« Le point de vue dominant est que les marchés ont toujours raison. Je pense, au contraire, qu'ils ont presque toujours tort ». Tel est le paradigme dans lequel évolue la pensée économique de George Soros.

Selon lui, ses propres succès de spéculateur infirment d'ailleurs la théorie des marchés efficients, selon laquelle toute l'information disponible est incorporée aux cours des titres financiers et personne ne peut gagner contre la Bourse. Lui a effectivement prouvé le contraire : on peut gagner (beaucoup d'argent) contre la Bourse.

La faillite de Lehman Brothers, qui a marqué le déclenchement mondial de la crise, aurait selon lui dû être empêchée par les autorités américaines. Encore un cas d'école où il ne fallait pas laisser faire le marché...

Soros attaque en fait la théorie économique néo-classique sur laquelle reposerait la défense du capitalisme. Il en veut particulièrement au concept d'équilibre, qui violerait ce qu'il appelle la « réflexivité », soit le fait que les opinions des individus influencent l'environnement social et économique autant qu'elles sont déterminées par celui-ci.

Une « troisième voie », entre dirigisme et libéralisme
Aujourd'hui, il constate que « la gamme des incertitudes auxquelles l'économie mondiale est confrontée est anormalement importante ». C'est pourquoi il réclame une réglementation accrue des marchés financiers, qui abritent toujours et encore des électrons libres qu'il devient urgent de contrôler.

Il sermonne ainsi les banquiers, qui n'auraient toujours pas compris les leçons de la crise. Il assure que cette dernière a été précédée par une période de grande modération, avec très peu de volatilité. Cette parenthèse s'est ensuite transformée en frénésie du « tout pour le risque », conduisant tout droit à la crise actuelle.

Il propose à cet égard une « troisième voie », qui se situerait entre ses deux bêtes noires : l'étatisme, de droite comme de gauche, et le libéralisme à tout crin. Il préconise ainsi la création d'une structure politique internationale qui encouragerait la création de sociétés ouvertes (d'où le nom de sa fondation Open Society Institute) garantes d'une gouvernance démocratique.

Il prévient que le régulateur ne doit pas être confiné dans un rôle de « surveillant des masses monétaires » mais avoir un véritable rôle dans le contrôle du crédit. Lui-même a reconnu avoir quelquefois présumé de sa situation et pris trop de risques.

Comme quoi, avec l'âge, et avec beaucoup d'argent aussi, il est possible de rendre sage un spécialiste de la spéculation. N'est-ce-pas lui, « l'homme qui fit sauter la Banque d'Angleterre », qui a proposé, en décembre dernier, la création d'un fonds climat de 100 milliards de dollars ?