par Gwénaëlle Barzic et Mathieu Rosemain

Longtemps instigateur de la concurrence féroce sur le marché français des télécoms, l'opérateur fondé et contrôlé par Xavier Niel en subit aujourd'hui les conséquences sur son activité fixe, sa vache à lait, suscitant l'inquiétude des investisseurs.

Leurs craintes, qui s'étaient déjà traduites par une correction du titre en Bourse ces derniers mois, se sont matérialisées au premier trimestre.

Dans un contexte de promotions quasi-permanentes des différents opérateurs, la maison-mère de Free a enregistré une contraction de 1,6% de son activité historique dans le fixe, pénalisé par la perte de 19.000 abonnés par rapport au trimestre précédent, une première.

Autre signal inquiétant, le très scruté revenu moyen par abonné (Arpu) a reculé sous le seuil des 33 euros.

Dans le mobile, les revenus ont progressé de 3,9% sur les trois premiers mois de l'année mais en marquant un ralentissement par rapport à la hausse de 6,6% enregistrée les trois mois précédents.

En Bourse, le titre chutait de 18,16% à 135,45 euros à 12h40, accusant ainsi sa plus forte baisse historique en séance.

Depuis le début de l'année, Iliad est en queue de peloton en Bourse face à ses concurrents Orange, Bouygues et même Altice, pourtant en difficultés dans l'Hexagone.

MEA CULPA

A l'occasion d'une conférence analystes inhabituelle pour un premier trimestre, la direction d'Iliad a fait son mea culpa, reconnaissant avoir tardé à s'adapter à un marché des télécoms français ultraconcurrentiel du fait du maintien de quatre acteurs, après l'échec de multiples tentatives de consolidation.

"Depuis un an, on n'a pas de bons chiffres, des chiffres qui moi me déçoivent. Un certain nombre de choses ont peut-être trainé, un certain nombre de choses n’ont pas été assez vite", a déclaré Xavier Niel aux analystes.

Pour riposter, Iliad a annoncé un renouvellement de son équipe de direction avec la nomination de son directeur financier Thomas Reynaud au poste de directeur général.

Le groupe entend également revoir sa politique commerciale, sa stratégie de promotions à prix cassés cantonnées au site internet Vente Privée ayant montré ses limites face à des concurrents affichant des tarifs attractifs sur leurs sites maison.

Iliad souhaite désormais rendre accessibles ces promotions au plus grand nombre mais sans casser ses prix.

Le groupe, qui a promis de nouvelles offres mobiles et fixes au cours des quatre prochaines semaines, a par ailleurs donné des précisions sur deux événements très attendus par les investisseurs, car susceptibles de redonner de l'élan à sa croissance.

Le lancement du groupe en Italie, qui connaît des retards, aura lieu d'ici le 21 juin, a promis la société.

Le lancement de deux nouvelles box internet, qui faisait figure d'arlésienne, est par ailleurs confirmé pour la rentrée.

"Il est primordial de réaffirmer notre caractère de challenger, de 'maverick' et de maintenir notre singularité", a souligné Thomas Reynaud, souhaitant qu'Iliad retrouve un profil de croissance dans les 12 prochains mois.

Iliad, qui doit mener de front le déploiement de ses réseaux mobile et fibre en France tout en préparant son lancement à venir en Italie, a réaffirmé son objectif d'atteindre un solde Ebitda-Investissements supérieur à un milliard d'euros en France à partir de 2020, sans pleinement convaincre.

"La génération de free cash flow apparaît de plus en plus compliquée, compte tenu de la pression concurrentielle dans le fixe, de l'absence d'une remontée de l'Arpu suffisante et du niveau élevé des investissements, ce qui complique l'atteinte de l'objectif (...)", estiment les analystes de Kepler Cheuvreux dans une note.

Le broker, dont la recommandation est à "alléger" sur le titre, a abaissé son objectif de cours de 192 à 160 euros.

(Avec Blandine Hénault, édité par Jean-Michel Bélot)

par Gwénaëlle Barzic et Mathieu Rosemain