entraîner une réponse politique majeure et en tout cas plus sociale. La petite histoire, ce sont des clignotants moins fondamentaux mais dont les conséquences sont prévisibles. A priori, on peut imaginer que le contexte actuel va peser sur le marché de la construction avec des investisseurs moins offensifs et des financiers plus frileux. Et que les recettes de fin d'année des concessionnaires autoroutiers seront amputées. J'ai dû payer le péage une fois sur deux depuis le milieu du mois de novembre. Evidemment, je suis loin d'être le seul dans ce cas en France. Ainsi retrouve-t-on Vinci et Eiffage à la convergence de la grande et de la petite histoire.
 
Superdry complètement rincé
 
L'intuition d'une année 2018 compliquée s'étend aussi à l'habillement. Ce n'est pas un scoop, les enseignes physiques qui n'ont pas le prolongement numérique adéquat sont en déconfiture à cause de la mutation profonde induite par internet. C'est la grande histoire. Pour ne rien arranger et pour la petite histoire, l'automne a été très chaud. Le britannique Superdry a prévenu dès le 15 octobre que les températures anormalement clémentes en Europe continentale, au Royaume-Uni ou sur la Côte Est des Etats-Unis avaient plombé ses ventes de manteaux et de blousons, elles qui pèsent 45% des revenus annuels. Ce matin, le groupe a prévenu que ses résultats 2018 seront amputés de moitié à cause de la poursuite des conditions météorologiques inhabituelles. Auparavant, les températures avaient déjà sonné le glas des prévisions du géant allemand de la vente en ligne Zalando. Et l'on peut ajouter aux victimes Inditex ce matin (la maison-mère de Zara). En France, la petite et la grande histoire se télescopent aussi dans le secteur : des dizaines de milliers de commerçants ont vu leurs ventes être contrariées par le mouvement des gilets jaunes. A Paris, certains ont totalement perdu quatre samedis de ventes. Si une accélération est probable ce weekend et le suivant, elle ne suffira pas à combler le retard accumulé. Si l'on pousse le raisonnement un peu plus loin, les foncières commerciales, qui sont à la croisée des chemins entre la consommation et l'immobilier, risquent aussi de souffrir. Mais sans doute pas dès les résultats 2018, puisque les baux leur apportent une relative sécurité.
 
Voilà donc des secteurs à placer dans vos listes de surveillance pour la fin de l'année.