* Le nouveau DG prend ses fonctions mardi à l'issue de l'AG

* Il doit regagner la confiance des investisseurs

* Il exclut une fusion majeure à court terme

par Mathieu Rosemain

PARIS, 23 mai (Reuters) - Slawomir Krupa, qui prend ce mardi les rênes de Société générale, a une mission claire : replacer la banque rouge et noire parmi les établissements mondiaux de premier plan avec une identité propre.

Il devra trouver pour cela un équilibre délicat, en améliorant le rendement pour les actionnaires sans prendre de risques excessifs, dans un contexte difficile pour le secteur bancaire en Bourse.

"C'est très important de clarifier (les choses) là où c'est nécessaire et de le dire très clairement à l'ensemble de nos parties prenantes : 'Société générale, c'est ça'", explique-t-il dans un entretien à Reuters.

Slawomir Krupa, qui a fait l'essentiel de sa carrière au sein de la banque, dévoilera sa stratégie d'ici l'automne.

Après avoir dirigé la banque d'investissement de Société générale, il deviendra officiellement mardi à l'occasion de l'assemblée générale des actionnaires le nouveau directeur général du groupe après le mandat tumultueux et long de 15 ans de son prédécesseur, Frédéric Oudéa.

Sous l'égide de ce dernier, Société générale a fusionné des activités, vendu des actifs - y compris une sortie coûteuse du marché russe - et réduit l'exposition au risque.

Malgré cela, le cours de Bourse de Société générale rapporté à la valeur des actifs tangibles du groupe est de 0,30, un ratio qui place la banque française au même niveau que sa consoeur Deutsche Bank mais loin derrière sa grande rivale BNP Paribas et dans le bas du classement des banques européennes.

La vulnérabilité de Société générale a été rendue plus visible encore lors de la récente crise qui a secoué le secteur en mars et au cours de laquelle la banque a été parmi les plus durement touchées en Bourse.

Slawomir Krupa aura pour tâche de sortir Société générale de cette zone de danger.

Sa priorité absolue sera d'améliorer la rentabilité de la banque dans sa structure actuelle, comme il l'a fait pour la division de banque d'investissement, a déclaré une personne proche du conseil d'administration.

Cela pourrait conduire la banque à exploiter davantage d'autres secteurs d'activité afin de réduire une exposition jugée encore trop importante aux activités risquées de banque d'investissement.

A son arrivée à la tête de la banque d'investissement début 2021, Slawomir Krupa a réduit les coûts et s'est attaqué aux risques de trading, observe cette source proche des réflexions du conseil d'administration.

Deux ans plus tard, la banque d'investissement de Société générale a enregistré la plus forte croissance annuelle de son bénéfice avant impôts parmi ses concurrentes cotées en Bourse BNP Paribas et Credit Agricole SA, et a renforcé son rôle de moteur pour les profits de l'établissement.

ROMPRE AVEC LA TRADITION

Le succès de Slawomir Krupa, 48 ans, à la tête de la banque d'investissement a joué en sa faveur lorsqu'il s'est présenté en septembre dernier pour le poste de directeur général, ont indiqué des personnes proches du processus.

Le banquier franco-polonais est né en Bulgarie, alors sous régime communiste, en 1974. Il a émigré avec sa famille de Cracovie, en Pologne, vers la France à l'âge de six ans.

En dépit de ses 26 ans passés chez Société générale, son parcours constitue une rupture dans la lignée de ses prédécesseurs, tous issus des rangs de la haute fonction publique.

Son caractère est aussi très éloigné de celui de Frédéric Oudéa.

"Chaque personne a sa propre personnalité. Slawomir a un enthousiasme, une manière d'avancer, d'emmener les gens avec lui. Frédéric (Oudéa) est plus collégial", estime Jean-Pierre Mustier, ancien dirigeant d'UniCredit et de la banque d'investissement de Société générale.

Reconnaissant lui-même son franc-parler, Slawomir Krupa peut être impatient et exigeant, confie un haut cadre de Société générale.

Le nouveau directeur général aura fort à faire dès le début de son mandat. Dans les milieux d'affaires, on n'exclut pas que la banque doive fusionner à terme avec un concurrent européen.

Un banquier d'affaires, qui souhaite conserver l'anonymat, estime qu'un tel rapprochement serait bénéfique pour Société générale, la banque étant un "acteur de taille moyenne" éclipsé par ses rivaux américains et sa concurrente BNP Paribas.

"Comment améliorer la rentabilité (des banques) sans que des fusions se mettent en place ? Je ne vois pas du tout comment c'est possible", souligne Jean Dermine, professeur à l'INSEAD.

Pour l'heure, Slawomir Krupa est accaparé par les questions opérationnelles, telles que la finalisation de la coentreprise formée avec AllianceBernstein pour combiner leurs activités de cash actions et de recherche actions.

Le nouveau dirigeant l'assure : une fusion de grande envergure n'est pas à l'ordre du jour à court terme.

"Stratégiquement, est-ce que l'Europe a besoin de banques plus fortes ? La réponse est oui mais je ne crois pas que ce soit quelque chose qui soit vraiment à l'ordre du jour à ce stade", affirme-t-il à Reuters. (Reportage Mathieu Rosemain, Blandine Hénault pour la version française)