* Le PDG d'Orange parle d'"échanges de vues" avec l'opérateur italien

* Pas de négociations en cours, selon les deux groupes

* Telecom Italia à un pic de 4 ans à la Bourse de Milan (Actualisé avec nouvelles source, commentaires de D. Telekom, cours de Bourse)

par Leila Abboud et Pamela Barbaglia et Sophie Sassard

MILAN, 2 mars (Reuters) - Telecom Italia a atteint un pic de quatre ans lundi à la Bourse de Milan en réaction aux déclarations du PDG d'Orange sur l'intérêt d'un éventuel rapprochement.

Stéphane Richard a fait état dans le Journal du dimanche d'"échanges de vues" avec les dirigeants du groupe italien mais "pas de négociations", ajoutant que "cela pourrait être une belle opportunité de consolidation européenne".

Telecom Italia a démenti que des discussions étaient en cours et, notent des spécialistes du secteur, un rapprochement entre les deux ex-monopoles prendrait du temps et requerrait le soutien politique de l'Italie et de la France.

Le titre Telecom Italia a fini en hausse de 1,31% à 1,08 euro à la Bourse de Milan après avoir atteint 1,11 euro en tout début de séance, un gain de plus de 3% et un plus haut depuis quatre ans. A Paris, Orange a abandonné 0,25% à 16,26 euros.

Ces cours correspondent à des capitalisations boursières d'environ 20 milliards d'euros pour Telecom Italia et de 43 milliards pour Orange, l'ex-France Telecom.

Les fusions-acquisitions se sont enchaînées ces deux dernières années dans le secteur européen des télécommunications, dont les acteurs cherchent à sortir de leurs activités jugées non stratégiques, à regrouper les services de téléphonie fixe et mobile et à limiter leurs coûts.

Mais jusqu'à présent, aucun grosse opération transfrontalière entre poids lourds du marché n'a eu lieu, alors que les autorités européennes seraient sans doute favorables çà l'émergence de champions régionaux capables de réaliser les investissements jugés nécessaires pour développer les réseaux haut débit.

Les dirigeants du secteur soulignent depuis longtemps que si des synergies importantes peuvent être dégagées grâce à des consolidations au niveau national, elles sont beaucoup moins évidentes pour les opérations transfrontalières, qui ne permettent pas de réaliser des économies par le biais du regroupement de services et d'activités commerciales.

SORTIR DU BRÉSIL AVANT UN RAPPROCHEMENT EN EUROPE ?

Dans une interview à Reuters avant le Mobile World Congress, qui rassemble à Barcelone les acteurs du secteur cette semaine, le directeur financier d'Orange, Ramon Fernandez, l'a reconnu.

"Cette phase de consolidation n'est pas terminée", a-t-il déclaré. "Les marchés nationaux vont encore être rationalisés, puis se posera la question de savoir s'il y aura des opérations transfrontalières ou non. Mais avant cela, reste à voir s'il y a vraiment de la valeur à créer par ce type d'opérations."

Le président du directoire de Deutsche Telekom, Timotheus Höttges, a dit de son côté s'attendre à une vague de consolidation en Europe mais il a ajouté que son groupe avait exclu de grosses acquisitions, préférant des opérations ciblées.

Telecom Italia, lourdement endetté mais qui dégage de fortes marges bénéficiaires sur son marché domestique où le groupe ne rencontre aucune concurrence dans le câble, pourrait être une cible pour un acheteur, estiment des banquiers.

Le groupe italien contrôle en outre le brésilien Tim Participacoes, également considéré comme une cible. Certains banquiers estiment que Telecom Italia serait plus attractif pour un opérateur européen s'il se désengageait du Brésil et s'il utilisait le produit de la vente pour réduire sa dette.

"Les commentaires de Richard sont une façon intelligente de tester le marché sur une idée avec laquelle il flirte mais qu'il n'a pas poussée plus loin à ce stade", a dit une source bancaire proche d'Orange.

Une source bancaire proche de Telecom Italia a exclu toute grosse opération dans l'immédiat. "Ce n'est pas envisageable avant au moins deux ans car Telecom Italia doit d'abord trouver une solution au Brésil et stabiliser sa base actionnariale", a-t-elle dit.

L'actionnariat de l'ex-monopole est en pleine évolution avec le désengagement en cours de Generali, Intesa et Mediobanca, jusque-là les actionnaires de contrôle aux côtés de l'opérateur espagnol Telefonica.

Le français Vivendi va devenir le premier actionnaire du groupe italien en héritant de 8% des droits de vote une fois que sera finalisée la vente de sa filiale brésilienne GVT à Telefonica.

La source proche d'Orange a dit s'attendre à ce que Vivendi recherche un repreneur pour ses parts dans Telecom Italia, mais sans précipitation et à un bon prix.

Compte tenu de la participation de 25% de l'Etat français dans Orange, toute opération devrait obtenir le feu vert du gouvernement. En Italie, l'Etat n'est pas actionnaire de Telecom Italia mais bénéficie d'un droit de regard sur les actifs jugés "stratégiques", dont font partie les réseaux de télécommunications.

Les analystes de BESI Research se sont montrés sceptiques lundi quant aux avantages d'un tel rapprochement dans la mesure où il n'y a pas de synergies possibles entre les deux groupes.

"Des cadres réglementaires différents et surtout des dynamiques de marché différentes rendraient un rapprochement entre Orange et TI assez inefficace selon nous", écrivent-ils. (Marc Angrand et Juliette Rouillon pour le service français, édité par Véronique Tison)