* La prise de contrôle de Pão de Açucar imminente

* Abilio Diniz, architecte du succès du brésilien, est sur la touche

* Interrogations sur la stratégie

* Casino pourrait privilégier sa croissance dans d'autres pays de la région

par Brad Haynes et Dominique Vidalon

SAO PAULO/PARIS, 21 mai (Reuters) - Casino, qui est sur le point de prendre le contrôle de Grupo Pão de Açucar (GPA) après une décennie de procédures juridiques et de luttes de pouvoir, doit désormais convaincre qu'il peut maintenir les positions du numéro un de la distribution alimentaire au Brésil.

Le président de GPA , Abilio Diniz, âgé de 75 ans, perdra l'essentiel de son influence sur les destinées du groupe quand Casino deviendra majoritaire en droits de vote et que son PDG Jean-Charles Naouri sera nommé président de la holding de contrôle Wilkes à l'issue de l'assemblée générale du 22 juin. (voir )

Casino a en outre évincé Abilio Diniz de son propre conseil d'administration il y a dix jours, signe de la défiance envers le Brésilien qui avait tenté une alliance avec Carrefour. , et

Le magnat brésilien est unanimement reconnu comme le principal artisan du succès de Pão de Açucar. D'où la nécessité pour Casino de confirmer et d'amplifier ce succès au Brésil, un marché clé, certes, mais aussi très concurrentiel et sur lequel les opportunités de croissance externe se font rares.

"Pão de Açucar fait partie de ces entreprises très liées à une personnalité", explique Flàvio Barros, gérant de fonds de Grau Gestão de Ativos à São Paulo. "Ce qui va se passer désormais est un peu flou."

Le Brésil est déjà le deuxième marché de Casino après la France. C'est surtout le principal moteur de son développement sur les marchés émergents.

Jean-Charles Naouri semble bénéficier pour l'instant du bénéfice du doute aux yeux des investisseurs, les actions Casino et Pão de Açucar restant en hausse depuis le début de l'année.

"La question principale c'est de savoir si le groupe restera performant après la prise de contrôle", résume Daniela Bretthauer, responsable de la recherche actions de Raymond James & Associates au Brésil. "Théoriquement, ce devrait être le cas."

MAINTENIR LA DYNAMIQUE

Mais certains craignent de voir Casino laisser GPA en pilotage automatique pour se concentrer sur ses projets de développement dans d'autres pays d'Amérique latine.

"Casino devra maintenir la dynamique de croissance au Brésil, sinon il pourrait perdre la place de numéro un derrière Carrefour ou Wal-Mart ", prévient Carlos Hernandez, analyste de Planet Retail à Londres.

Autre concurrent à surveiller, le chilien Cencosud a réalisé huit acquisitions au Brésil en cinq ans et projette une augmentation de capital de plus d'un milliard d'euros pour financer sa croissance.

La direction de GPA explique qu'elle poursuit l'intégration d'importantes acquisitions réalisées en 2010 dans l'ameublement et l'électroménager par la filiale Viavarejo mais elle n'exclut pas de nouveaux rachats.

Elle s'est fixé pour objectif une croissance de plus de 8% des ventes cette année, après 46% en 2011 et 38% en 2010.

Jean-Charles Naouri, lui, dit vouloir maintenir, au moins dans un premier temps la stratégie actuelle privilégiant l'accélération de la croissance organique.

Des porte-parole de Casino et Pão de Açucar ont refusé tout autre déclaration sur la stratégie. Ni Abilio Diniz ni Jean-Charles Naouri n'étaient disponibles pour des interviews.

Certains investisseurs estiment que Casino pourrait se contenter d'une croissance organique solide au Brésil, lui permettant de contenir la dette de GPA et de renforcer son propre bilan tout en réalisant des acquisitions dans d'autres pays de la région.

"La période de consolidation par acquisitions au Brésil appartient au passé. Cela se jouera beaucoup sur la croissance organique", note un analyste qui a demandé à ne pas être cité.

La priorité pour Casino dans la région semble pour l'instant être sa filiale colombienne Almacenes Exito, numéro un dans son pays, à qui Casino a cédé sa part majoritaire dans les enseignes uruguayennes Disco et Devoto, faisant ainsi d'Exito sa la plate-forme de développement en Amérique Latine hispanique. (avec Vivian Pereira à São Paulo et Pascale Denis à Paris, Marc Angrand pour le service français, édité par Pascale Denis)