Si le CAC40 français est parvenu à maintenir des gains minimalistes pour s'offrir une sixième séance consécutive de hausse, la plupart des autres places ont piqué du nez hier. En particulier aux Etats-Unis où les trois indices ont rendu plus de 1%. Tous les secteurs ont été affectés par ce mouvement, entraînant des baisses de -1,56% pour le S&P500, de -1,81% pour le Dow Jones et de -1,27% pour le Nasdaq. En parallèle, il y a eu une ruée sur les obligations, un placement qui, généralement, est perçu comme beaucoup plus sûr que les actions. Mais qu'est-ce qui a bien pu freiner des investisseurs chaud-bouillants depuis le début de l'année ?

Eh bien toute une série de statistiques bien frelatées aux Etats-Unis. Sur le mois de décembre, les ventes de détail se sont contractées plus fort que prévu et la production industrielle aussi. C'est le signe que l'économie ralentit, en l'occurrence un peu plus vite que ce qu'envisageaient les prévisionnistes. Et là vous allez me dire : en quoi c'est négatif puisque ça fait des semaines qu'il nous rabâche que "une mauvaise nouvelle économique est une bonne nouvelle pour les marchés actions parce que c'est ce qui va finir par forcer la Fed à cesser ses hausses de taux et que les financiers sont obnubilés par le retour à des conditions monétaires plus favorables". C'est vrai, mais jusqu'à un certain point. Et là je vais devoir sortir ma principale arme : mon doctorat en psychologie de comptoir, option Ricard (j'ai fait mes études dans le Sud).

Imaginez que vous êtes dans un marché haussier et que les premières mauvaises nouvelles commencent à tomber (genre fin 2021) :

  • Au début tout le monde s'en fout.
  • Quand les mauvaises nouvelles s'accumulent, ça commence à tiquer. Mais tout le monde s'en fout.
  • Il y a vraiment beaucoup de mauvaises nouvelles : les paris les plus risqués s'évaporent. Les excès commencent à être gommés. Pour reprendre une image chère à Warren Buffett, les gens qui se baignent à poil ont de l'eau jusqu'au nombril et plus jusqu'aux épaules.
  • Tout le monde se tourne vers la banque centrale (américaine, ça fait toujours plus cossu). Mais elle faisait la sieste, donc elle doit surréagir et entamer un processus non-investor-friendly.
  • Là vient la phase "on va tous y passer". Panique. Les gens qui se baignent à poil ont de l'eau jusqu'au pubis. Ils agitent les bras en direction de leurs potes restés sur la plage, pour qu'ils leur envoient un maillot.
  • La phase de baisse s'installe. L'armée de nudistes est maintenant clairement exposée et c'est pas toujours beau à voir. Beaucoup renoncent et deviennent consultants.
  • Les bonnes nouvelles deviennent des mauvaises nouvelles parce que ça force la banque centrale à rester méchante pour les marchés actions, c’est-à-dire à pratiquer une politique de taux anti-business, pour faire disparaître les excès.
  • Les mauvaises nouvelles prennent le pas sur les bonnes nouvelles. C'est une bonne nouvelle pour les marchés actions, parce que ça signifie que la banque centrale va devoir se calmer un peu et que le moment où les taux vont se stabiliser, puis baisser, se rapproche. Les plateformes de cryptomonnaies, qui étaient allongées dans l'eau pour cacher leurs parties intimes, profitent d'une légère remontée de la marée. Cathie Wood renvoie son maillot de bain à ses potes restés sur la plage.
  • Attention, on arrive à notre psychologie de comptoir du moment : les mauvaises nouvelles sont peut-être quand même des mauvaises nouvelles, parce qu'elle pourraient créer des déséquilibres profonds et aboutir à des situations encore plus problématiques : récession marquée, voire le gros mot ultime : la stagflation, c’est-à-dire une situation où l'économie et la banque centrale sont engluées dans une dynamique de croissance atone avec des évolutions de prix toujours excessives.

Pour synthétiser tout ça, les investisseurs ont bien profité d'un début d'année tout feu, tout flamme, mais ils ne sont pas bien sûrs de la solidité de leurs convictions. Les membres de la Fed qui ont parlé hier ont continué à marteler leur discours de fermeté sur la nécessité de continuer à relever les taux, mais leur auditoire était manifestement clairsemé. Les rendements obligataires américains ont joué une autre musique : la rémunération de la dette à 10 ans a chuté à 3,33%, signe que ce marché ne croit plus trop au discours de la banque centrale, tout en continuant à penser qu'une récession est imminente. Deux autres membres importants de la Fed doivent s'exprimer aujourd'hui : Lael Brainard et John Williams. Auront-ils plus d'écho que leurs homologues ? Pas sûr, puisque les investisseurs ont l'air de s'être forgé leur propre opinion, au risque de violer l'adage consistant à dire qu'il ne faut jamais aller contre la banque centrale américaine.

Dans le reste de l'actualité du jour, le forum économique de Davos continue avec Christine Lagarde, la patronne de la BCE, parmi les guest-stars. La première ministre néozélandaise Jacinda Ardern a démissionné avant les élections prévues en octobre prochain, estimant qu'elle n'avait plus assez d'énergie pour continuer. Il y a aussi de nouvelles rumeurs d'un dépôt de bilan imminent pour l'établissement de prêt de cryptomonnaies Genesis. En Europe, les britanniques ne pourront pas se moquer des grévistes français : des mouvements sociaux d'envergure sont prévus dans les deux pays. Aujourd'hui en France pour dénoncer la réforme des retraites et le 1er février outre-Manche pour toute une brochette de revendications.

