Hors-normes, son parcours boursier reflète son parcours opérationnel, d'autant plus admirable qu'il a été accompli sur des marchés notoirement difficiles et volontiers dysfonctionnels.

Le continent sud-américain et sa population d'un demi-milliard d'habitants conservent - après l'Afrique - la plus faible pénétration du e-commerce dans son économie. Le boulevard de croissance reste donc grand ouvert : preuve en est avec la valeur totale des marchandises vendues sur MercadoLibre, qui triple depuis 2020.

Une opportunité non moins substantielle - et parfaitement captée par MercadoLibre - se trouve dans les services financiers en ligne, notamment les paiements et le crédit. En particulier, le Brésil fait ici figure de pionnier : depuis dix ans, la part de marché des banques y recule sans cesse, tandis que celle des fintechs alternatives devrait bientôt atteindre 50%.

MercadoPago - la filiale fintech de MercadoLibre - compte déjà 35 millions de clients, contre 4 millions il y a cinq ans. Son portefeuille de prêts atteint quant à lui 9,3 milliards de dollars, soit un volume multiplié par vingt depuis 2020.

D'aucuns pourraient s'inquiéter d'une expansion possiblement trop agressive sur des métiers du crédit à haut risque, a fortiori si la poussée sert à compenser un essoufflement de l’expansion sur le segment e-commerce ; il est vrai que la concurrence est rude, et que des pairs comme Amazon, Temu ou Shopee entendent gagner des parts de marché en s'attaquant aux marges du leader - c’est-à-dire aux marges de MercadoLibre.

La hausse du profit cash - ou cash-flow libre - de l’intéressé devrait justement marquer un net ralentissement en 2025 et en 2026. En parallèle, les provisions pour crédits défaillants, qui atteignaient 1,9 milliard de dollars l'an passé, devraient cette année approcher les 2,4 milliards de dollars.

Les optimistes signaleront cependant que MercadoLibre, qui a tout de même multiplié son chiffre d'affaires par sept en cinq ans, et qui reste ainsi le groupe de e-commerce en plus forte expansion dans le monde, devrait générer en 2025 un cash-flow libre de 7,5 milliards de dollars. 

Rapporté à la capitalisation boursière de $110 milliards, ceci représente une valorisation de seulement quinze fois le profit. Voilà qui ne saurait manquer de retenir l'attention des amateurs d'entreprises en croissance - ceci, même s'il reste toujours délicat d'appliquer un référentiel de valorisation typiquement nord-américain sur une entreprise qui évolue en Amérique latine.