PARIS (Agefi-Dow Jones)--Le numéro un mondial du luxe LVMH réexamine son offre de 16,2 milliards de dollars sur le joaillier américain Tiffany & Co, a indiqué une personne proche du dossier, alors que la pandémie de coronavirus secoue le secteur du luxe.

Le président-directeur général de LVMH, Bernard Arnault, a convoqué mardi une réunion du conseil d'administration afin de discuter de ce rachat. Le conseil d'administration "a notamment porté son attention sur l'évolution de la pandémie et son impact potentiel sur les résultats et les perspectives de Tiffany & Co", a déclaré LVMH jeudi dans un communiqué.

Le groupe français avait conclu fin novembre un accord avec Tiffany en vue du rachat du joaillier pour 135 dollars par action, soit un niveau proche des records boursiers du groupe américain. L'arrêt des flux touristiques consécutif à la pandémie de coronavirus a depuis fait chuter les ventes de produits de luxe, pénalisant tous les acteurs du secteur.

Le déclenchement de manifestations la semaine dernière contre les violences policières aux Etats-Unis, où certains quartiers de shopping haut de gamme ont été touchés par des pillages et des actes de vandalisme, n'a fait que donner à Bernard Arnault une raison supplémentaire de remettre en cause la transaction, estiment des analystes.

Bernard Arnault cherche probablement à renégocier le prix élevé consenti l'année dernière pour le rachat de Tiffany, dans un contexte de marché durablement déprimé, ajoutent les analystes.

L'un des moyens de pression réside dans les engagements pris par Tiffany auprès de ses créanciers. Le non-respect du taux d'endettement maximum fixé dans les contrats du groupe pourrait donner à LVMH des arguments juridiques pour se retirer de l'opération. Selon les analystes de la banque d'investissement américaine Cowen, Tiffany risque de ne pas respecter ses covenants pour le trimestre en cours.

L'accord de novembre a fixé au 24 août la date butoir pour finaliser l'acquisition, même si chaque partie à la possibilité de demander un report jusqu'au 24 novembre au plus tard. La fusion a déjà été autorisée aux Etats-Unis et les deux sociétés n'ont pas encore déposé leur dossier auprès de la Commission européenne.

Le projet inclut une clause de terminaison de contrat permettant à Tiffany de renoncer à l'opération en échange du versement de 575 millions de dollars, mais LVMH ne dispose pas d'une telle option.

"S'ils veulent se désengager, ils devront aller en justice", commente Luca Solca, analyste chez Bernstein.

Tiffany publiera mardi prochain ses résultats au titre du trimestre clos fin avril et les analystes tablent sur une chute d'environ 50% des revenus compte tenu de l'impact de la pandémie de coronavirus et des mesures de confinement.

LVMH a également fait savoir jeudi qu'il n'envisageait pas d'acquérir des actions Tiffany sur le marché, mettant un terme à des mois de spéculation sur le sujet. En conséquence de l'épidémie, le cours de Tiffany est désormais bien plus faible que les 135 dollars par action proposés par LVMH.

Les analystes ont interrogé les dirigeants de LVMH à plusieurs reprises pour savoir si des achats à un cours inférieur à l'offre étaient envisagés. L'accord de fusion permet au groupe français d'acquérir des titres Tiffany depuis la mi-mai.

-Matthew Dalton, The Wall Street Journal (Version française: François Schott et Thomas Varela) ed: ECH

Agefi-Dow Jones The financial newswire