* Déclarations contradictoires sur le contrôle de Ras al Ain

* Menaces de sanctions des Occidentaux et de la Ligue arabe

* Paris et Berlin suspendent les livraisons de matériel militaire

* L'OSDH évoque plus de 150 morts dans les combats (Actualisé avec suspension des exportations d'armes françaises, entretien téléphonique Johnson-Erdogan et bilan § 8-10, 18-19 et 21)

par Tom Perry, Orhan Coskun et Daren Butler

ISTANBUL/BEYROUTH, 12 octobre (Reuters) - Les forces armées turques ont poursuivi samedi leur avancée dans les territoires du nord-est de la Syrie, au quatrième jour d'une offensive contre les miliciens kurdes contre laquelle les condamnations internationales continuent de se multiplier.

Le ministère de la Défense turc a annoncé samedi à la mi-journée que l'Armée nationale syrienne (des rebelles syriens soutenus par Ankara) avait pris le contrôle du centre de Ras al Ain, l'une des deux villes syriennes frontalières visées par l'offensive turque.

Mais les Forces démocratiques syriennes (FDS), mouvement dominé par les Kurdes des Unités de protection du peuple (YPG), ont démenti avoir abandonné le centre de Ras al Ain.

Un porte-parole des FDS, Marvan Qamishlo, a assuré qu'il s'agissait simplement d'une "retraite tactique" à la suite de plusieurs heures d'intenses bombardements turcs.

A la tombée de la nuit, Mustapha Bali, responsable du service de presse des FDS, a précisé que les membres des FDS étaient toujours présents dans Ras al Ain, où d'intenses affrontement se poursuivaient.

Alors que les Etats-Unis et l'Union européenne ont déjà mis en garde la Turquie contre d'éventuelles sanctions, la Ligue arabe a à son tour condamné samedi l'offensive turque et brandi la menace de mesures contre Ankara.

PARIS ET BERLIN SUSPENDENT LES EXPORTATIONS D'ARMES

L'Allemagne et la France ont de leur côté annoncé samedi l'interdiction des exportations d'arme vers la Turquie.

Dans un communiqué commun, les ministres français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et des Armées Florence Parly précisent que le prochain conseil des Affaires étrangères de l'Union européenne, prévu lundi à Luxembourg, "sera l'occasion de coordonner une approche européenne en ce sens".

Le Premier ministre britannique Boris Johnson s'est quant à lui entretenu samedi par téléphone avec le président turc Recep Tayyip Erdogan pour lui faire part de sa "vive préoccupation" et l'exhorter à mettre fin à cette offensive.

Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu a prévenu que la Turquie ne faiblirait pas face aux embargos.

"Peu importe ce qui est fait, peu importe qu'il s'agisse d'un embargo sur les armes ou quoi que ce soit d'autre, cela ne fait que nous renforcer", a-t-il déclaré samedi à la radio allemande Deutsche Welle avant l'annonce par Berlin et Paris de ces restrictions sur les exportations d'armes.

Il a également rejeté la proposition du président américain Donald Trump d'une médiation entre Ankara et les Kurdes des YPG, selon la transcription de l'entretien accordé à la radio allemande.

"Nous ne (...) négocions pas avec les terroristes. La seule chose à faire pour ces terroristes est de déposer les armes", a dit Mevlüt Cavusoglu.

PRÈS DE 150 MORTS DANS LES COMBATS, SELON L'OSDH

Lancée mercredi dans la foulée de l'annonce d'un retrait américain, l'opération "Source de paix" a jeté sur les routes plus de 100.000 personnes qui fuient les combats.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), 74 combattants sous commandement kurde, 49 rebelles syriens soutenus par Ankara et 30 civils ont été tués dans les combats.

Cet organisme basé à Londres a également annoncé que les rebelles syriens soutenus par Ankara avaient tué neuf civils, dont un politicien kurde, dans une embuscade samedi sur une route dans le nord de la Syrie.

Le porte-parole de l'Armée nationale syrienne a précisé dans un message vocal à Reuters que la progression des forces soutenues par Ankara n'avait pas atteint la route en question.

Ankara a annoncé avoir "neutralisé" - un terme qui généralement signifie "tué" - 459 membres des YPG.

Côté turc, 18 civils ont péri dans un bombardement transfrontalier, selon des médias et des responsables turcs.

(Avec Omar Fahmy au Caire et les correspondants de Reuters dans la région, et Arno Schutze à Berlin ; Gwénaëlle Barzic et Myriam Rivet pour le service français)