On prête souvent aux grands argentiers de la planète d’avoir la sagesse nécessaire pour appréhender au mieux les soubresauts de l’économie mondiale et son impact sur les marchés financiers. A y regarder de plus près, les investisseurs font parfois preuve d’une grande naïveté. Pourtant prévenus, cela ne les a pas empêcher de se réveiller jeudi dernier avec la gueule de bois. Les marchés actions plongeaient sur crainte d’une récession dans la foulée de la détente enregistrée sur les marchés obligataires. Le dollar se prenait une petite beigne (voir à ce propos notre graphique illustrant la corrélation entre les mouvements enregistrés sur le dollar et le rendement du 10 ans américain) tandis que le pétrole reculait également car qui dit crainte d’une récession dit mécaniquement moindre demande pour le brut. Même l’or, valeur refuge par excellence faisait les frais de la résurgence des craintes d’une récession. Vous noterez à ce propos que lors des mouvements paniques, les actifs tendent à se corréler - à la baisse – mettant à mal les stratégies de diversification prônées dans la littérature. On se consolidera tout de même en se disant que pour une fois, les bonds font leur job de refuge vers la qualité (pour rappel, les bonds évoluent à l’inverse des rendements).
Et maintenant ?
Comme précisé par le Secrétaire au Trésor, Scott Bessent, les niveaux de droits de douane correspondent à des seuils plafonds, autrement dit ils ont vocation à être diminués sous réserve des futurs pourparlers avec les partenaires commerciaux des États-Unis. Par ailleurs, les importateurs pourraient être tentés de prendre à leur charge tout ou partie de l’augmentation des droits de douane, limitant ainsi la hausse des prix pour le consommateur américain. Car c’est bien lui le maillon faible de la chaine alors qu’il représente près de 9% de l’économie mondiale. Pour le moment, les indicateurs de sentiment attestent du scepticisme ambiant mais si le moral flanche, la consommation tient le choc tout comme le marché de l’emploi. Il faudrait une nette dégradation de ce dernier pour cristalliser réellement les risques d’une récession. Or, la dernière enquête sur les créations d’emplois a fait état de 228 000 créations en mars contre 140 000 attendues. Le taux de chômage est ressorti à 4.2% contre 4.1% le mois précédent. En l’état actuel, les craintes paraissent disproportionnées en regard des récentes statistiques macroéconomiques. Il ne faudrait toutefois pas que le vent tourne trop vite d’autant que la Chine a déjà lancé les hostilités. On gardera toutefois la tête froide en se rappelant les objectifs de la politique de Trump : repositionner le commerce mondial au bénéfice des États-Unis (tout en conservant le dollar comme monnaie d’échange), stimuler la production intérieure et faire baisser les taux pour refinancer la dette abyssale. Au vue des craintes exprimées, la Fed pourrait d’ailleurs être inspirée de baisser ses taux plus tôt que prévu.
Techniquement, le 10 ans américain a dépassé sa cible à 4.06/3.97% et se dirige vers les 3.71/3.36%. La tendance reste donc baissière sous les 4.10%. En parallèle, le 10 ans allemand vient de réintégrer son support à 2.62% avec une prochaine cible à 2.25%.