Ce choc, qui s'ajoute aux tensions accrues entre Washington et Pékin, a alimenté les craintes d'un ralentissement, voire d'une récession de la première économie mondiale et provoqué une ruée vers les actifs moins risqués, notamment les obligations d'Etat, dont les rendements sont tombés à des plus bas record.

L'indice Dow Jones a perdu 354,84 points, soit 1,41%, à 24.815,04. Le S&P-500, plus large, a cédé 36,80 points, soit 1,32%, à 2.752,06. Le Nasdaq Composite a reculé de son côté de 114,57 points (-1,51%) à 7.453,15 points.

Le S&P-500 et le Nasdaq a terminé sous sa moyenne mobile à 200 jours, considéré comme un niveau de soutien important du marché, pour la première fois depuis le 8 mars.

Sur la semaine, le Dow Jones a perdu 3,01%, le S&P 2,62% et le Nasdaq 2,41%. Les indices Dow et le S&P accusent leur plus forte baisse hebdomadaire de l'année. Pour le Dow Jones, il s'agit de la sixième baisse hebdomadaire d'affilée, ce qui représente la phase de baisse la plus longue depuis huit ans.

Sur le mois de mai, les grands indices accusent respectivement des pertes de 6,69% pour le Dow, 6,58% pour le Dow et 7,93% pour le Nasdaq, plus net repli mensuel de l'année.

Le président américain a annoncé l'application à partir du 10 juin de droits de douane de 5% sur tous les produits importés du Mexique alors que les deux pays étaient sur le point de finaliser le nouvel accord de libre-échange USMCA. Ces taxes, progressivement relevées, seraient en vigueur tant que les flux de migrants clandestins traversant le Mexique ne seraient pas stoppés, a expliqué l'administration Trump.

Le Mexique n'a pas encore dit s'il prendrait des mesures de rétorsion. Son président Andres Manuel Lopez Obrador a annoncé que son pays réagirait avec prudence et appelé au dialogue.

"Cela survient à un moment où les entreprises doivent rechercher des alternatives à la chaîne d'approvisionnement chinoise. Beaucoup pensaient que le Mexique serait une solution de remplacement, mais aujourd'hui, c'est remis en question", dit Cliff Hodge, chargé des investissements chez Cornerstone Wealth.

"Le risque est que ces droits de douanes, ainsi que ceux imposés à la Chine, poussent un cycle économique déjà baissier vers une véritable récession."

Pour Gregory Daco, économiste chez Oxford Economics, les tarifs douaniers américains à l'encontre du Mexique pourraient réduire le PIB des Etats-Unis de 0,7 point de pourcentage en 2020, et donc ramener sa croissance à moins de 1%, tout en faisant basculer l'économie mexicaine dans la récession.

L'aversion au risque a été accentuée par la contraction de l'industrie chinois en mai et par la menace de Pékin de publier une liste d'entreprises, d'organisations et d'individus étrangers "non fiables" et susceptibles de porter atteinte aux intérêts des entreprises chinoises.

VALEURS

Sur les 11 grands indices sectoriels, seuls les services collectifs et de l'immobilier ont fini dans le vert alors que huit secteurs ont accusé perdu plus de 1%.

L'annonce de Trump a pénalisé en premier lieu les constructeurs automobiles américains, implantés depuis longtemps au Mexique, où ils profitent d'une main d'oeuvre bon marché.

General Motors a cédé 4,25% et Ford Motor 2,36%. Leur indice sectoriel a reculé de 1,44%.

Constellation Brands, qui possède une brasserie importante au Mexique, a perdu 6%.

De son côté, Gap décroche de 9,47% après l'abaissement de sa prévision de bénéfice par action pour 2019 en raison de la faiblesse de ses ventes au premier trimestre.

Les valeurs bancaires sont pour leur part pénalisées par la chute des rendements obligataires, qui pèse sur leur rentabilité. Goldman Sachs a perdu 2,61% et JPMorgan Chase 1,05%. L'indice bancaire a cédé 1,53%.

LES INDICATEURS DU JOUR

Les indicateurs économiques américains ont eu peu d'impact sur le marché, avec une petite amélioration de la confiance des ménages en mai et une légère accélération de la hausse des prix en avril, à 0,3% contre 0,2% en mars, qui pourrait conforter la Réserve fédérale dans l'opinion que la faiblesse récente de l'inflation n'était que temporaire. et

LA SÉANCE EN EUROPE

Les Bourses européennes ont terminé en nette baisse également après décision inattendue de Donald Trump de taxer toutes les importations de produits mexicains, ce qui a aussi provoqué une nouvelle chute des rendements obligataires.

