Un jury américain a rendu vendredi un verdict historique contre BNP Paribas, estimant que la banque française a aidé le gouvernement soudanais à commettre un génocide en fournissant des services bancaires en violation des sanctions américaines.

Le jury fédéral de Manhattan a ordonné à BNP Paribas de verser au total 20,5 millions de dollars à trois plaignants soudanais qui ont témoigné des violations des droits humains perpétrées sous le régime de l'ancien président Omar el-Béchir.

Les avocats des trois plaignants, aujourd'hui résidents aux États-Unis, ont déclaré que ce verdict ouvre la voie à plus de 20 000 réfugiés présents sur le sol américain pour réclamer des milliards de dollars de dommages et intérêts à la banque française.

« Nos clients ont tout perdu à cause d'une campagne de destruction alimentée par des dollars américains, campagne que BNP Paribas a facilitée et qui aurait dû être stoppée », a déclaré Bobby DiCello, avocat des plaignants.

Un porte-parole de BNP Paribas a indiqué que le verdict devrait être annulé en appel, ajoutant que la banque considère que la décision ne concerne que les trois plaignants individuels et ne devrait pas avoir de portée plus large.

« BNP Paribas estime que ce résultat est manifestement erroné et qu'il existe des motifs très solides pour faire appel du verdict, qui repose sur une déformation du droit suisse applicable et ignore des éléments de preuve importants que la banque n'a pas pu présenter », a déclaré le porte-parole.

Le verdict est intervenu à l'issue d'un procès de cinq semaines mené sous la direction du juge fédéral Alvin Hellerstein, qui avait rejeté l'an dernier la demande de BNP Paribas de classer l'affaire avant le procès.

Le procès s'est concentré sur la question de savoir si les services financiers fournis par BNP Paribas constituaient une « cause naturelle et adéquate » des préjudices subis par les survivants des opérations de nettoyage ethnique et de violences de masse.

Dans sa décision de l'année dernière, le juge Hellerstein avait estimé que des faits établissaient un lien entre les services bancaires de BNP Paribas et les exactions commises par le gouvernement soudanais.

Le jugement intervient dans le cadre d'un recours collectif intenté par des résidents américains ayant fui les communautés autochtones noires non arabes du Soudan du Sud, du Darfour et des Monts Nouba, dans le centre du Soudan.

Le gouvernement américain a reconnu le conflit soudanais comme un génocide en 2004.

BNP Paribas avait accepté en 2014 de plaider coupable et de payer une amende de 8,97 milliards de dollars pour régler des poursuites américaines l'accusant d'avoir transféré des milliards de dollars pour le compte d'entités soudanaises, iraniennes et cubaines soumises à des sanctions économiques.