Le projet de rachat par Veolia de l'essentiel de la part d'Engie dans Suez est "aberrant pour Suez et funeste pour la France", estime le directeur général de Suez dans une interview publiée dimanche par le Figaro.

L'opération, qu'il qualifie d'"opportuniste", "sous-valorise les actifs de Suez", porte des risques de casse sociale et "sous-estime complètement les problèmes de concurrence et de risques d'exécution", estime Bertrand Camus, ajoutant que "Suez n'a pas besoin de se marier".

"Veolia ne propose pas un projet industriel. Il propose de démanteler 40% de notre activité en France. (...) Ceci explique la colère et la mobilisation du corps social de Suez. Les méga fusions sont synonymes de casse sociale", juge Bertrand Camus.

Veolia a proposé il y a une semaine de racheter l'essentiel de la participation d'Engie dans Suez (29,9% sur un total de 32%) pour 15,50 euros par action, soit un montant de 2,9 milliards d'euros, avant de lancer une offre sur le reste du capital de son rival afin de bâtir avec lui un "grand champion mondial français de la transformation écologique".

Interrogé sur cette proposition vendredi, le président du conseil d'Engie, Jean-Pierre Clamadieu, a estimé que le projet de Veolia présentait des atouts mais que le prix proposé était insuffisant.

Du côté de l'Etat, qui détient 23,6% du capital d'Engie, le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire a indiqué dimanche que des offres sur Suez, qu'il s'agisse de celle de Veolia ou de possibles propositions concurrentes, seraient examinées avec la "même équité".

Vendredi, Bruno Le Maire avait estimé que "l'idée de créer un champion mondial de la gestion des déchets, des questions environnementales est une bonne idée stratégique mais elle ne doit pas se faire à n'importe quel prix et elle doit obéir à un certain nombre de règles", notamment en matière d'emplois.

"Le concept d'un champion national partant à la conquête des marchés, c'est dépassé. Parler de positions, c'est statique. Ce qui compte c'est l'innovation, l'agilité, pas la taille!" estime pour sa part Bertrand Camus dans son interview au Figaro.

"Concernant le rachat de la participation d'Engie, nous avons des scénarios en préparation", assure-t-il également.

"Il n'y a pas de doute sur l'ancrage français de Suez", explique Bertrand Camus. "Mais, à l'instar des autres grands groupes français, il n'est pas pertinent de vouloir à tout prix un actionnariat exclusivement tricolore en particulier lorsque l'on noue des partenariats avec des collectivités locales à l'étranger."

"Nous avons de longue date des actionnaires institutionnels espagnols, italiens et chiliens", déclare encore le directeur général de Suez.

"Je suis confiant: nous serons au rendez-vous des attentes", ajoute-t-il, alors que l'offre de Veolia expire le 30 septembre.

(Jean-Stéphane Brosse)