1) Que faut-il retenir de la réunion de la Fed ?

La réunion de la Fed marque un changement important. Jerome Powell a clairement mis en avant le risque inflationniste. On sent désormais une certaine urgence de la Réserve fédérale à tempérer la hausse des prix. Par rapport au dernier communiqué de décembre, la Fed évoque des " hausses régulières des taux ". Elle ouvre la porte à quatre hausses des taux, voire plus, cette année pour un total d'au minimum 100 points de base. En tout état de cause, la banque centrale devrait relever ses taux au cours de ses trois prochaines réunions, soit en mars, en mai et en juin. Ensuite, elle s'offrirait une petite pause pour analyser l'impact du resserrement monétaire sur l'inflation. Je n'envisage pas en revanche une hausse de 50 points de base dès le mois de mars. Cela pourrait être mal interprété par les investisseurs et donner un sentiment d'urgence face à une situation qu'elle ne contrôlerait pas.

L'autre raison pour laquelle je ne crois pas à une hausse de 50 points de base en mars est que Jerome Powell s'est dit satisfait des conditions financières actuelles avec notamment la nette remontée de la courbe des taux d'intérêt.

La Réserve fédérale a par ailleurs insisté sur un autre point : l'économie n'est pas dans la même situation que lors du précédent cycle de resserrement monétaire. La croissance a atteint son potentiel, l'inflation est très élevée et les salaires sont orientés à la hausse. Aussi, elle n'attendra pas deux ans entre la première hausse des taux et le début de la réduction de son bilan mais plutôt entre trois et six mois.

Jusqu'en décembre dernier, la maximisation de l'emploi était l'objectif principal de Jerome Powell, désormais, c'est l'inflation. Certes, la hausse des prix va ralentir dans les prochains mois mais l'inflation sous-jacente, de 4%, est trop éloignée de son objectif (légèrement supérieur à 2%) et la hausse salariale est significative.

2) La BCE empruntera-t-elle le même chemin que la Fed jeudi prochain ?

En Europe, la situation est différente. La BCE devrait maintenir sa politique monétaire très accommodante encore un certain temps. Contrairement aux Etats-Unis, l'Europe n'a pas rattrapé son niveau de croissance pré-pandémie. L'Europe n'est pas au même niveau de son cycle économique. Par ailleurs, les conditions monétaires se dont déjà un peu resserrées indirectement via la Fed.

3) Comment expliquez-vous le regain de volatilité des marchés ?

La réaction des marchés, qui avaient déjà bien anticipé le durcissement de ton la Fed, est compréhensible. Les investisseurs s'étaient habitués aux injections de liquidités des banques centrales, aux taux d'intérêt réels négatifs et à une inflation basse. Le regain de volatilité actuel ne fait que refléter le changement de paradigme auquel nous sommes en train d'assister et les investisseurs rééquilibrent leurs portefeuilles face à cette nouvelle donne.

Propos recueillis par Pierre-Jean Lepagnot