par Michel Rose

PARIS, 28 juin (Reuters) - L'Union européenne va accélérer ses investissements dans les lanceurs, les communications par satellites et l'exploration spatiale pour ne pas se laisser déborder par les ambitions chinoises et américaines, a déclaré dimanche Thierry Breton.

"On est une puissance spatiale autonome. Et on va non seulement le rester, mais on va accélérer", a dit à Reuters le commissaire européen au Marché intérieur, dont les attributions couvrent également le domaine spatial.

Au cours des décennies passées, l'UE a cherché à avoir son propre accès à l'espace, indépendamment des pionniers que sont les Etats-Unis et la Russie, et a développé des programmes au succès parfois méconnu, comme le lanceur Ariane et le système de navigation par satellite Galileo.

Mais l'émergence aux Etats-Unis de SpaceX et ses fusées réutilisables ainsi que les progrès de la Chine dans le domaine spatial, dont un premier alunissage sur la face cachée de la Lune, obligent l'UE à accélérer.

"SpaceX a redéfini les standards des lanceurs, et c'est pour cela qu'Ariane 6 est une étape nécessaire, c'est une étape qui n'est pas une fin en soi: on doit dès maintenant penser à Ariane 7 et aux ruptures technologiques à apporter", a souligné Thierry Breton.

"Ce qui est très important c'est que tout le monde soit conscient qu'on a en Europe toutes les technologies et l'expertise pour le faire".

Pour la première fois de son histoire, l'UE va signer un contrat cadre d'un milliard d'euros avec Arianespace, avec notamment des commandes garanties afin d'offrir plus de visibilité à l'entreprise. En échange, Bruxelles lui demandera de faire un effort sur l'innovation.

"L'Europe est autonome en ce qui concerne son accès à l'espace et évidemment le restera. C'est un élément essentiel de notre souveraineté".

Galileo est aujourd'hui la pièce maîtresse de cette souveraineté spatiale européenne.

ÂPRES DISCUSSIONS SUR LE BUDGET

Alors que le projet avait suscité des doutes lors de sa conception, certains Etats membres, Grande-Bretagne en tête, redoutant à l'époque un coûteux doublon du GPS américain, il fait aujourd'hui consensus.

Et Thierry Breton ne veut pas s'arrêter là.

"J'ai décidé d'accélérer la mise en oeuvre des satellites de deuxième génération, qui seront les plus modernes du monde", explique-t-il.

Le déploiement de ces nouveaux satellites Galileo à propulsion électrique et communicants se fera donc fin 2024, contre 2027 initialement.

Afin que l'Europe continue de faire la course en tête, Thierry Breton souhaite aussi en faire un centre mondial d'innovation dans le secteur.

Il propose la création d'un Fonds spatial européen d'un milliard d'euros capable d'investir rapidement dans les startups du secteur ainsi que d'un incubateur européen de l'espace coordonnant tous les efforts existants.

Enfin, il propose un programme innovant permettant à des startups d'accéder gratuitement, à la suite d'une compétition, aux satellites et aux lanceurs afin de tester leurs technologies en orbite.

Tout cela sera possible si les 27, qui négocient âprement le prochain budget européen, soutiennent la proposition de la Commission d'un budget spatial de 16 milliards d'euros.

"On est très prêts du budget initial qui avait été présenté par la commission précédente. On a encore un petit effort à faire, mais on y travaille et j'espère vivement qu'on va y arriver." (Version française Benoît Van Overstraeten, édité par Gwénaëlle Barzic)