À Paris, le CAC 40 a perdu 0,79% à 5.207,63 points, après avoir limité ses pertes en fin de séance.

Même scénario pour le Footsie britannique qui a lâché 0,78% et le Dax allemand qui a abandonné 1,47%.

L'indice EuroStoxx 50 a perdu 1,14%, le FTSEurofirst 300 0,81% et le Stoxx 600 0,81%.

Ce dernier accuse un repli de 5,7% sur l'ensemble du mois de mai, marqué par un regain de tensions entre les Etats-Unis et leurs partenaires commerciaux, Chine en tête. Il s'agit de son plus fort repli mensuel depuis janvier 2016.

A Paris, le CAC 40 a reculé de 2,05% sur la semaine et de 6,78% sur l'ensemble du mois de mai.

Le nouveau coup d'éclat de Trump a frappé le secteur automobile, car de nombreux constructeurs se servent du Mexique comme base pour exporter vers les Etats-Unis mais aussi car les constructeurs européens ne peuvent que craindre d'être les suivants sur la liste. L'indice Stoxx automobile a cédé 1,96%, au plus bas depuis le 8 janvier.

TAUX

Le regain d'aversion au risque a provoqué une nouvelle chute des rendements obligataires de référence, celui des Treasuries à dix ans ayant cédé neuf points de base, à 2,137%. Il a touché s2,128%, son plus bas niveau depuis septembre 2017.

L'inversion de l'écart entre le rendement à 10 ans et celui à trois mois (2,348%), qui peut être considéré comme un signe avant-coureur de récession, s'est accentuée.

En Europe, le rendement du Bund allemand à dix ans a touché un plus bas record à -0,213% avant de clôturer à -0,2%. Le taux de référence de la zone euro a enfoncé son précédent plus bas de -0,204%, inscrit en juillet 2016 après la décision de la Grande-Bretagne de quitter l'Union européenne.

Le mouvement est général à l'exception des rendements des emprunts d'Etat italiens qui ont continué à monter, traduisant une défiance des investisseurs face aux tensions renouvelées entre Bruxelles et Rome sur les finances publiques italiennes.

Le taux du dix ans italien a grimpé jusqu'à 2,743%, ce qui a porté l'écart de rendements avec les titres allemands de même échéance à près de 300 points de base, au plus haut depuis décembre. Il est ensuite retombé à 2,667%.

CHANGES

Le yen a joué à plein son rôle de valeur refuge et pris plus de 1% face au dollar, au plus haut depuis début janvier.

L'"indice dollar", qui mesure ses fluctuations face à un panier de devises de référence, a lui reculé de 0,4%.

Le dollar a toutefois bondi face au peso mexicain (+2,44%) qui est tombé à un plus bas depuis la fin décembre, et l'euro s'est raffermi de 0,38% face au dollar, à 1,1175.

PÉTROLE

Les cours du pétrole ont chuté sur le journée et ont accusé leur plus forte baisse mensuelle des six derniers mois.

Le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) a perdu 5,46% à 53,50 dollars le baril et le Brent a reculé de 3,56% à 64,49 dollars.

Sur le mois de mai, le WTI a abandonné 16% et le Brent 11%, leur plus forte perte mensuelle depuis novembre.

Des droits de douanes élevés pourraient sérieusement affecter les échanges de pétrole entre les Etats-Unis et le Mexique, les raffineurs américains important entre 600.000 et 700.000 barils de pétrole brut mexicain par jour tandis que les États-Unis exportent un million de barils par jour de brut et de carburants vers le Mexique, plus que vers tout autre pays.

A SUIVRE LUNDI :

Les investisseurs seront attentifs à l'indice chinois PMI Caixin-Markit manufacturier, ainsi qu'aux indices PMI et ISM définitifs pour le mois de mai en Europe et aux Etats-Unis, où l'activité du secteur privé a été plus faible qu'attendu selon les premières estimations.

(Avec Shreyashi Sanyal et Abhinav Ramnarayan, Juliette Rouillon pour le service français)

par Chuck Mikolajczak