Le juge chargé de l'affaire pénale américaine contre le géant chinois des télécoms Huawei a exprimé, lors d'une audience, ses inquiétudes quant au décret présidentiel de Donald Trump retirant les habilitations de sécurité aux avocats du cabinet Jenner & Block, estimant que cette mesure pourrait constituer un obstacle à la défense de la société dans ce dossier.

La juge fédérale Ann Donnelly, du district de Brooklyn, a interrogé les procureurs sur le statut de David Bitkower, avocat chez Jenner, lors de l'audience de mercredi, soulignant qu'une habilitation de sécurité serait indispensable pour l'équipe de défense.

La magistrate a demandé aux deux parties quelles mesures elles prenaient pour résoudre ce problème.

« C'est une question qui touche au droit à un avocat, c'est aussi un enjeu pour la tenue du procès, » a déclaré la juge Donnelly. « Nous avons un procès prévu en janvier, et s'il faut faire habiliter des personnes, cela pose problème. »

Un représentant du ministère de la Justice a indiqué que le gouvernement s'efforcerait de faciliter l'obtention d'une habilitation de sécurité pour un autre membre de l'équipe de défense de Huawei.

Plus tard dans la journée de mercredi, un avocat représentant Jenner dans son action en justice à Washington, D.C., visant à annuler le décret de Trump, a précisé que l'habilitation de l'un des avocats du cabinet avait été suspendue, sans toutefois révéler son nom.

Jenner fait partie des quatre cabinets juridiques ciblés par les décrets présidentiels de Donald Trump, en raison de liens supposés avec des avocats ou des affaires jugées incompatibles avec les priorités de son administration. Les trois autres cabinets sont WilmerHale, Perkins Coie et Susman Godfrey.

Un juge de Washington doit bientôt se prononcer sur la plainte de Jenner, qui demande la suspension définitive du décret présidentiel à son encontre.

Les documents déposés par Jenner et les échanges lors de l'audience dans l'affaire Huawei illustrent l'impact persistant des décrets de Trump contre des cabinets d'avocats majeurs, même si, jusqu'à présent, la justice a plutôt donné raison à ces cabinets dans les procédures engagées contre ces mesures.

Huawei et Jenner ont refusé de commenter. David Bitkower n'a pas répondu aux sollicitations. D'autres avocats représentant Huawei, notamment chez Sidley Austin et Steptoe, n'ont pas non plus réagi dans l'immédiat.

Le bureau du procureur fédéral du district Est de New York, à Brooklyn, n'a pas répondu immédiatement à une demande de commentaire.

Jenner et David Bitkower, ancien haut procureur fédéral désormais à la tête du département enquêtes et défense du cabinet, assurent la défense de Huawei contre des accusations de racket et de vol de secrets commerciaux déposées par le ministère de la Justice dans un acte d'accusation remplaçant en 2020.

Huawei a rejeté ces accusations, affirmant que le gouvernement traitait l'entreprise « comme une cible à poursuivre, en quête d'un crime ».

Les décrets de Trump visant Jenner, WilmerHale, Perkins Coie et Susman Godfrey visaient à suspendre les habilitations de sécurité des avocats de ces cabinets, à restreindre leur accès aux responsables gouvernementaux et à annuler les contrats fédéraux détenus par leurs clients.

Dans un document judiciaire daté du 8 avril, Jenner affirme que le décret de Trump « suspend l'ensemble des habilitations de sécurité de Jenner, y compris celles nécessaires à la représentation de clients dans leurs dossiers les plus sensibles ».

WilmerHale a indiqué dans un document judiciaire cette semaine que les habilitations de deux de ses avocats avaient été suspendues après l'application du décret présidentiel. Le cabinet n'a pas révélé l'identité des avocats concernés.