Washington (awp/afp) - La fermeture des services administratifs américains, qui dure depuis un mois, commence à ébranler l'économie américaine, notamment le moral des consommateurs, moteur traditionnel de la croissance.

La confiance des ménages est soudainement tombée au plus bas depuis l'élection de Donald Trump vendredi, selon le baromètre mensuel de l'Université du Michigan. L'optimisme des consommateurs a chuté de 7,6 points, du jamais vu depuis fin 2012, pour s'établir à 90,7 points, au plus bas depuis l'élection de novembre 2016.

Les Américains ont moins de certitudes sur la vigueur de l'activité économique en 2019 alors que 800.000 d'entre eux sont contraints au chômage forcé ou doivent travailler sans être payés à cause du bras de fer budgétaire entre les démocrates au Congrès et la Maison Blanche sur le financement d'un mur anti-immigration à la frontière avec le Mexique.

Le "shutdown", qui a commencé le 22 décembre, touche directement 0,5% des travailleurs américains mais il commence à affecter indirectement le moral de plus de la moitié des consommateurs, a souligné l'enquête de l'Université du Michigan.

Normalement, si l'impasse se résout, ces fonctionnaires devraient être rémunérés rétroactivement mais ce n'est pas le cas de tous les services privatisés ou sous-traitants des établissements publics qui, eux, devront faire une croix sur le manque à gagner.

A mesure que la paralysie se prolonge, les économistes relèvent quasiment chaque jour leurs prévisions d'impact sur la croissance.

En début de semaine, le cercle des économistes de la Maison Blanche a doublé son évaluation des conséquences du "shutdown" estimant qu'après un mois, la fermeture du gouvernement allait ôter un demi-point de pourcentage à la croissance du 1er trimestre.

Vendredi, c'est un haut responsable de la Banque centrale qui a alourdi les perspectives. John Williams, président de la Fed de New York, a estimé que l'expansion des trois premiers mois de l'année pourrait perdre un point entier de pourcentage si le "shutdown" se poursuit.

Rebond espéré

"Cela va directement peser sur les dépenses de consommation et l'économie au 1er trimestre, suffisamment pour réduire la croissance d'un demi-point de pourcentage, peut-être même d'un point si cela continue", a-t-il affirmé à l'issue d'un discours dans le New Jersey.

M. Williams a toutefois ajouté que généralement quand le "shutdown" se termine "les gens sont payés et on voit un rebond" de la croissance.

La querelle autour du mur frontalier s'ajoute à trois autres facteurs qui tour à tour ont obscurci un peu plus l'horizon d'une économie pourtant en bonne santé, comme l'a aussi montré le récent Livre Beige, dernière enquête de conjoncture de la Fed.

Les tarifs douaniers qui perdurent entre Washington et Pékin, l'hyper-volatilité des marchés financiers qui a fait perdre presque 10% à la Bourse depuis octobre, et le manque de clarté de la communication de la Fed sur sa politique monétaire ont aussi douché l'optimisme des acteurs financiers.

A cause du ralentissement de l'économie mondiale notamment et des incertitudes liées au commerce, la Fed a pour l'instant projeté une croissance de 2,3% pour l'ensemble de 2019, ce qui représente un net affaiblissement par rapport aux 3% prévus pour l'ensemble de 2018.

Il est trop tôt pour avoir des projections précises sur l'expansion du 1er trimestre.

Les fondamentaux économiques restent bons, soulignent néanmoins de nombreux experts, même si on manque d'informations officielles.

De nombreux indicateurs, notamment sur l'état du marché immobilier, les ventes au détail ou la balance commerciale, n'ont pas pu paraître à cause de la paralysie administrative.

"Certains diront sans doute que cette enquête (sur la confiance des consommateurs) signale une récession imminente", a commenté vendredi Gregory Daco, d'Oxford Economics. Mais il note que si "la croissance des dépenses va ralentir en 2019, la vigueur du marché du travail, la progression des salaires et la baisse des prix de l'essence à la pompe (...) continuent de soutenir la dynamique".

"L'économie est solide, les perspectives sont saines et ma priorité numéro un est d'user de la politique monétaire pour que cela le reste", a rassuré pour sa part le patron de la Fed de New York.

afp/rp