Laurent P., le collègue qui me fait face au bureau, est un être perfide. Pendant la séance d'hier, il s'est amusé à se moquer de mon titre de la veille sur la disparition de la volatilité, en égrenant les valeurs européennes qui partaient dans tous les sens. Et il est vrai que les marchés actions ont gagné en nervosité, même si certains d'entre eux ont poursuivi leur évolution dans des bornes étroites, comme le CAC40 français (+0,14%) ou le FTSE britannique (+0,05%). Aux Etats-Unis, les indices ont hésité mais ils ont fini par lâcher prise en fin de séance. La baisse a atteint 0,6% sur le S&P500 et 0,78% sur le Nasdaq 100.

Du coup, on est effectivement sur des variations plus conséquentes et Laurent va encore pouvoir me chambrer ce matin. La glissade du pétrole a plombé l'énergie pendant que les valeurs financières et immobilières souffraient du retour des craintes sur les banques régionales, dont les résultats ne sont vraiment pas brillants. Il faut ajouter à cela quelques accidents de parcours majeurs. Le grand opérateur télécom AT&T a chuté de 10% après avoir annoncé des résultats décevants, qui font tâche sur ce type de dossier généralement prévisible. 10% de baisse, c'est aussi le tarif pour Tesla, pris en grippe par le marché pour avoir clairement choisi les volumes aux dépens des marges. La guerre des prix enclenchée par le Californien a pesé sur la totalité du secteur hier, avec de lourdes pertes en Europe et aux Etats-Unis, notamment du côté de Stellantis, Renault ou Continental.

Le tableau global est, lui, à peu près inchangé en attendant la semaine prochaine la publication des résultats de plusieurs stars de la cote, d'Airbus à Verizon en passant par Nestlé, Coca-Cola, Alphabet, Microsoft, Roche ou Amazon. Les investisseurs s'attendent à ce que la Fed relève ses taux d'un quart de point le 3 mai, puis qu'elle fasse une pause. Si la situation économique venait à se dégrader trop dangereusement aux Etats-Unis, ils espèrent même que la banque centrale fera machine arrière dans les mois à venir. Le jeu du chat et de la souris entre déclarations des banquiers centraux, intentions réelles des banquiers centraux et interprétation des marchés n'est pas prêt de se terminer.

Le tout saupoudré de statistiques macroéconomiques, avec des chiffres médiocres hier en provenance du marché de l'emploi et de celui de l'immobilier ancien aux Etats-Unis, qui ont ajouté à la prudence des investisseurs hier. Aujourd'hui, ce sont les indicateurs d'activité PMI des grandes économies pour l'industrie et les services qui vont focaliser l'attention. Ils prennent le pouls de l'optimisme ou du pessimisme des directeurs d'achats d'entreprises et constituent donc un bon marqueur de l'activité économique. Les données les plus attendues sont celles de la zone euro (10h00) et des Etats-Unis (15h45). La fournée de mars avait montré une poursuite de la contraction dans l'industrie, alors que les services restaient robustes. De mauvais chiffres aux Etats-Unis pourraient renforcer la conviction du marché sur une inflexion de la politique monétaire de la Fed… tout en augmentant les craintes de récession. Bien malin celui qui pourra dire laquelle des deux approches prendra le pas sur l'autre. Ceci dit il pourrait aussi y avoir de bonnes surprises, qui ajouteraient à la confusion.

Mais on est quand même vendredi, et à défaut d'être bleu, le vendredi, je m'emploie à essayer de vous faire rire ou à répondre à des questions existentielles sur la Finance. Par exemple aujourd'hui : quelle est l’entreprise cotée en bourse qui a le nom le plus long ? J'ai préféré ça à "cette entreprise va faire 3000% cette année", que je garde pour plus tard. Quand je tombe sur un nom d'entreprise original ou long, j'ai tendance à le noter, ça peut toujours servir à vous faire sourire, surtout si je dois le prononcer ensuite pour le podcast. Par exemple, PotlatchDeltic Corporation est une entreprise américaine qui possède et exploite des forêts aux Etats-Unis, dont j'avais noté récemment le nom. Mais à ce jour, ma star reste Samhällsbyggnadsbolaget, qui est un opérateur suédois de logements sociaux. Tellement compliqué que ses dirigeants eux-mêmes l'appelle SBB. Si vous avez mieux que ces 23 lettres en un seul mot, n'hésitez pas à vous manifester.

L'actualité sérieuse est dominée par les résultats trimestriels de sociétés ce matin. EssilorLuxottica, SAP, Mercedes et Holcim ont déjà annoncé leurs chiffres. Il y en a beaucoup d'autres, jusqu'à Procter & Gamble à la mi-journée aux Etats-Unis. Dans le volet géopolitique, les ministres de la Défense et les hauts responsables militaires de plusieurs pays se réunissent ce matin à Ramstein, en Allemagne, pour discuter de la poursuite du soutien à l'Ukraine dans la guerre contre la Russie. Le président ukrainien a appelé hier ses alliés à lui permettre d'entamer le processus d'adhésion à l'OTAN. Pendant ce temps, le Wall Street Journal révèle que des hackers prorusses se sont attaqués à Eurocontrol, le système de contrôle aérien européen. A Washington, des rumeurs circulent sur de nouvelles mesures de l'administration Biden pour limiter les investissements américains en Chine.

