par Naomi Tajitsu

Le constructeur automobile japonais Nissan a présenté jeudi un plan de réduction de ses capacités destiné à améliorer son efficacité opérationnelle, marquant ainsi l'abandon d'une stratégie de conquête de parts de marché qui a conduit le groupe à accuser sa première perte d'exploitation annuelle en 11 ans.

Dans le cadre de ce plan sur quatre ans, le partenaire d'alliance de Renault va réduire sa capacité de production et sa gamme de modèles d'environ un cinquième, ce qui lui permettra d'abaisser ses coûts fixes de 300 milliards de yens (2,5 milliards d'euros) dans un contexte de crise pour le secteur, exacerbé par la pandémie liée au coronavirus.

Dans le cadre de ce plan de relance, le deuxième en moins d'un an, Nissan vise une marge bénéficiaire d'exploitation de 5% et une part de marché mondiale de 6%.

Pour l'exercice 2019-2020, clos fin mars, la perte d'exploitation enregistrée par le groupe de Yokohama a atteint 40,47 milliards de yens (340 millions d'euros), soit la plus importante depuis 2008-2009. La marge d'exploitation sur le dernier exercice annuel s'est établie à -0,4%.

Le constructeur a vendu sur la période 4,8 millions de véhicules, soit 13% de moins que sur l'exercice précédent. Cette deuxième baisse d'affilée des ventes a fait reculer Nissan au troisième rang des constructeurs automobiles japonais derrière Toyota et Honda.

Le nouveau plan d'économies survient au lendemain de la présentation de la nouvelle stratégie de son alliance avec Renault et Mitsubishi, visant à renforcer les synergies de production et de développement de leurs véhicules afin de redresser la compétitivité de l'organisation.

Avec son nouveau plan, Nissan tourne le dos à la stratégie de conquête à tout prix de parts de marché initiée par Carlos Ghosn, l'ancien président du groupe, tombé en disgrâce à la suite de son arrestation au Japon pour des malversations financières qu'il dément.

RENTABILITÉ DURABLE

Le groupe vise désormais une rentabilité durable avec Makoto Uchida et Ashwani Gupta, respectivement directeur général et directeur général délégué de Nissan.

Le constructeur prévoit notamment de fermer ses usines à Barcelone et en Indonésie, de se retirer du marché sud-coréen et d'abandonner sa marque Datsun en Russie. La principale usine du groupe dans la capitale catalane fermera à partir de décembre, a précisé Gianluca De Ficchy, le président de Nissan Europe.

Le gouvernement espagnol estime que la fermeture de ce site pourrait coûter jusqu'à un milliard d'euros à Nissan et déboucher sur plus de 3.000 suppressions d'emplois.

Interrogé à l'issue de la présentation du plan, le directeur général de Nissan a refusé de fournir des chiffres sur les suppressions d'emplois dans le monde.

"Je ferai tout mon possible pour ramener Nissan sur la voie de la croissance", a-t-il promis, ajoutant que le constructeur avait appris de ses erreurs, faisant référence à la course aux parts de marché.

Nissan a déclaré vouloir produire environ 5,4 millions de véhicules par an, contre six millions dans le plan présenté en juillet dernier par l'ancien président du groupe Hiroto Saikawa, également évincé dans la foulée du scandale Carlos Ghosn.

Nissan va également donner la priorité à la préservation de ses liquidités. Selon Makoto Uchida, l'amélioration du flux de trésorerie disponible représente un immense défi. Le groupe juge cependant le niveau actuel de liquidités suffisant, malgré un cash flow négatif de 641 milliards de yens sur l'exercice annuel clos en mars.

Nissan n'a pas souhaité donner de prévisions pour l'exercice annuel en cours, estimant que la crise liée à la pandémie créait trop d'incertitudes.

A la Bourse de Paris, l'action Renault qui montait en début de séance, est passée dans le rouge après les annonces de Nissan et perdait 0,6% à 13h00.

(Bureau de Tokyo, version française Bertrand Boucey, Myriam Rivet, Marc Angrand et Claude Chendjou, édité par Blandine Hénault)