PARIS (Reuters) - Le fonds Artisan Partners a encore accentué jeudi la pression sur Danone et son PDG Emmanuel Faber, en critiquant les performances du groupe tout en réclamant la dissociation des fonctions de président et de directeur général, faisant écho à une demande similaire d'un autre actionnaire.

Danone souffre face à la pandémie due au coronavirus qui pèse sur ses marges et pénalise lourdement ses ventes, notamment dans la branche eaux minérales confrontée au trou d'air de la demande des hôtels et restaurants. En Bourse, la valeur a reculé de 27% en 2020.

La demande d'Artisan Partners, qui dit détenir 3% du capital de Danone, intervient après les critiques du fonds activiste Bluebell Capital, qui a demandé le mois dernier la démission d'Emmanuel Faber.

"Les rôles de président et de directeur général doivent être séparés", écrit Artisan Partners dans une lettre rendue publique jeudi.

Artisan Partners, qui est aussi présent au capital d'Unilever et de Novartis, a indiqué avoir commencé à prendre une participation dans Danone l'an dernier.

Le fonds américain se présente comme un investisseur de long terme et il est notamment présent de longue date au capital de Sodexo mais il a parfois réclamé publiquement des changements dans certains groupes, comme chez Johnson & Johnson ou chez ABB.

Le fonds américain dit avoir écrit une lettre à l'administrateur indépendant de Danone Gilles Schnepp pour lui exprimer ses inquiétudes et être en contact avec Jan Bennink, un spécialiste du secteur et ancien cadre dirigeant de Danone, pour travailler sur un plan d'améliorations.

Jan Bennink a dans le passé dirigé la division de produits frais de Danone. Il a aussi été le patron du groupe néerlandais Royal Numico et a conseillé des fonds activistes, comme Third Point.

"Nous accueillons favorablement tous les investissements et les points de vue constructifs sur la manière dont nous pouvons créer de la valeur dans la durée", a réagi Danone dans un communiqué.

UNE RESTRUCTURATION EN COURS POUR REDRESSER LES MARGES

"Danone réévalue constamment la façon dont le conseil d'administration et le comité exécutif remplissent leurs fonctions, dans l'intérêt des actionnaires", ajoute le groupe, rappelant les réformes mises en oeuvre ces derniers mois par la société pour renforcer sa gouvernance.

Bluebell s'est pour sa part réjoui de constater qu'un autre actionnaire partageait ses préoccupations. Il a demandé au conseil d'administration de Danone de prendre de manière urgente des décisions déterminées et d'examiner attentivement le plan conçu par Artisan Partners avec l'aide de Jan Bennink, pour lequel le fonds activiste dit avoir "le plus grand respect".

Face aux critiques, Emmanuel Faber a entrepris de mettre en oeuvre un plan de restructuration prévoyant la suppression de jusqu'à 2.000 emplois à travers le monde, dont 400 en France.

Danone a également modifié sa gouvernance avec la désignation de trois nouveaux administrateurs et la nomination de sa directrice financière sur le départ Cécile Cabanis comme vice-présidente du conseil d'administration, laissant sur leur faim une partie des investisseurs.

Emmanuel Faber, qui a pris les fonctions de directeur général de Danone en 2014 avant d'ajouter le rôle de président trois ans plus tard, a déclaré récemment au Journal du Dimanche, ne pas avoir de "position dogmatique" sur la dissociation des deux fonctions.

Artisan Partners comme Bluebell Capital estiment que Danone pourrait faire mieux.

"Notre attirance pour Danone est très simple : il possède l'une des meilleures collections d'actifs dans l'industrie alimentaire mondiale", écrit Artisan dans sa lettre.

"Malheureusement, la performance financière de Danone n'est pas à la hauteur de la qualité de ses actifs. Sur presque tous les plans, la performance de Danone est à la traîne."

Les deux investisseurs n'agissent pas de concert, a précisé une source familière du dossier.

En Bourse, l'action Danone progresse de 2,92% à 54,92 euros en milieu de journée, parmi les plus fortes hausses d'un CAC 40 quasiment stable (+0,03%).

(Sudip Kar-Gupta, Sarah White, Blandine Hénault et Gwénaëlle Barzic, édité par Bertrand Boucey)