Période agitée pour le capitalisme français. Après la guerre Veolia/Suez, l'offensive avortée du canadien Couche-tard contre Carrefour, Danone est aujourd'hui la cible du fonds activiste Bluebell Capital. Fort d'une participation au capital du géant de l'agroalimentaire, il réclame une modification de la gouvernance et notamment le remplacement du PDG Emmanuel Faber, a rapporté Challenges. L'investissement du fonds n'a pas été dévoilé mais, mais compte tenu de l'absence de franchissement de seul à l'AMF il est en dessous de 5%.

La charge du fonds londonien créé en 2014 par trois associés italiens, dont Francesco Trapani, l'ancien patron de Bulgari, est lourde.

Dans une lettre datée du 19 novembre dernier, il reproche notamment au groupe de ne pas avoir géré au mieux l'équilibre entre rentabilité pour les actionnaires et développement durable, soulignant que ses concurrents comme Nestlé et Unilever dégageaient de meilleures performances tout en faisant preuve d'engagement en matière de développement durable.

Le fonds souligne également que Danone a raté la plupart de ses objectifs opérationnels présentés lors de la Journée des investisseurs du 18 mai 2017.

Bluebell observe de surcroît que l'acquisition du leader américain de l'alimentation bio et d'origine végétal Whitewave en 2016 n'a pas tenu ses promesses initiales.

Enfin, le fonds critique la gouvernance de Danone, estimant qu'il convient de confier à un directeur général la mission exclusive de restaurer la croissance des ventes du groupe, sans qu'il soit distrait par la tâche de président du conseil d'administration.

Danone n'a pas commenté ces informations mais la présentation le 23 novembre, soit quatre jours après la rédaction de la lettre de Bluebell, d'un plan d'adaptation stratégique apparait comme une riposte à l'offensive.

Le propriétaire des marques Evian, Activia ou Blédina a promis de renouer avec la croissance et la rentabilité à l'issue d'une vaste réorganisation se traduisant par 2 000 suppressions de postes.

Les investisseurs réagissent favorablement à l'irruption Bluebell. Après avoir gagné 2,05% hier, Danone grimpe ce midi de 2,3% à 55,96 euros.

Les analystes, eux, sont plus mesurés. Société Générale a maintenu sa recommandation Vendre et son objectif de cours de 49 euros sur le titre. Compte tenu de l'interventionnisme économique de la France dans le dossier Carrefour, le broker estime que la capacité du fonds à influer sur Danone devrait être limitée.

En revanche souligne Société Générale, si les exigences de Bluebell Capital obtiennent, comme de coutume, le soutien d'actionnaires importants du groupe tels que Blackrock et/ou Crédit Agricole, la pression sur le groupe pourrait s'intensifier.

Dès lors indique le courtier, le marché pourrait effectivement se demander qui pourrait être nommé à la place d'Emmanuel Faber et ce que le groupe pourrait faire différemment.

Pour autant précise l'analyste, détenir du Danone uniquement dans l'éventualité d'un changement de direction serait, à son avis, un peu exagéré, car la situation de l'entreprise ne peut pas être changée du jour au lendemain, compte tenu des pressions structurelles actuelles et de l'exposition malheureusement élevée à des tendances à la baisse, comme la demande chinoise de lait infantile et l'eau en bouteille.

Un point de vue partagée par UBS, qui a lui aussi maintenu sa recommandation Vendre et son objectif de cours de 45 euros.

Le broker continue de penser que la performance opérationnelle de Danone au cours des dernières années s'explique essentiellement par une accumulation de vents contraires structurels plutôt que la preuve de problèmes d'exécution persistants.

En tant que tel, bien qu'un changement de PDG puisse s'avérer positif pour le sentiment du marché (2% de surperformance par rapport au secteur depuis la publication de l'article) le broker ne le considère pas comme une étape critique dans la résolution des problèmes à long terme du groupe.

Le bureau d'études observe qu'à ce stade, les recommandations Bluebell Capital ne semblent pas inclure d'initiatives de gestion de portefeuille à grande échelle, qui, à son avis, représentent le moyen le plus important de sortir de la sous-performance opérationnelle actuelle du groupe.