PARIS/LONDRES (Reuters) - A l'instar de ses rivaux européens Shell et BP, Total fait face à l'occasion de son assemblée générale de vendredi à la pression croissante de certains actionnaires lui demandant de prendre des engagements plus précis et contraignants en matière de lutte contre le changement climatique.

Le groupe pétrolier français, qui va en outre se renommer TotalEnergies à l'issue de son AG pour refléter sa diversification dans l'électricité et les renouvelables, propose à ses actionnaires d'exprimer un avis consultatif sur sa stratégie de transition vers la neutralité carbone d'ici à 2050 et sur ses objectifs en la matière à horizon 2030.

Plusieurs d'entre eux, bien que très minoritaires et n'ayant que peu de chances de rallier suffisamment de suffrages pour obtenir gain de cause, ont annoncé qu'ils s'opposeraient à la résolution sur le sujet ou qu'ils s'abstiendraient.

Les français Meeschaert Asset Management (AM), OFI, Ircantec, La Française et Sycomore prévoient un vote négatif, de même que le néerlandais Actiam, tandis que Crédit Mutuel AM et les Assurance du Crédit Mutuel figurent parmi les abstentionnistes.

Emmenés par Meeschaert AM, le fonds de pension néerlandais MN et le britannique Federated Hermes, 34 investisseurs de la coalition Climate Action 100 + - qui réunit des investisseurs gérant collectivement 54.000 milliards de dollars - ont en outre publié une déclaration saluant les efforts de Total tout en l'appelant à prendre de nouveaux engagements.

Si Total s'est fixé des objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre à moyen et long terme au niveau mondial, qui intègrent désormais celles des produits énergétiques vendus par le groupe, il prévoit d'augmenter sa production de gaz d'ici à 2030 et d'investir dans de nouveaux projets, dont certains sont vivement contestés par des associations de défense de l'environnement, notamment en Afrique de l'est et en Arctique.

"LE RAPPORT DE L'AIE EST UNE ÉTAPE HISTORIQUE"

Certains investisseurs demandent désormais au groupe de suivre la recommandation d'un récent rapport de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), selon lequel il est nécessaire de renoncer dès maintenant à tout nouveau projet d'exploration pétrolière ou gazière pour espérer atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050 et limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré.

Parmi les premiers actionnaires de Total, Amundi et le fonds souverain norvégien (Norges Bank Investment Management) ont cependant indiqué qu'ils voteraient en faveur de la résolution approuvant la stratégie du groupe en matière de climat.

Total n'a pas souhaité faire de commentaires sur les déclarations d'intentions de vote en amont de son AG.

En 2020, l'assemblée générale avait rejeté à 83,20% une résolution qui proposait de modifier les statuts de Total pour l'engager davantage dans la transition énergétique.

Shell et BP ont eux aussi été confrontés à une pression accrue lors de leurs récentes AG, des actionnaires leur reprochant de ne pas aligner suffisamment leur activité sur la transition vers une économie à faible émission de carbone, comme prévu dans l'Accord de Paris de 2015 sur le climat.

Chez Exxon Mobil Corp, un fonds spéculatif a en outre renversé cette semaine au moins deux membres du conseil d'administration afin de contraindre les dirigeants de l'entreprise à en faire plus contre le changement climatique.

(Édité par Nicolas Delame et Blandine Hénault)

par Simon Jessop et Benjamin Mallet