Leurs activités bien sûr. Business as usual, dirait l’autre. 

Si le PDG du groupe français, Patrick Pouyanné, a condamné l’attaque russe sur son voisin, et assuré ne pas investir dans de nouveaux projets en Russie, la major a confirmé le maintien de sa présence dans le pays. Parce que les intérêts sont trop grands, principalement dans le gaz. En Russie, TotalEnergies est actif dans l’exploration et la production pétrolière, le raffinage, les énergies renouvelables, le gaz et l'électricité, le trading et le transport d’énergie. Elle dit compter 208 salariés sur place.  

Le groupe est actionnaire à 19.4% du géant du gaz russe Novatek. 5% de sa production de pétrole et entre 17 et 30% de sa production annuelle de gaz proviendraient de cette unité.Et la Russie hébergerait, à elle-seule, un quart des réserves en hydrocarbures du groupe français. 

La major française a aussi investi lourdement dans plusieurs projets de gaz naturel liquéfié, dont Artic LNG2 (21.64%), Yamal LNG (20%), un vaste projet gazier au nord du pays, et ZAO Terneftegas (49%), un opérateur de champ gazier. Un abandon de ces projets serait trop coûteux. Par ailleurs, le géant est habitué à naviguer en eaux troubles et à préserver ses intérêts dans des situations inextricables, puisqu’il n’a jamais quitté le Yémen ni l’Irak, et entame à peine son retrait de Birmanie. 

Pour Chevron, la situation est un peu différente. L’américain n'a pas d’activité d’exploration ou de production pétrolière en Russie. Il détient une participation de 15% dans le Caspian Pipeline Consortium (CPC), qu’il présente comme une voie d’exportation majeure du pétrole qu’il produit au Kazakhstan. Il résume son travail en Russie en l'octroi de licences de technologies de raffinage et de produits de consommation.

Il dispose en outre d’un écosystème commercial riche : il fournit des additifs pour lubrifiants et des technologies de pointe à des compagnies pétrolières russes via ses filiales Chevron Oronite et Chevron Lummus Global LLC. Il commercialise également des lubrifiants, des liquides de refroidissement et des traitements de carburant pour un usage grand public et industriel. Avec sa coentreprise Advanced Refining Technologies, la major vend des catalyseurs d'hydrotraitement et des assistances techniques à l'industrie du raffinage.

Combien de temps les deux groupes pourront-ils camper sur leur décision ? Hier, Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine, suggérait de nationaliser les actifs des entreprises étrangères qui ont quitté le territoire depuis le début du conflit. Une annonce qui ne devrait pas précipiter le départ des deux majors. 

 

Illustration d'Amandine Victor