Troisième vendredi du mois oblige, c'est la séance de compensation sur les marchés, connue sous le nom de "trois sorcières". L'arrivée à expiration de plusieurs classes d'options crée des moments de volatilité durant la séance. En Asie Pacifique, les principaux marchés sont orientés en baisse modérée pour terminer la semaine. Le Nikkei 225 cède 0,4% à Tokyo, autant que l'ASX 200 à Sydney. Les baisses sont plus prononcées en Chine, à Hong Kong et en Corée du Sud, puisqu'elles avoisinent 1%. L'Inde tient le choc en limitant son repli à 0,1%. Les indicateurs avancés européens évoluent autour de l'équilibre.

Les temps forts économiques du jour

Il y aura une pleine livraison d'indices d'activités PMI avancés pour toutes les grandes économies, avec un vedettes la zone euro (10h00) et les Etats-Unis (15h45). Tout l'agenda ici.

L'euro est ferme à 1,0965 USD. L'once d'or remonte à 2002 USD. Le pétrole se stabilise, avec un Brent de Mer du Nord à 80,96 USD le baril et un brut léger américain WTI à 77,28 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans baisse à 3,53%. Le bitcoin évolue à 28 800 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Adyen : CICC démarre le suivi à surperformance en visant 1770 EUR.
  • BNP Paribas : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 83 à 89 EUR.
  • Comet : UBS reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 280 à 276 CHF.
  • Crédit Agricole : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 11 à 12,50 EUR.
  • Eiffage : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 112 à 115 EUR.
  • EssilorLuxottica : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 165 à 175 EUR.
  • Gensight : Chardan passe d'acheter à neutre.
  • IMI : HSBC passe de conserver à acheter en visant 1960 GBp.
  • Nokia : Inderes passe d'accumuler à acheter en visant 4,80 EUR.
  • Orange : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 10,40 à 11,40 EUR.
  • Sampo : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 52 à 51 EUR.
  • Tryg : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 190 à 195 DKK.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Bureau Veritas : vise une croissance organique modérée de ses revenus.
  • EssilorLuxottica : les revenus du T1 sont plus élevés que prévu.
  • Fnac Darty : confirme ses objectifs après un chiffre d'affaires stable au T1.
  • Gaztransport & Technigaz : les objectifs sont confirmés après un T1 en hausse de 17,2%.
  • Gecina : l'objectif de résultat net récurrent par action 2023 confirmé entre 5,80 et 5,90 EUR.
  • Ipsos : l'activité se contracte au T1 mais les objectifs sont confirmés.

Annonces importantes (et moins importantes)

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Holcim : relève ses prévisions pour l'ensemble de l'année après un premier trimestre supérieur aux prévisions.
  • Mercedes : publie des résultats préliminaires supérieurs aux attentes au T1.
  • Salvatore Ferragamo : chiffre d'affaires en baisse au premier trimestre.
  • SAP : les résultats annuels devraient être un peu plus élevés que prévu.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • L'action AT&T s'est effondrée de 10% hier à Wall Street, sa plus forte baisse depuis 2000, après de mauvais chiffres trimestriels.
  • Après avoir déclenché une guerre des prix, Tesla relève le tarif de certains modèles aux Etats-Unis.
  • Les négociations avec Lufthansa sont "très avancées" concernant ITA Airways, selon Rome.
  • Henkel vend son activité russe pour 600 M€.
  • Italia ratificaría la reforma del fondo de rescate de la UE como 'instrumento de crecimiento'.
  • El presidente de Chile, Gabriel Boric anuncia un plan para nacionalizar la industria del litio en Chile.
  • Petrofac se asegura una prórroga de 12 meses a sus líneas bancarias de 252 millones de dólares.
  • El G7 estudia la prohibición casi total de las exportaciones a Rusia.
  • FirstGroup et le fonds d'infrastructure I Squared envisagent des offres concurrentes pour des parties de l'activité de transport international de la Deutsche Bahn, Arriva.
  • Credit Suisse fait face à un procès de 160 M$ sur la vente de prêts hypothécaires à risque.
  • Eni commence le forage du puits Raia-1 au large du Mozambique.
  • Sony Interactive Entertainment rachète Firewalk Studios à ProbablyMonsters.
  • IMCD acquiert le distributeur suédois de minéraux et de produits chimiques ACM.
  • Les principales publications du jour : Procter, BHP Group, SAP, Schlumberger, Investor AB, Holcim, Sandvik, Geberit, Teleperformance, BachemTout l'agenda ici.

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