Ce décret, qui revient à interdire aux groupes américains de faire affaire avec le chinois Huawei Technologies, confirme une information rapportée mardi par Reuters.

Le secrétaire américain au Commerce, Wilbur Ross, a précisé dans une interview à Bloomberg Television que le décret entrerait en vigueur ce vendredi.

Le département du Commerce a par ailleurs annoncé le placement de Huawei et de 70 de ses filiales sur une liste noire - nommée "Liste des entités" -, qui va contraindre le groupe télécoms chinois à demander une dérogation pour acheter des pièces et composants électroniques aux sociétés américaines.

Dans un communiqué, le secrétaire Ross précise que Trump a appuyé cette mesure qui "empêchera la technologie américaine d'être utilisée par des entités étrangères d'une manière qui peut potentiellement nuire à la sécurité nationale américaine ou à ses intérêts de politique étrangère".

Pékin s'oppose fermement aux sanctions unilatérales, a réagi un porte-parole du ministère chinois du Commerce, invitant Washington à cesser de nuire aux relations commerciales bilatérales.

"La Chine a souligné à plusieurs reprises qu'il ne fallait pas abuser du concept de sécurité nationale et qu'il ne devait pas être utilisé comme un outil protectionniste", a poursuivi Gao Feng, selon lequel Pékin "prendra toutes les mesures nécessaires pour protéger les droits légitimes des entreprises chinoises".

DES ALTERNATIVES "PLUS COUTEUSES"

Les Etats-Unis estiment que les équipements de Huawei pourraient servir à des activités d'espionnage de la Chine et ils exhortent leurs alliés, notamment en Europe, à ne pas s'appuyer sur le groupe chinois pour le déploiement de la nouvelle génération de téléphonie mobile, la 5G.

Huawei, qui a démenti à plusieurs reprises les allégations américaines, s'est dit "prêt et disposé à collaborer avec le gouvernement américain pour trouver des mesures efficaces visant à garantir la sécurité des produits".

Dans un communiqué, la firme chinoise déclare que l'empêcher de commercer aux Etats-Unis "ne rendra pas les Etats-Unis plus sûrs ou plus forts". "Au lieu de cela, ajoute-t-elle, cela va seulement réduire les Etats-Unis à des alternatives de qualité inférieure et malgré tout plus coûteuses, laissant les Etats-Unis à la traîne pour le déploiement de la 5G."

Huawei entend aussi contester la décision du département du Commerce de l'inscrire sur sa liste noire des "entités", précisant que cette initiative "provoquera des préjudices économiques considérables pour les entreprises américaines avec lesquelles Huawei travaille".

Cette décision, ajoute l'équipementier télécoms, "affectera des dizaines de milliers d'emplois aux Etats-Unis et perturbera la collaboration actuelle et la confiance mutuelle qui existe sur la chaîne globale d'approvisionnement".

Le décret signé par Donald Trump est pris en application de la loi "International Emergency Economic Powers", qui donne au président le pouvoir de réglementer le commerce en réponse à une situation d'urgence nationale. Le département du Commerce a 150 jours pour élaborer un plan d'application.

Le décret, qui était en discussion depuis plus d'un an, vise à protéger la chaîne d'approvisionnement des "adversaires étrangers" des Etats-Unis dans le domaine de l'informatique et des télécoms, a déclaré le secrétaire au Commerce, Wilbur Ross.

"Sous la direction du président Trump, les Américains pourront avoir confiance en la sécurité de nos données et de notre infrastructure", a-t-il déclaré.

La commission fédérale des Communications (FCC), autorité de tutelle des télécoms aux Etats-Unis, a aussi décidé la semaine dernière à l'unanimité de ne pas autoriser China Mobile à fournir ses services sur le territoire américain. Elle a annoncé qu'elle allait aussi réexaminer des autorisations données à China Unicom et China Telecom.

Donald Trump a promulgué en août dernier une loi interdisant aux autorités fédérales de recourir aux équipements de Huawei et de ZTE, un autre groupe chinois.

(David Shepardson avec Yawen Chen et Se Young Lee à Pékin; Bertrand Boucey, Danielle Rouquié, Jean Terzian et Jean-Philippe Lefief pour le service français)

Valeurs citées dans l'article : China Mobile Ltd., ZTE Corporation