PARIS (Reuters) - EDF manque de moyens pour financer ses investissements dans la transition énergétique en raison d'une régulation qui ne pénalise pas assez les moyens de production émetteurs de CO2, a déclaré mardi son PDG, Jean-Bernard Lévy.

Alors que le gouvernement discute avec Bruxelles d'une nouvelle régulation du nucléaire français, qui s'accompagnerait d'une réorganisation en profondeur d'EDF, Jean-Bernard Lévy appelle ainsi de ses voeux des décisions fortes aux niveaux français et européen.

"Nous n'avons pas assez de moyens, même en multipliant les investissements dans la transition énergétique, nous aimerions bien faire beaucoup mieux, faire beaucoup plus, aller beaucoup plus vite", a-t-il dit lors d'un événement sur le thème de l'innovation organisé par EDF.

"Nous sommes assez bloqués dans cette démarche par le système dans lequel nous sommes aujourd'hui, un système de régulation qui a été mis en place il y a une bonne dizaine d'années (...) sans tenir compte, en aucune façon, du fait que nous produisons de l'électricité décarbonée", a-t-il ajouté en évoquant la subsistance de formes de subventions aux énergies fossiles dans de nombreux pays d'Europe.

Le PDG d'EDF a estimé que les objectifs d'efficacité énergétique devaient s'accompagner d'une prise en compte des objectifs de décarbonation et a redit son souhait que des taxes carbone efficaces soient enfin décidées au niveau de l'Union européenne ou de ses Etats-membres, cinq ans après l'accord de Paris sur le climat et le réchauffement climatique.

"Qu'a-t-on fait ces cinq dernières années dans les instances communautaires pour mettre en place des actions concrètes allant dans le sens des accords de Paris ? Il me semble qu'on vient de perdre cinq ans."

Jean-Bernard Lévy a également estimé que le financement de la transition énergétique n'imposait pas des hausses de prix pour les consommateurs.

"Il faut modifier le prix relatif des énergies entre elles (...), il faut que la politique de la fiscalité évolue - peut-être pas trop brutalement, parce que l'épisode des Gilets jaunes aura laissé des traces - de façon à organiser les choses en fonction d'un objectif climatique. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, ce n'est pas le cas en France et ce n'est pas le cas en Europe (...)"

Le projet de réorganisation d'EDF, nommé Hercule, doit lui permettre d'améliorer ses capacités d'investissement et de financement à travers notamment une sanctuarisation de son parc nucléaire français et une ouverture du capital de ses activités dans les renouvelables.

Les syndicats s'y opposent toutefois fermement en faisant valoir qu'il constituerait un premier pas vers un démantèlement et une privatisation d'EDF, avec des menaces pour l'emploi.

(Benjamin Mallet, édité par)