Vivendi ne bouge pratiquement pas mardi à la Bourse de Paris, le titre ne cédant que 0,1% à 29,16 euros, au lendemain d'informations révélées pas Bloomberg selon lesquelles le fonds Third Point y détiendrait une part "substantielle" du capital. Le montant exact de sa participation reste encore inconnue mais, selon l'agence de presse, citant des sources anonymes proches du dossier, le fonds spéculatif basé à New York la détiendrait "depuis plusieurs mois". Un acteur de plus dans ce qui ressemble de plus en plus à une bataille pour prendre le contrôle du conglomérat des médias.

Third Point s'est refusé à tout commentaire. De son côté, un porte-parole de Vivendi a déclaré ne disposer d' "aucune information à ce sujet" lui permettant de "confirmer cette rumeur".

Ces nouvelles révélations interviennent alors que Vivendi doit faire approuver lors de sa prochaine assemblée générale du 22 juin le projet de scission de sa filiale Universal Music Group (UMG), en en redistribuant 60% du capital aux actionnaires du groupe. Au même moment, la société de Vincent Bolloré est en négociation avec le SPAC du milliardaire Bill Ackman, Pershing Square Tontine Holdings, afin de lui céder 10% du label musical. Entre fin 2020 et début 2021, un consortium mené par Tencent avait déjà acquis 20% d'UMG en deux fois.

Le fonds Third Point, dirigé par le milliardaire Dan Loeb et qui détenait 17,3 milliards de dollars d'actifs sous gestion au 31 mai via sa filiale londonienne Third Point Investors Ltd, serait lui aussi potentiellement intéressé pour acquérir les 10% d'UMG que souhaite céder Vivendi, affirme Bloomberg.

Une stratégie de redistribution morcelée, grâce à laquelle Vivendi espère tirer le maximum de l'introduction en bourse de sa pépite, prévue le 27 septembre prochain au plus tard à Amsterdam, mais qui n'a pas manqué de faire grincer des dents. En effet, des actionnaires minoritaires du géant des médias, qui souhaitent eux aussi grappiller une part du gâteau, se sont manifestés ces dernières semaines pour critiquer cette stratégie.

Le fonds Bluebell Capital basé à Londres, favorable sur le principe à la séparation d'UMG, estime que les conditions de son introduction en bourse ne sont pas favorables aux petits actionnaires et demande le versement d'un dividende exceptionnel de 2,8 euros par action, soit environ 3,3 milliards d'euros au total. Il a par la suite écrit à l'AMF afin de demander une enquête concernant les informations réellement diffusées sur le projet.

De son côté, le gestionnaire d'actifs américain Artisan Partners a mis en avant le fait que la vente morcelée de parts du label musical est une "allocation sous-optimale" du capital, et que la distribution de 60% des titres aux actionnaires sous forme de dividende exceptionnel n'est pas efficace fiscalement. "Faire peser une charge fiscale sur les actionnaires de Vivendi par le biais du processus de scission n'est pas attrayant", avait déclaré David Samra, gestionnaire de portefeuille chez le 11ème actionnaire de Vivendi, avec 1,45% des actions au 31 mars 2021.

Avec une valorisation potentielle de 35 milliards d'euros, dettes incluses, UMG représente une aubaine pour nombre d'investisseurs. Mais certains d'entre eux, à l'image de Bluebell, redoutent que Vincent Bolloré n'utilise les bénéfices de cette introduction en bourse pour accroître sa main-mise sur Vivendi. Dan Loeb, réputé fin stratège, n'a pas précisé quel était son projet pour Vivendi, mais une décote du conglomérat après la scission d'UMG serait une bonne opportunité pour lui d'en obtenir davantage, en demandant par exemple la cession d'autres actifs rentables.