Côté sociétés, les publications de résultats annuels continuent, avec quelques acteurs européens comme Geberit, Galenica, Zur Rose ou Virbac, en attendant Procter & Gamble, Caterpillar et Netflix aux Etats-Unis. Et pour le volet macro, il y aura quelques statistiques américaines pour tester le concept des bonnes et de mauvaises nouvelles précité.

En Asie-Pacifique, les actions baissent franchement au Japon (-1,4%), mais les autres places sont plus mitigées. Hong Kong, Bombay et Shanghai évoluent autour de l'équilibre, pendant que Sydney et Séoul gagnent environ 0,5%. Les craintes entrevues aux Etats-Unis ne se sont que modérément propagées. Les marchés actions européens, en revanche, devraient y être plus sensibles avec une baisse attendue à l'ouverture. Le CAC40 a démarré la séance en baisse de 0,43% à 7053 points.

Les temps forts économiques du jour

Aux Etats-Unis à 14h30, place aux permis de construire et aux mises en chantier de décembre ainsi qu'aux demandes hebdomadaires d'inscription au chômage. Tout l'agenda ici.

L'euro remonte légèrement à 1,0794 USD. L'once d'or revient vers 1910 USD. Le pétrole a perdu du terrain, avec un Brent de Mer du Nord à 83,78 USD le baril et un brut léger américain WTI à 78,14 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans recule à 3,33%. Le bitcoin repasse sous 21 000 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Accor : Barclays passe de souspondérer à pondération en ligne en visant 29 EUR.
  • Air Liquide : Cowen relève son objectif de cours de 155 à 190 EUR.
  • Aryzta : Baader Helvea reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 1,25 à 1,50 CHF.
  • Compagnie Financière Richemont : UBS reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 154 à 162 CHF.
  • Electrolux Professional : SEB Equities passe de conserver à acheter en visant 65 SEK.
  • ENI : J.P. Morgan passe de surpondérer à neutre en visant 18 EUR.
  • Equinor : J.P. Morgan passe de neutre à souspondérer en visant 290 DKK.
  • Esker : Stifel passe d'acheter à conserver en visant 175 EUR.
  • Fnac Darty : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 38 EUR.
  • Forbo : Research Partners reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 1650 à 1350 CHF.
  • Givaudan : BofA passe d'acheter à neutre en visant 3500 CHF.
  • JCDecaux : Goldman Sachs passe de vendre à neutre en visant 21,90 EUR.
  • Novozymes : SEB Equities passe de conserver à acheter en visant 440 DKK.
  • OMV : J.P. Morgan passe de pondération en ligne à souspondérer en visant 48 EUR.
  • Renault : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 42,50 EUR.
  • Roche : Deutsche Bank banque passe de conserver à vendre on visant 265 CHF.
  • Prosus : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 80 EUR.
  • Tessenderlo : AlphaValue démarre le suivi à l'achat en visant 46,60 EUR.
  • Ubisoft : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 21 EUR.
  • Wizz Air : Exane BNP Paribas passe de neutre à sousperformance en visant 2000 GBp.
  • WPP : Goldman Sachs passe de conserver à acheter en visant 1158 GBp.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Vétoquinol : le chiffre d'affaires 2022 se contracte de 0,8% à 540 M€ en données organiques. Le consensus (5 analystes) visant 546 M€.
  • Virbac : la croissance organique a atteint 9,6% en 2022, portant le revenu annuel à 1,216 Md€ (consensus 1,17 Md€). Le laboratoire vétérinaire vise 4 à 6% de croissance cette année et une marge opérationnelle de 13 à 14%.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Danone renforce son équipe de direction avec trois nouveaux DG adjoints.
  • Andrea Agnelli, administrateur non-exécutif de Stellantis, a démissionné.
  • Schneider signe avec BitSight un partenariat pour à améliorer la détection de l'exposition des technologies opérationnelles aux cybermenaces.
  • Accor a cédé sa participation résiduelle dans H World Group pour un montant de 460 M$.
  • Delta Air Lines commande une douzaine d'A220-300 à Airbus.
  • Faurecia émet 250 M€ d'obligations liées au développement durable à échéance 2026 pour refinancer l'opération Hella.
  • Roche Bobois se renforce en France avec le rachat de 13 magasins franchisés.
  • Jacques Bogart va fermer certains magasins de son réseau. Le groupe confirme la perspective d'une hausse de son chiffre d'affaires annuel 2022 sans toutefois atteindre son objectif d'EBITDA.
  • Une cour d'appel confirme le verdict du Tribunal de commerce en faveur de Negma dans l'affaire l'opposant à Biophytis.
  • Néovacs signe une nouvelle convention de financement avec Pharnext.
  • Sur l'agenda du jour : Drone Volt, Agripower, Bourse Direct, Paragon ID, Arcure, DBT, SergeFerrari, Catering International Services

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont données à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Alcoa : les résultats du quatrième trimestre sont inférieurs aux attentes du marché.
  • BHP : le groupe minier enregistre une hausse de sa production de cuivre et de minerai de fer au cours du premier semestre fiscal.
  • Boohoo : les ventes reculent de 12% en 2022, pour une marge bénéficiaire de base de 3,5%.
  • Deliveroo : la valeur brute de transaction du T4 a augmenté de 6% pour atteindre 1,8 Md£, mais le nombre de commandes a baissé de 2%. Mais le seuil de rentabilité a été atteint au S2.
  • DR. Martens : lance un avertissement sur ses bénéfices après des problèmes au centre de distribution américain.
  • Galenica : les revenus dépassent 4 MdsCHF, en croissance de 7% hors effet covid.
  • Geberit : le chiffre d'affaires a reculé de 2% en 2022.
  • Zur Rose : la perte d'Ebitda est moins lourde que prévu sur 2022.

Annonces importantes (et moins importantes)

Lectures